Jacques et Philibert AUGOYAT

soldats du 60e R.I.T

 

Jacques et Philibert Augoyat sont les deux fils de Claude Augoyat et Marie Dargaud.
Ils naissent tous les deux à Tramayes, non loin de Saint Léger sous la Bussière, Jacques le 29 octobre 1874, Philibert le 4 novembre 1876.
Jacques est marié à Benoîte Lacondemine, née le 31 décembre 1876 à Saint Léger.

Lorsque la guerre éclate, vu leur âge (40 et 38 ans), ils sont mobilisés dans la Territoriale au 60e Régiment d'Infanterie Territoriale : Jacques à la 5e Compagnie et Philibert à la 11e Compagnie.

 

Mobilisés dans la Territoriale

L'historique du 60e RIT raconte : "La mobilisation se fait du 2 au 9 août. L'état d'esprit des arrivants de chaque jour… est fait de gaîté généreuse et contagieuse…Le Bourguignon sait voir et vouloir…il accepte la guerre que lui impose l'ennemi, et il est décidé à la mener jusqu'au bout, jusqu'à la délivrance complète… Il sait, le vieux Poilu du 60e R.I.T., que le Boche sera vaincu et mis hors d'état de nuire parce que tout sera fait pour cela."

"Dès que la mobilisation est achevée, le 60e R.I. T. quitte Mâcon à l'effectif de 44 officiers, 168 sous-officiers et 2 859 soldats et il est transporté dans le camp de Besançon ; là…le régiment commence un véritable entraînement qui se prolonge jusqu'au 20 octobre ; affecté à la défense du secteur sud…les hommes sont employés à des travaux de défense et reçoivent une instruction intensive du service en campagne…Les soldats s'appliquent avec conscience à fournir l'effort qu'on leur demande, supportent avec gaîté les fatigues de cet entraînement progressif…Si donc, cette période d'entraînement de sept semaines fut parfois très pénible, elle fut certainement rendue facile par la bonne volonté de tous et par la haute conception que chacun eut, dès le premier jour, de son devoir."

"…Le (régiment), le 8 octobre, sur ordre du commandement supérieur, envoie 1 102 hommes de troupe au 160e R.I. et 290 au 79e R.I. Cet honneur de fournir des renforts à deux des meilleurs régiments du 20e corps, il l'appréciait ; mais cette séparation... fut une peine pour tout le monde… Le 16 octobre, 500 hommes partent encore pour le 89e R. I. et, entre temps, le dépôt de Mâcon envoie 1 630 hommes pour remonter l'effectif du corps épuisé par ces saignées successives."

Eugène Perrussot, instituteur à Saint Léger sous la Bussière, est lui-même "rappelé à l'activité par décret de mobilisation générale du 1er août 1914". A partir du 3 août, il est Lieutenant Territorial de la 4e Compagnie du 1er Bataillon du 60e R.I.T, sous les ordres du Capitaine Corne. Il côtoie alors bien des jeunes hommes de Saint Léger incorporés dans ce régiment de Mâcon.

Jean-Marie CHEMARIN, Antonin DARGAUD, Claude JULLIARD, entre autres, sont 3 soldats du 60e Régiment d'Infanterie Territoriale. Dès octobre 1914, ils rejoignent les rangs du 153e R.I.
François LAFFAY rejoint le 146e Régiment d'Infanterie.

Eugène Perrussot devient, à sa demande, le 6 octobre 1914, lieutenant dans un régiment d'active : le 89e R.I.

"…L'ordre était venu de se tenir prêt à partir…Cette fois, c'est la guerre, la vraie guerre…"

 

Forêt de Parroy

L'historique du 60e RIT poursuit : "Le 20 octobre 1914, à 3 heures du matin, le 60e R.I.T. part de Besançon. Arrivé à Nancy le même jour…Le 21, à 6 heures, il part pour Lunéville où il arrive à 16 heures et il prend aussitôt les emplacements de la 147e brigade d'infanterie qui se porte plus en avant. Ce n'est pas encore la ligne de feu mais le canon se fait entendre tout proche, aux lisières de la forêt de Parroy, dont la valeureuse 74e D.I. occupe une moitié avec les villages attenants."

 

 

"…/… Les hommes font sur les champs de bataille du Sanon et de la Vezouze des manoeuvres immédiatement instructives…Le 12 novembre, le 2e bataillon quitte ses emplacements de l'arrière pour être mis à la disposition du 71e B.C.P. Il occupe les " Cinq tranchées " au coeur de la Forêt de Parroy, avec ses unités réservées à Crion et à Sionviller, à la lisière ouest du massif boisé.
… Le 18 novembre, un essai original est tenté pour rajeunir l'allure du régiment qui, malgré son moral très élevé, est une légion de quadragénaires. Les 168e et 169e R.I. du 20e Corps lui envoient 96 gradés…Peut-être le système n'a-t-il pas donné le maximum des résultats attendus ! Ces jeunes étaient trop peu nombreux pour n'être pas absorbés, et puis rien ne peut redonner à des corps de 45 ans la souplesse de leurs 20 ans ; mais à sentir toujours auprès d'eux cette belle audace de la jeunesse qui ne doute de rien, les pépères du 60e R.I. ont certainement dû conserver avec leur belle humeur de Bourguignons un entrain que n'eurent pas toujours les soldats de leur âge …/…
Mais c'est le 2 décembre qu'intervient l'événement qui laissera dans l'esprit de la troupe l'impression la plus profonde quant à sa formation guerrière. Les unités du 60e R.I. T sont réparties provisoirement entre les autres corps de la 74 D.I. de la façon suivante :

  • 1er Bataillon
    • E.-M. et 1re Cie au 222e R.I à Serres
    • la 2e Cie au 71e B.C.A.P à Sionvillers
    • les 3e & 4e Cie au 299e R.I à Einville et Maixe
  • 2e Bataillon
    • la 5e Cie au 43e B.C.A.P à Jolivet (avec Jacques Augoyat)
    • les 6e & 8e Cie au 230e R.I à Saint Nicolas
    • la 7e Cieau 50e B.C.A.P à Croismare
  • 3e Bataillon
    • la 9e Cie au 333e R.I à Varangéville
    • la 10e au 333e R.I au Rambettant
    • 11e & 12e au 223e R.I à Saint Nicolas (avec Philibert Augoyat)

 

 

 

 

 

 

 

 

… Cette situation durera jusqu'au 23 mars 1915, c'est-à-dire pendant quatre mois, pendant lesquels le régiment prendra part régulièrement à tous les exercices, à toutes les affaires de guerre de l'unité active dont chacune de ses compagnies suit la destinée.
C'est ainsi que, le 22 novembre, la 7e compagnie et un peloton de la 6e sont mêlés à une petite opération dirigée par le 71e B.C.A.P. dans la Forêt de Parroy. Ils s'y comportent vaillamment et s'en tirent sans pertes ; les combats en forêt furent rarement meurtriers.
Le 8 février (1915), le 71e B.C.A.P. attaque le Rémabois, petit massif boisé au sud-est de la forêt; les 2e et 6e compagnies du 60e R.I.T. participent à l'opération, la 2e comme soutien de l'artillerie, la 6e comme réserve.
Le lendemain, 9, l'ennemi pousse une attaque contre nos positions, principalement à la ferme Saint-Georges ; les 2e, 5e, 6e et 11e compagnies occupent leurs positions de combat, l'ennemi ne pousse pas son attaque à fond. Deux pépères du 60e sont cités à l'ordre du jour : ce sont les deux premières décorations du Régiment, où passe un souffle de franche et noble fierté… "

"…Dès lors, on voit se dessiner la fonction de la Forêt de Parroy. Le temps est passé où une action sans trop de frais aurait pu la dégager entièrement ; l'ennemi tient opiniâtrement et fortifie sans répit les deux ou trois sommets qui commandent la croupe menaçante de la forêt, le village de Parroy au nord, le bois de Moncourt à l'est, le haut de Corbé et le Rémabois au sud : le front va se stabiliser définitivement pour tout le reste de la guerre."

 

 

 

 

 

 

"Le 17 juin (1915), chacun des bataillons du 60e R.I.T, reçoit son secteur définitif d'avant-postes à organiser et à défendre :

  • Le 1er dépendant d'Einville occupe, dans le C.R. 8, le bois de Bénamont avec ses avancées.
  • Le 2e fournit les grand'gardes et les petits postes de la lisière à Bossupré, Bois Carré, chapelle de Juvicourt, Tuilerie avec réserve à Sionviller.
  • Le 3e a son réduit principal au bois de la Goutteleine avec lequel il s'identifiera tellement que les divisions cantonnées dans la forêt par la suite le nommeront : le bataillon des chasseurs de la Goutteleine.

Dans chaque bataillon, trois compagnies sont en ligne et une en réserve, à Einville, Sionviller et Marainviller. Presque toutes les nuits, il y a alerte, le régiment allemand qui est en face, le 4e Bavarois de Landwehr, est excellent…"

 

 

"… le 25 juin, c'est la 5e compagnie (avec Jacques Augoyat) qui repousse l'ennemi en perdant quelques blessés ; le 15 juillet, une forte patrouille de la 6e compagnie nettoie les abords du Bois Carré et perd un sergent tué et un caporal blessé ; le 22, la 8e compagnie attaquée à la Chapelle de Juvicourt, repousse brillamment l'ennemi et s'en tire avec quelques blessés…"

"… Au mois d'août, tout le secteur IV s'anime. Des reconnaissances d'officier sont lancées pour déterminer les travaux des Allemands sur la rive nord du Sanon … (Elles) permettent de repérer d'importants ouvrages sur lesquels l'artillerie établit des tirs d'interdiction.

De son côté, le 60e R.I. T. achève la construction de deux ouvrages importants : l'un devant Henamenil, vrai chef-d'oeuvre de fortification, l'autre devant Bossupre, et qui va se continuer jusqu'au bois Legrand, tranchée ininterrompue de 3 kilomètres avec abris solides, clayonnages, caillebotis…"

 

Jacques AUGOYAT

Eugène Perrussot explique à son sujet : "Est affecté au 60e régiment d'infanterie territoriale, et ce régiment de pépères est chargé de défendre les lisières nord et est de la forêt de Parroy, non loin de la frontière, près d'Avricourt, dont on aperçoit le clocher.
Les pépères font bonne garde.
Ils creusent des tranchées, installent des réseaux de fil de fer, construisent des fortins, et rendent leur secteur inexpugnable. Ils ne connaissent pas le repos, après le service de garde, derrière le créneau, il y a les corvées. Pour eux, pas de relève. Il semble qu'on les oublie, mais ils ne murmurent pas. Ils sont pendant des mois et des années sur les mêmes emplacements. C'est au cours de cette rude existence qu'Augoyat contracte la maladie qui devait l'emporter. Il essaye de lutter contre le mal mais il est évacué et il va mourir à l'hôpital de Pontarlier, laissant parmi nous le souvenir d'un brave père de famille et d'un homme de cœur."

Il est précisé sur sa fiche de Mémoire des Hommes que Jacques Augoyat décède à Pontarlier d'un "abcès du foie par angiocholite".

Dans l'immense majorité des cas, une angiocholite est causée par la migration d'un calcul dans le cholédoque. Elle est caractérisée par trois symptômes, le tout sur environ 24 à 48 heures : douleur intense au niveau du foie ou de l'estomac puis fièvre à 40 degrés avec des frissons (septicémie), accompagnée parfois de nausées et de vomissements. Le lendemain, l'ictère (jaunisse) apparaît. Si l'angiocholite n'est pas traitée, l'évolution est fatale.

 

l'hôpital de Pontarlier

 

 

 

"L'an mil neuf cent seize, le quinze mai, à onze heures du matin, à l'Hôtel de la Mairie, devant nous Ernest Deniset ?, Maire, Officier de l'état civil de la ville de Pontarlier, chef lieu du quatrième arrondissement du département du Doubs, sont comparus
1e Francis Renaud ? infirmier âgé de quarante quatre ans, domicilié à Pontarlier, voisin du défunt ;
2e Charles Désiré Jacquet, secrétaire d'état civil, âgé de soixante et un ans, domicilié à Pontarlier, non parent ni voisin du défunt ;
lesquels nous ont déclaré que Jacques Augoyat, cultivateur, mobilisé au 60e R.I.T 5e Compagnie, N° Matricule 639, âgé de quarante et un ans, né à Tramayes (Saône et Loire) le vingt neuf octobre mil huit cent soixante quatorze, domicilié à Saint Léger sous la Bussière, époux de Benoîte Lacondemine, sans profession, domiciliée à Saint Léger sous la Bussière (Saône et Loire), fils de Claude Augoyat et de Marie Dargaud épouse décédée,
est décédé le présent jour à une heure du matin, à la maison N° 2, faubourg Saint Etienne, Ambulance 28..."

Cet acte de décès est transcrit sur les registres de Saint Léger le 21 août 1916 par le maire Joseph Plassard.

 

Philibert AUGOYAT

L'historique du 60e R.I.T poursuit : "… De jour en jour, l'infanterie allemande se montre plus agressive, les mines tombent par centaines sur le sous-secteur…Fin décembre (1916), l'ennemi bombarde rageusement le sous-secteur, des centaines d'obus font quelques victimes…Cette fin de l'année 1916 fut très pénible, très dure…Janvier (1917) apporte dans un froid de - 20° son contingent presque quotidien de combats et de bombardements.
Les 18, 19, 20 et 23 janvier, en particulier, puis les 25 et 29 tiennent en alerte le Régiment sous une avalanche de torpilles.
Jusqu'au 6 février, les unités sont l'arme au pied, en prévision .d'une attaque imminente.
Le 6 (février 1917) …à midi, l'ennemi déclenche un déluge de projectiles sur tous les postes de la forêt de Parroy. …Les débuts de mars marquent une recrudescence d'agitation, l'Allemand se montre nerveux et déclenche, à tout indice suspect, de violents tirs de barrage, les 2. 3, 4 mars. Le 8 mars, l'artillerie française détruit de fond en comble l'un des principaux ouvrages ennemis : les Ouvrages Blancs…"

Eugène Perrussot, dans son discours, dit de Philibert Augoyat : "Appartient au 60e régiment d'infanterie territoriale, comme son frère déjà nommé. Il supporte la rude existence des pépères de la forêt de Parroy. Il a été tué à mes côtés le 19 mars 1917, pendant un bombardement, par un obus, et il a mérité par sa belle conduite une citation et la croix de guerre."

En effet, Eugène Perrussot, parti début octobre 1914 comme Lieutenant dans un régiment d'active le 89e R.I, a servi ensuite comme Lieutenant puis comme Capitaine au 143e R.I du 1er mars 1915 au 13 janvier 1917. A cette date, il est revenu comme Capitaine au 60e Régiment Territorial d'Infanterie.

La fiche de Philibert Augoyat sur Mémoire des Hommes précise qu'il est "tué à l'ennemi au bombardement de Goutteleine".

"Le Bois de Goutte Laine (en 2 mots) se trouve sur le territoire de la commune de Parroy. C'est une petite bande de forêt domaniale d'environ 2 km de long sur 300 m de large, coincée à l'est et à l'ouest entre deux forêts communales, au coeur du massif forestier. Au nord se trouve la plaine qui donne sur le village de Mouacourt et au sud se trouve la route forestière du Haut de la Faite, laquelle comme son nom l'indique, domine le massif par la ligne de crête et coupe le massif en deux versants SE et NO. De par sa position topographique, cette route forestière fut l'objet de la convoitise des deux armées aussi bien au 14/18 qu'en 39/45. " (Renseignement fourni par Alain Girod)

"L'an mil neuf cent dix sept, le vingt et un mars à quatorze heures, étant à la Grande Taille, forêt de Parroy (Meurthe et Moselle)
Acte de décès de Philibert Augoyat, soldat de 2e classe, à la 11e Compagnie, du 60e Régiment territorial d'Infanterie, numéro Matricule 915 du recrutement de Mâcon ; domicilié en dernier lieu à Saint Léger sous la Bussière (Saône et Loire) décédé à GR 3 Forêt de Parroy (Meurthe et Moselle) "Mort pour la France" tué à l'ennemi le dix neuf mars mil neuf cent dix sept à quinze heures.
Inhumé au cimetière militaire de la Grande Taille, forêt de Parroy (Meurthe et Moselle)
fils de Claude (Augoyat) et de feue Marie Claudine Dargaud, mariés… Nous nous sommes transportés auprès de la personne décédée et assuré de la réalité du décès. Dressé par nous, Jean Baptiste R… ? Lieutenant au 60e Régiment Territorial d'Infanterie, décoré de la Médaille militaire, officier de l'état civil ;
sur la déclaration de Jean Julien Mathonat, âgé de quarante ans, sergent à la 11e Compagnie du 60e Régiment Territorial d'Infanterie, domicilié à Arpheuille Saint Priest (Allier) non parent du défunt ; et de Emile Auguste Radix ? âgé de quarante deux ans, soldat de 2e classe à la 11e Compagnie du 60e Régiment Territorial d'Infanterie, domicilié Boulevard du Congo N° 8 à Vichy (Allier) non parent du défunt ; témoins qui ont signé avec nous après lecture…"

Acte transcrit le 8 mai 1917 sur les registres de Saint Léger par Jean Vivier, adjoint au maire.

Les corps des deux frères Augoyat furent transférés après guerre au cimetière de Saint Léger sous la Bussière où ils reposent côte à côte :

 

 

 

 

 

   

 

 

 

 

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