La Grande Guerre, vue par Maurice Bonnart

par Guy Friadt - août 2008 - juillet 2011

 

De cette période de guerre, Maurice BONNART, dit Albert, a rédigé un carnet de route et il a entretenu une correspondance importante avec sa femme, ses sœurs et ses filles.
Il évoque les "marmitages" allemands (bombardements) en première ligne, qui font plus d'effet sur la santé mentale des soldats que de tués. Il évoque "la bonne blessure" de ses congénères : la blessure grave (mais non vitale) qui nécessitera le départ du front vers l'hôpital, à l'arrière. Il raconte également les longs transports en train, en camion, à pied, qui vont lui faire parcourir le front d'Est en Ouest, croisant du regard des paysages familiers, de Saint-Denis et de la forêt de Compiègne, sans pouvoir prendre le temps d'une visite à ses parents, à sa famille.

 

Notes de voyage de Maurice Bonnart, dit Albert

 

28 mars 1915

notes au départ de Masevaux (15 km sud-ouest de Thann, sur la route du ballon d'Alsace, Haut Rhin) qui a eu lieu dans la nuit vers 11 h en auto : "Arrivé à Bas Evette (nord-ouest de Belfort, gare de chemin de fer), le matin à 2 h. Embarqué le 29 mars après-midi et départ à 4 h. Passé par Lure, Vesoul, Chaumont, Joinville, Vitry-le-François, Châlons-sur-Marne, Château-Thierry, Mareuil sur Ourcq, Verberie, Estrées-Saint-Denis où a eu lieu le débarquement le 30 mars. Dans la soirée, nous partons en autos vers Laneuvilleroy où nous restons jusqu'au 5 avril."

 

5 avril 1915

"Nous partons de Laneuvilleroy en autos à 11 h. Passons par Ravenel, Saint-Just-en-Chaussée, Clermont, Mouy. Là nous devions y séjourner. Contre-ordre, nous continuons jusqu'à Auneuil où, en arrivant, nous trouvons le pays occupé. Ordre de retourner à Mouy où nous sommes de retour à 4 h du matin le 6. Nous nous installons et y restons jusqu'au 13 avril (école)."

 

13 avril 1915

"Nous partons en autos à midi. Passons par Noailles, Beauvais, Grandvilliers, Poix et arrivons à "Molliens-Vidame" (Molliens-Dreuil) près d'Amiens, à 11 h du soir, remplacer un état-major anglais."

 

18 avril 1915

"Nous partons de Molliens-Vidame à 10 h et demie au matin. Passons à Oissy, Cavillon, Picquigny, Vignacourt, Flesselles où nous arrivons à 5 h et demie, à pied (26 km). Couché au château."

 

19 avril 1915

"Nous partons de Flesselles à pied à 7 h du matin, passons à Naours. Entre Naours et Valheureux, les autos nous rattrapent et nous montons dedans. Passons à Valheureux, Beauval, Doullens, Luchuel et Lucheux où nous arrivons à 11 h. A notre arrivée, nous avons été manger des œufs. De la neige presque toute la journée (dans un château)."

 

23 avril 1915

"Nous partons de Lucheux à 10 h et demie à pied : 30 à 32 km. Passons à Ivergny, Beaudricourt (Pas-de-Calais), Estrée-Warmin, Houvin-Houvigneul, Moncheaux, Buneville, Saint-Pol et arrivons à Hernicourt à 8 h du soir. Bien fatigués. Couchés à 9 h (dans une école)."

 

28 avril 1915

"Nous partons de Hernicourt après avoir opéré notre déménagement à 11 h et demie en auto, 70 km. Passons à Wavrans, Monchy-Cayeux, Anvin, Heuchin, Fontaine les Boulans, Westrehem, Auchy-au-Bois, Estrées-Blanche, Thérouanne, Herbelles, Pihem, Saint-Omer, Arques, La Crosse, Bavinchove, Cassel, Ochtezeele,où nous descendons et gagnons Arnéke à pied, où nous arrivons à 6 h et demie (maison particulière)."

 

2 mai 1915

"Départ d'Arneke en auto pour Noordpeene à 10 h, où nous arrivons à 10 h et demie."

 

5 mai 1915

"Départ à pied à 6 h du matin de Noordpeene. Passons à Zuytpeene, Cassel, et arrivons à Terdeghem à 10 h. Restons jusqu'au 7 juillet."

 

6 mai 1915

Longueuil Annel - carte de Marthe Bonnart : "Ma chère Georgina, nous irons tous embrasser notre cher Albert, arriverons samedi 8h45 ; aussi je ne t'en dis pas plus long…"

 

11 mai 1915

Longueuil Annel - carte de Marthe Bonnart : "Ma chère Georgina, nous sommes arrivés sans encombre dans de bonnes conditions. Fernande était au devant de nous à Janville. Marcelle t'écrira demain."

 

5 juin 1915

Il est affecté au 170e d'Infanterie, 2e Compagnie, 4e section, jusqu'au 31 mars 1917. Une photo le représente debout, avec sur le col 170e R.I. :

 

Maurice BONNART, dit Albert, soldat au 170e RI

 

6 juin 1915

Il arrive au front. Le 11 août, il remonte aux tranchées en 1re ligne (combat de Angres, Pas de Calais). Sa mère lui écrit de Longueuil : "Nous allons avoir hâte que tu en sois sorti car on est certainement plus exposé que celles d'arrière. Enfin, espérons que tu en sortiras sain et sauf comme les autres fois, où certes le danger était beaucoup plus grand."

La soirée du 20 au 21 juin, le 1er bataillon rejoint le Régiment à Sains-en-Goelle (Pas de Calais). La 4e Cie rentre dans son bataillon. Les deux officiers du 1er bataillon sont blessés les 11 et 12 juin.

 

21 juin 1915

Carte à sa fille Marcelle à Longueuil Annel : "(...) Tu travailles bien. Continue pour que tu donnes satisfaction à ceux qui t'aiment bien. Nous sommes toujours en réserve et attendons notre relève pour aller prendre un peu de repos. Comme tu dis dans ta lettre, je m'habitue au canon, on se fait à tout. Pourtant ce n'est pas la vie rêvée mais il faut prendre patience en attendant notre retour au foyer familial (…) Reçois de ton papa ses meilleurs baisers qu'il t'envoie des tranchées."

 

23 juin 1915

A Hersin (Nord, sous Béthune) où cantonne tout le Régiment, il envoie une carte à sa "chère petite fille Raymonde" qui est à Saint-Denis, 7 rue des Garibaldiens.

 

28 juin 1915

Il reçoit une carte de son cousin Louis Cuisy, 102e d'artillerie lourde : "(...) A part ça, j'espère que ta main va mieux. De mon côté, tout va bien, nous sommes toujours au repos dans l'Oise. Espérons bientôt en voir la fin, où nous pourrons reprendre la petite partie de manille. En attendant ces beaux jours, mon vieux Albert, je te serre une cordiale poignée de mains."

 

6 juillet 1915

"Embarquement en train, à 10h30, du 1er bataillon".

 

7 juillet 1915

"Départ en auto pour Esquelbecq (Nord), avec le 174e R.I., où nous restons jusqu'au 9 juillet"

 

10 juillet 1915

"Départ pour Poix-de-Picardie (limite dépt. Oise et Somme) en chemin de fer. Restons une journée"

Carte de Mont-Saint-Eloi (Pas-de-Calais à l'ouest de Béthune), non datée, à sa fille Raymonde (carte expédiée le 10 juillet 1915 lors du transport en train via Arras vers Poix-de-Picardie)

 

11 juillet 1915

"Départ pour Sommeilles, Nettancourt (Meuse). Passé à Saint-Denis le 12 juillet à 19 h. Arrivé à Sommeilles le 13 juillet. Passons le 14 juillet sur le quai et, dans la soirée, partons à Givry en Argonne où nous restons jusqu'au 26 juillet."

 

26 juillet 1915

"Départ de Givry en Argonne en camions pour embarquer à Révigny sur Ornain et, par chemin de fer, gagnons Jarville-la-Malgrange (banlieue est de Nancy, Meurthe et Moselle). De là, départ en camion, à Essey les Nancy (nord de Nancy) en traversant Nancy, où nous restons jusqu'au 24 août."

 

24 juillet 1915 au soir

"Départ en camion pour Malzéville où nous restons jusqu'au 3 septembre soir. Allons réembarquer à Jarville-la-Malgrange."

 

3 août 1915 à minuit

"Départ de Jarville-la-Malgrange. Journée du 4 août dans le train. Débarquons dans la nuit. Arrivons le 5 août à 4 h du matin à Lizy-sur-Ourq (école des filles) (15 km au nord-est de Meaux, Seine et Marne)."

 

6 août 1915

"Départ en camions pour Marigny en Orxoy (château) (à côté de Lucy le Bocage)"

 

7 août 1915

"Départ en camion pour Fresnes en Tardenois (château) (8 km au sud de Fère en Tardenois, Aisne)"

 

8 août 1915

"Départ en camion pour Dravegny (12 km à l'est de Fère en Tardenois)"

 

9 août 1915

"Départ à pied pour la ferme Montaon (ferme monastique de Montaon, Dravegny)"

 

11 août 1915

Longueuil - carte postale de Marthe Pestel à son fils Maurice, dit Albert : "C'est donc aujourd'hui que tu remontes aux tranchées de 1e ligne, que nous allons avoir hâte que tu en sois sorti car on est certainement plus exposé que celles d'arrière. Enfin, espérons que tu en sortiras sain et sauf comme les autres fois où certes le danger était beaucoup plus grand. Je t'envoie cette carte qui est une fête de Compiègne (...) Celui qui est sur le côté avec son chapeau de paille on dirait Paul Caron. Où est le temps de ces réjouissements ? On ne pensait pas à pareille horreur alors ! Enfin, espérons toujours que ce sera fini pour l'hiver. Si tu n'es pas à l'abri en ce moment, je te plains car il pleut à seau, quel orage ! D'ailleurs tous les jours c'est à peu près la même chose. Nous sommes envahis de mouches, je ne sais pas à quoi cela tient, peut-être est-ce les soldats à cheval qui nous les amènent."

 

3 septembre 1915

Lacroix Saint Ouen : "Mon Albert chéri - Suis arrivée hier soir ici, j'ai couchée chez tante Aline samedi. Je me demande si j'aurai quelque chose de toi en rentrant à Bois St Jean. Je commence à trouver le temps long. Dans l'espoir que tu es en bonne santé, je t'envoie pour toutes deux, avec ma tante, tous mes plus doux et affectueux baisers. Ta Georgina qui pense bien à toi."

 

Georgina BERNARD - vers 1903

 

12 septembre 1915

carte à son épouse, ce dimanche : "Ma grande chérie - Reçu hier après-midi ta photo. Comme pose, vous êtes très bien, surtout toi ma grande, que tu es bien, Mignonne a la tête un peu trop tournée. A regarder de près, la photo n'est pas bien bonne. Où êtes-vous aller vous faire tirer ? Je suis heureux de t'avoir en grand. Ce n'est pas la photo qui m'intéresse, c'est tes grands yeux, ta belle tête ondulée et ta petite frisette sur le devant qui te va tout à fait bien, et puis ces lèvres où j'ai tant cueilli de doux baisers. Tout cela me fait rêver. Je vois que tu n'as pas maigri et tu te portes bien, c'est le principal. Tu seras toujours aussi jeune, va mon grand loup chéri, et suis heureux plus que jamais du choix que j'ai fait de te prendre comme ma douce compagne de la vie. Encore un dimanche à passer séparés. Si tu voyais où nous allons travailler... Quel joli coup d'œil sur la vallée de l'Aisne avant le lever du soleil ! Embrasse Loulou pour moi et reçois, ma douce chérie, mes plus fous baisers. Ton grand. Maurice Bonnart"

 

15 septembre 1915, 8 h

carte vue du Havre, ce mercredi : "Ma grande chérie - Reçu ta lettre du 12 avec celle de la Française, je renvoie à ce jour la feuille avec les renseignements. Tu aurais pu répondre à ma place. Ils s'y prennent de bonne heure depuis un an. Tu as eu de quoi lire d'un seul coup, c'est tout ou rien. Ici, on parle beaucoup pour le 1er novembre d'un armistice qui précéderait la fin de cette guerre, car les Boches sont comme nous : ils doivent en avoir assez avec ce qu'on leur envoie tous les jours comme obus. Pour le colis, j'avais fait l'adresse à domicile, tu l'as peut être reçu maintenant. Nous avons repris possession des abris de 2e ligne ce matin, nous nous sommes levés à 4 heures et nous sommes ici pour vingt jours, 10 en première, 10 en seconde. On ne parle plus guère de permission, il est vrai que la fuite vaudrait encore mieux, n'est ce pas ton avis, dis, ma Georgina ? Ils ont sans doute de l'occupation à Longueuil-Annel, voilà quelques jours que je n'ai rien reçu, Marcelle doit travailler pour son examen. Dans l'espoir de te lire ce jour, je te prie d'embrasser Loulou pour moi et toi, mon grand loup, reçois mes plus doux et tendres baisers. Ton Chéri. Maurice Bonnart"

 

16 septembre 1915

carte vue du Havre, ce jeudi : "Ma grande chérie - Reçu hier soir ta carte du 13 avec plaisir. Tu me dis que tu as été à la gare, il n'y avait rien, c'est bien aux arrivages petite vitesse qu'il faut aller, ce serait dommage que vos cartes soient perdues. Je t'avais demandé de me retourner la lettre de Melle Guises que je lui réponde. As-tu reçu des nouvelles de Longueuil ? Moi, je n'en ai toujours pas. Le secteur où nous sommes se trouve entre Nouvron et Vic-sur-Aisne. Jusqu'alors c'est assez tranquille nous avons été marmités un peu ce matin mais ce n'est rien auprès de "Quenevières", qu'est ce qu'ils s'envoient de ce côté ! Vivement la fin car tous ici nous en avons assez et n'espérons que la fin. Et ma tante, est-ce qu'elle revient à Saint-Denis ? C'est drôle de ne rien avoir de Roger (nota : celui-ci a été tué au front en mars 1915), j'ai bien peur qu'il ne soit disparu pour tout à fait, car voilà bientôt six mois d'écoulés. Dans l'espoir de te lire, reçois pour Loulou et toi, ma grande mignonne, les plus doux baisers de ton grand chéri. Maurice Bonnart"

 

17 septembre 1915

JMO (Journal de Marche des Opérations) du 170e RI : "cantonnement EM et 1er Bataillon à Montigny Lengrain. Les 1er et 3e Bataillons bivouaqueront dans la journée du 18 aux abords de Rochi, d'où ils partiront sur les lieux de cantonnement prévus : 1er Bataillon 19h itinéraire Vic, La vache Noire. Relève sans incident."

 

18 septembre 1915

"Départ de la ferme Montaon en camions à 6 h du soir. Passons à Dravegny, Cohan, Coulonges, Nesles, Fère-en-Tardenois, Coincy, Rocourt, Latilly, Neuilly Saint Front."

 

19 septembre 1915

"Départ en camions. Passons à Chouy, Corcy, Lonpont, Mongobert."

 

20 septembre 1915

"Départ en camions. Passons à Valsery, Cœuvres, Vic sur Aisne."

 

21 septembre 1915

carte vue du Havre, ce mardi : "Ma chère Georgina - Reçu ce jour ta carte du 19 avec plaisir. Tu ferais bien d'envoyer un mot à Mme Morizot, qu'elle prenne le colis que je t'ai envoyé. Je t'écris à Longueil Annel jusque samedi puisque vous ne quittez que le 28 au matin. Le mardi après, j'attendrai ton adresse. Nous avons fait ce matin une marche manœuvre, nous avons aperçu le château de Pierrefonds et passé à dix kilomètres de Villers-Cotterêts. Nous aurons vu de ces pays ! Bien dommage que nous soyons en guerre. Dans l'attente de te lire, je te prie d'embrasser tous pour moi et reçois de ton grand chéri les plus doux baisers. Maurice Bonnart"

 

23 septembre 1915

"Départ en camions pour les grottes d'Audignicourt, Aisne"

 

2 octobre 1915

carte de M. Morizot : "Cher ami (…) Nous avons vu par communiqué que vous avez fait du bon travail ces jours ci, mais ça devait chauffer et j'espère que tu t'en es bien tiré. Tant qu'à moi, toujours à fabriquer des douilles car vous devez en user (…)"

 

5 octobre 1915

carte vue du Havre, ce mardi : "Ma bien aimée - Reçu ce matin ta carte du 1er. Comment vas-tu faire pour toucher ton allocation, si tu as passé le jour ? Depuis quatre jours, nous subissons un bombardement terrible, nous sommes abrutis par les éclatements des obus de tous calibres et torpilles. Qu'est-ce qu'il y a comme blessés ! C'est inouï. Très peu de tués et beaucoup de la bonne blessure, bras ou jambe. Ça m'étonne pas qu'il y en ait qui deviennent un peu fous. Je ne t'en mets pas plus long aujourd'hui car à chaque instant nous recevons des éclats et pierres que lancent les obus en tombant. Nous sommes obligés de nous terrer dans des trous où l'on ne peut se remuer. Dans l'espoir de te lire demain, reçois pour Loulou et toi, ma Georgina chérie, les plus affectueux et tendres baisers de ton cher Albert. Maurice Bonnart"

 

8 octobre 1915

"Départ en camions pour les grottes de Juvigny, Aisne, jusqu'au 14 matin"

 

10 octobre 1915

carte de sa fille Marcelle, du Bois d'Ageux : "Nous avons été heureux d'apprendre que tu étais ordonnance. Au moins, tu seras moins exposé et tu seras mieux nourri. Je ne voudrais pas laisser passer ton anniversaire sans t'envoyer mes meilleurs vœux de bonheur et de santé, que tu nous reviennes bien vite sain et sauf (...) Nous sommes arrivés au Bois d'Ageux (nota : chez la grand-mère institutrice) hier soir. Il faisait nuit. Je me plais très bien ici, il y a de la place pour jouer dans la cour et dans le jardin. On voit très bien d'ici la route de Verberie : elle passe devant la maison et celle de Ruminay passe derrière (...) J'ai hâte d'être à demain car on recommence l'école à 8 h ½, il est pas trop tôt : j'en ai assez des vacances."

 

12 octobre 1915

mardi : "Ma bien aimée Georgina - Reçu hier ta lettre du 7 et je vois avec plaisir que tu es rentrée dans notre petit nid. Ce que tu dois être contente ! On n'est jamais si bien que chez soi. Nous sommes arrivés hier à 4 heures ici, à Saint Etienne au Temple, après avoir fait nos vingt-cinq kilomètres à pied, et la plupart bien fatigués. Nous logeons sous la tente, dans les bois. Nous ne devons rester ici que deux jours, nous allons réembarquer de nouveau. Pour aller où ? Mystère. On pourra dire que nous aurons traîné nos guêtres ! Pour l'instant, je n'ai besoin de rien. Dès qu'il me faudra quelque chose, je te l'écrirai, ma Georgina. Quelle sale contrée que cette Champagne Pouilleuse ! On y rencontre des villages qu'à de très grandes distances et il y des plaines semées de petits pins rabougris. C'est bien triste, le camp de Châlons ! Dans l'espoir d'avoir de tes nouvelles, je t'envoie pour Loulou et toi ma douce chérie mes plus doux baisers. Maurice Bonnart"

 

14 octobre 1915

"Départ en camions pour Crépy en Laonnois"

Il est en permission 7 jours pour les fêtes de fin d'année 1915 à Saint-Denis.

 

9 janvier 1916

carte d'Eugénie COLLAS, veuve BERNARD :
Le Francport (suite à l'évacuation de Saint-Léger-aux-Bois) : "Ma chère Georgina (BERNARD) (…) J'ai écrit hier à Albert. Oui, je comprends qu'il a dû avoir le cafard en rentrant après avoir goûté aux joies du foyer (…)" veuve BERNARD

 

7 février 1916

carte de Givry-en-Argonne, à sa fille Raymonde : "(…) Tâche de bien manger pour que nous puissions nous promener quand je vais retourner en permission (…)"

 

 

17 février 1916

Saint-Denis, carte de sa fille Raymonde (8 ans) à Maurice, dit Albert : "Mon cher papa, j'ai été contente en recevant ta carte. Maman m'a dit que tu retournais aux tranchées. J'espère que tu nous reviendras bientôt. En attendant, ta petite Raymonde t'embrasse bien fort."

Historique du 170e R.I. (extrait) : "Le 170e est appelé à Verdun le 17 février 1916. Dans la nuit du 28 au 29, il se porte dans le secteur de Vaux devant Damloup."

 

1er et 2 mars 1916

JMO (Journal de Marche des Opérations) du 170e RI : "Sans modification - Continuation des travaux. Bombardement extrêmement violent de nos positions, par des obus de tous calibres, de 7h30 à 18h30. Les Allemands font usage d'obus lacrymogènes. Vers 16 heures, des reconnaissances d'infanterie ennemie sont signalées devant le sous-secteur E. (1er Bataillon)
A 16h35, l'ennemi s'avance par infiltration à E. et à l'O., de la croupe de Hardaumont et le long de la voie ferrée Vaux-Damloup. Des tirs de barrage sont demandés à l'artillerie. Les éléments de 1re ligne prennent sous leurs feux les Allemands qui défilent le long de la voie ferrée.
Prise sous les feux d'artillerie, d'infanterie et de mitrailleuses, l'attaque est arrêtée ; l'ennemi se replie vers l'O., laissant de nombreux cadavres sur le terrain, en particulier des porteurs de mitrailleuses.
A 18h30, calme relatif. Des reconnaissances surveillent les mouvements de l'ennemi.
A 20 heures, un rassemblement signalé à l'O., du carrefour des routes Vaux-Dieppe et Bezonvaux-Damloup, est dispersé par un tir d'artillerie.
Le 1er Bataillon est prêt à intervenir offensivement si l'ennemi cherche à se retrancher à proximité de nos lignes. Le TC bombardé à la ferme de Bellerue va s'installer à la ferme du Cabaret.
En exécution de l'ordre du 20e CA en date du 1er mars,
le 170e RI est relevé du secteur de Vaux dans la nuit du 2 au 3 par le 409e RI. Les premiers éléments du 409e RI arrivent vers minuit. Relève sans incident. Les unités relevées gagnent la caserne CHEVERT. Le Régiment stationne à la caserne CHEVERT jusqu'à 17 heures. A 15 heures, il reçoit l'ordre de se porter en réserve de la 153e DI dans le ravin de Souville.
PC du Colonel aux baraquements.
T.R. : au bois du Chêne GOSSIN (S.O. de Dugny)
Dans la nuit du 2 au 3 mars, le 3e Bataillon et la CMR1, relevés par des unités du 409e RI, sont mis à la disposition du Lt. colonel, cdt. le 174e RI et se portent à proximité de Fleury devant Douaumont. Le 3e Bataillon (cap. ELIOT) et le MR1 (cap. GASSIER) doivent effectuer, de concert avec un bataillon du 174e à 17h45, l'attaque du village de Douaumont.
Objectif du 3e Bataillon : lisière N.E. du village. Point de départ : les tranchées N. de la ferme de Thiaumont
A 18h, les Bataillons d'attaque progressent sous un tir de barrage d'artillerie et un feu de mitrailleuses, s'emparent du village et atteignent leur objectif.
A 18h30, le 3e Bataillon, la CMR1, occupent la lisière N.E. du village, en liaison, à droite avec le 73e RI, à gauche avec le 174e RI. Pendant la nuit, travaux d'organisation."

 

 

3 mars 1916

Historique du 170e R.I. (extrait) : "Le 3 mars 1916, le 170e reçoit l'ordre d'attaquer le village de Douaumont. A 17h45, il part des tranchées Nord de la ferme Thiaumont. Malgré un feu nourri de mitrailleuses et un violent tir de barrage d'artillerie, il occupe à 18h30 son objectif, la lisière N-E du village."

 

3 mars 1916

JMO (Journal de Marche des Opérations) du 174e RI : "Quittent à 14 heures le bois du Chapitre où ils étaient rassemblés depuis 8 heures du matin environ. Ces unités se rendent à la ferme de Thiaumont par un itinéraire qui a été reconnu au préalable par les commandants de Bataillon et les commandants de Compagnie. L'ordre de marche étant le suivant : 1er et 3e Bataillons du 174e et 3e bataillon du 170e RI.
Le Général commandant la 3e Brigade ajoute comme renseignement verbal qu'il y a lieu de s'attendre à une résistance vers la gauche du village, tandis que la droite est soutenue par un fortin situé au S.O. du fort de Douaumont occupé par les nôtres.
Exécution
Le 1er bataillon du régiment, sous le commandement du Chef de Bataillon MAROTTE, est rendu comme il est prescrit à 17 h 45 dans le ravin de la ferme de Thiaumont et part résolument pour l'attaque. Le 3e Bataillon, sous le commandement du Chef de Bataillon GILHMAM, le remplace sans délai dans le ravin de Thiaumont. Le 3e Bataillon se présente peu après, sous le commandement du Capitaine ELIOT, avec mission d'attaquer la partie E. du village tandis que le Bataillon MAROTTE attaquera la partie O. L'artillerie exécute les tirs qui lui ont été prescrits sur le village de Douaumont, et allonge son tir à 18 h 10.
Le 1er Bataillon du 174e pénètre alors dans le village, fouille les maisons en ruines, tue les occupants et s'établit à la lisière nord. Toutefois l'église n'est pas encore prise, elle tient avec des mitrailleuses cachées dans ses ruines. Le commandant MAROTTE est grièvement blessé. Le Capitaine DE MATHAN prend le commandement du Bataillon ; il est 20 h 10.
A 21 h 30, le capitaine ELIOT, commandant le 3e Bataillon du 170e, fait savoir au Lt. Colonel que son Bataillon occupe la lisière nord du village de Douaumont partie O. et qu'il est en liaison avec le 78e d'infanterie qui occupe les maisons S.E. Toutefois le Capitaine ELIOT ajoute que l'effectif qui tient la lisière N. du village est très faible, qu'il y a quelques trous dans les combattants et qu'une ou deux Compagnies de renfort seraient nécessaires pour assurer d'une manière efficace la garde de la partie E. Le Lt. Colonel DUBOIS met à sa disposition la 9e Compagnie du 174e, sous le commandement du sous-lieutenant GRÜN. Ce dernier rend compte peu après que sa Cie est en position dans le village et que tout marche bien.
"

 

 

4 mars 1916

carte postale adressée par un ami à Georgina : "(…) car vous savez, en ce moment l'on se fait plutôt des idées noires (…) Je suis dans la même contrée que votre mari et on ne rigole pas."

 

4 mars 1916

JMO (Journal de Marche des Opérations) du 170e RI : "A 6h30, l'ennemi opérant de front et de flanc attaque le village de Douaumont. La liaison avec le 73e RI ne peut plus être assurée. Les Allemands parviennent à pénétrer dans les maisons S.E. du village. La lutte se poursuit pied à pied. Le Capitaine ELIOT demande des renforts au Colonel commandant le 174e RI. La liaison à gauche n'est plus assurée. L'artillerie ennemie exécute entre le village et la ferme de Thiaumont un violent tir de barrage. Vers 10 h, les Allemands reprennent le village.
A 11 h,
les 1er et 2e Bataillons, CMB1, CMB2, quittent leurs emplacements pour se porter dans le ravin S.O. du village de Fleury devant Douaumont, à la disposition du général DUPLESSIS, commandant la 3e Brigade d'Infanterie.
A 15h30, ces éléments se portent dans la direction de la ferme de Thiaumont, en vue d'exécuter à 17h45 l'attaque du village de Douaumont. A la sortie de Fleury, les Bataillons sont pris sous un violent tir de barrage et progressent lentement.
Les premières factions arrivent à 19 h au chemin d'accès à la batterie annexe de la ferme de Thiaumont (batterie 27 - 28) où se trouve le PC du Colonel. Ce chemin est occupé par des éléments de 7 régiments (33e, 110e, 73e, 143e, 156e, 201e, 174e). Le passage des unités du 170e et leur rassemblement y est très difficile. Les dernières factions ne sont en place qu'à 20 h.
Pendant le rassemblement, des reconnaissances poussées vers le village ne peuvent progresser, la liaison existe à droite avec le 9e Zouaves. La lisière S. du village est battue de front et de flanc par des mitrailleuses ennemies, l'attaque du Régiment ne peut progresser et est suspendue (21 h).
A 23 h30, le Colonel cdt. le 170e reçoit un ordre d'opération de la 3e Brigade pour la journée du 5 mars, prescrivant une nouvelle attaque de Douaumont le 5 mars au matin, en coopération avec les Cies de Zouaves."

 

4 mars 1916

JMO (Journal de Marche des Opérations) du 174e RI : "Les 2 bataillons du 170e RI qui étaient depuis 24 heures en repos à la caserne CHEVERT sont retardés dans leur marche vers Thiaumont par des tirs de barrages effectués à hauteur de Fleury où ils subissent des pertes en hommes et en officiers. Ces unités n'étant pas arrivées à la hauteur de Thiaumont à 17h45, heure désignée pour l'attaque (nota : sur le village de Douaumont), celle-ci est remise à une heure plus tardive par le commandement."

 

 

 

 

Albert BONNART est blessé au Nord-Est de Verdun à Douaumont le 4 mars 1916.
Evacué et hospitalisé le 8 mars 1916 à Crest près de Valence (Drôme) pour blessure : éclat d'obus, plaie à la face supérieure de la cuisse droite. "Blessure de guerre : perforation de la région du tiers inférieur de la cuisse droite par éclats d'obus, cicatrisation, raideur fonctionnelle".

 

 

 

 

Extraits du carnet de Lucien Gissinger, 174e R.I. - semaine du 27 février au 5 mars

Lucien Gissinger était au même endroit qu'Albert en mars 1916. Son récit éclaire encore un peu plus la situation là-bas !

Mobilisé dès la fin de l'année 1914, Lucien Gissinger est envoyé sur le front en juin 1915. Il a à peine 21 ans quand il commence à rédiger son journal de guerre. Affecté au 174e Régiment d'Infanterie, il monte en ligne dans les premiers jours de mars 1916, pour tenter de reprendre aux Allemands le village de Douaumont. Blessé au cours de cette attaque, il sera évacué et soigné à Grenoble. Une fois guéri, il sera affecté à une autre unité avec laquelle il combattra jusqu'à l'Armistice.

27 février 1916

"On attend le ravitaillement pour partir. Déception. Pour apaiser les estomacs affamés, chaque homme reçoit un petit morceau de viande et un quart de café. En 48 heures, nous n'avons perçu que deux demi-repas. Nous allons nous placer dans un bois en avant de nos batteries de 75. À 20h, corvée de pelles jusqu'à Eix, petit village tout proche des premières lignes puis nous regagnons nos emplacements. Ces secteurs se situent au Nord-Est de Verdun, à 12 km d'Etain entre les forts de Tavannes et de Moulainville. Au réveil, nous voyons passer près de nous 13 prisonniers allemands, une patrouille entière, capturée par un groupe de reconnaissance français. Dans l'après-midi, l'ennemi s'est aperçu que nous occupions le bois et nous envoie d'abord quelques obus de 77 qui n'occasionnent aucun dégât ; mais aussitôt après, arrive un 150 qui tombe sur l'abri des agents de liaison. Des râles sortent du gourbi. Il y a trois morts, dont le caporal Bolze de la 15e escouade et 8 blessés dont un très grièvement : le sergent Andreux qui a un poignet presque sectionné. Dans la nuit, corvée de grenades."

29 février 1916

"À 4h, transport de rouleaux de fil de fer barbelé pour une redoute ; au retour nous changeons notre bivouac de place par crainte d'un nouveau bombardement. Le ravitaillement est presque nul, les hommes souffrent de la faim et du manque de sommeil ; beaucoup chiquent du tabac pour tromper leur faim. J'en ai fait l'essai, mais cela n'a réussi qu'à me donner des nausées.
Je ramasse un morceau de viande gelé au pied d'un chêne un jour où le ravitaillement avait dû être excédentaire et le mange de bon cœur. Je remplace, à la 15e escouade, le caporal Bolze tué le 28."

1er mars 1916

"La nuit a été assez tranquille, malgré cela on ne dort guère car il ne fait pas chaud coucher à la belle étoile, aucun abri ne nous protège des intempéries. Le ravitaillement est toujours insuffisant : au lieu d'une demi-boule de pain par homme, il faut faire 11 parts dans une boule entière. Enfin, ce soir, nous percevons le ravitaillement complet, cela change totalement l'humeur des hommes, d'autant plus qu'il est distribué un litre de rhum pour 8 hommes."

Verdun - les troupes en gare

2 mars 1916

"À 4h, relève par le 38e régiment d'infanterie. Nous allons occuper les casernes Chevert à Verdun. Après la soupe de 10h, les casernes sont évacuées en prévision de bombardement ; nous y revenons pour y passer la nuit."

 

 

3 mars 1916

"Alerte à 3h. Départ immédiat jusqu'aux batteries de 75. On craint une attaque allemande et nous sommes en réserve en cas de besoin. Après une heure d'attente, on change de place ; nous allons occuper un bois plus à droite (La Caillette). Ce bois est terriblement mutilé par les obus allemands, des arbres plusieurs fois centenaires sont sectionnés par le milieu, d'autres ont leurs branches hachées par les éclats de mitraille. Nous rencontrons une trentaine de cadavres de chevaux, des caissons éventrés, des corps humains. Au bord du chemin, une jambe seule, puis deux camions déchiquetés. Partout le sol est labouré, défoncé par des entonnoirs immenses, et par-dessus cela une odeur indéfinissable de gaz asphyxiants et de pourriture. La Champagne, pourtant bien terrible en octobre dernier, n'était rien à côté de ceci. À peine installés dans le bois, nous sommes prévenus que le soir même nous attaquerons le village de Douaumont (notre 1er bataillon avec le 3e du 70).

1916 - Douaumont - fort et village

Des hommes brûlent des lettres, d'autres en écrivent. Un aumônier confesse ceux qui le désirent. Á 15h, un peu de ravitaillement nous arrive, sous forme de confitures : 10 kilos pour deux sections ; malheureusement nous n'avons pas le temps de les consommer en totalité car il faut partir et laisser le reste à l'abandon dans le bois. Des obus tombent de-ci de-là, pas de boyau pour s'abriter. Cordival de Chalindrer est blessé : un schrapnel lui a transpercé un pied. Nous progressons ainsi sous bois jusqu'à la redoute de Thiaumont, qui, spectacle affreux, est pleine de cadavres de soldats français. Dix minutes de pause et nous repartons. Notre artillerie pilonne le village de Douaumont.

170e RI

les Hirondelles de la Mort

170e RI - insigne de bras

Enfin, nous arrivons auprès de la ferme de Thiaumont en flammes, c'est de là que doit partir l'attaque. Les unités se reforment et on attend l'heure H. Baïonnette au canon, nous partons au pas gymnastique. Il y a 300 mètres à parcourir en terrain découvert avant d'arriver aux tranchées boches. Leurs mitrailleuses crachent, les balles sifflent, les obus éclatent derrière nous en tir de barrage. De temps en temps, un des nôtres tombe en gémissant. Le caporal Charras est tué d'une balle dans la tête. Le coiffeur de la compagnie, Pelat, a le doigt emporté par une balle. Le but approche, mais nous sommes à bout de souffle, quelques hommes ont abandonné leurs sacs. Quelques secondes à plat ventre permettent de reprendre haleine. La mitrailleuse allemande s'est tue, elle a du être reportée un peu en arrière. On repart. Les Boches de la première ligne jettent leurs armes, lèvent les bras en criant : "Kameraden". Sans pitié, les nôtres les fusillent à bout portant car nous avons reçu l'ordre de ne pas faire de prisonnier. D'après des renseignements fournis par des Allemands capturés dans le nord, notre division volante a été baptisée par eux "les hirondelles de la mort". Nous continuons d'avancer, et entrons prudemment dans les ruines, l'ennemi a fui. Devant moi, un Allemand sans arme sort d'une cave, je lui fais signe de partir vers nos arrières. La progression ralentit, l'avance devient difficile. Enfin, nous sommes stoppés dans un élément de tranchée situé à 40 mètres de l'église que nous n'avons pu prendre. À tout instant, dans la nuit, un hurlement retentit, aussitôt une vive fusillade se déclenche pour s'éteindre quelques minutes plus tard. Mon voisin de gauche, en tirant, envoie une balle dans un tas de grenades posées devant nous sur le parapet, et que l'obscurité nous avait empêché de voir. Violente explosion, le camarade reçoit un éclat dans la figure, je suis indemne. En fouillant dans ma poche de capote pour prendre des cartouches, je m'aperçois qu'au cours de l'attaque, une balle allemande a traversé ma poche et sectionné complètement une cartouche. Une grenade se trouvait également dans cette même poche. Si elle avait été frappée par cette balle, c'était ma fin. À la lueur des fusées, on distingue devant nous un groupe rampant. Au moment de tirer, nous apercevons les brassards à croix rouge, ce sont des brancardiers allemands."

4 mars 1916

"Le jour va paraître. Nous sommes à peu près certains que les Boches vont contre-attaquer pour essayer de reprendre la partie de village que nous occupons. De 5h à 8h, leurs mitrailleuses crachent sans répit, des ombres passent en courant. Devant moi dans un boyau à demi découvert, je vois passer une demi-douzaine de Boches venant prendre position, j'en fusille trois. Á côté de moi, notre chef de section, l'adjudant Cottin, me signale les mouvements qu'il aperçoit et m'encourage quand je fais mouche. Enfin, à 8h, l'attaque se déclenche à notre droite sur le front de la 1re compagnie (Capitaine de Nathan) ; celle-ci cède et recule, nous sommes à découvert et pris de flanc. Si nous ne voulons pas être capturés ou massacrés, il faut suivre le mouvement. On abandonne les sacs, ne conservant que fusils et munitions. Á ce moment, nous ne sommes guère plus qu'une vingtaine pour défendre les dernières maisons, le reste du bataillon s'étant replié jusqu'à la sortie du village. Plus de liaison, plus de cohésion, chaque homme est livré à lui-même et est seul juge de ses actes.
Embusqué à l'angle d'une maison servant de poste de secours, je vois à une dizaine de mètres de moi une mitrailleuse allemande installée à découvert. Le servant à genoux, un lieutenant debout à côté de lui et quelques hommes autour. Belle cible ! Je mets successivement hors de combat l'officier, le servant et un homme, mais bien vite repéré je vide les lieux rapidement et rejoins deux camarades derrière un pan de mur où nous nous embusquons. Nous ne sommes plus que trois à ce moment, tout le monde est replié. Je réussis encore à fusiller à courte distance deux Boches du même coup de fusil, le second étant couvert exactement par son prédécesseur. Cette fois, il faut rejoindre ce qu'il reste du bataillon. Nous, nous trouvons sur une crête dont un versant est balayé par une mitrailleuse tirant des premières lignes allemandes ; et l'autre par une mitrailleuse qui nous arrose depuis le fort de Douaumont (aux mains des Boches).

Je reçois une balle dans le genou gauche, la douleur est si vive que je suis obligé de me coucher. Un instant après, la douleur s'étant un peu apaisée, je me relève et peux encore un peu marcher pour rejoindre mes camarades. Á ce moment, une balle m'atteint à la fesse gauche. Cette fois-ci, c'est suffisant, je me jette dans un trou d'obus et quitte fusil et équipement dans l'attente de ce qui va m'arriver : prisonnier peut-être si l'ennemi continue d'avancer, sinon attendre que la nuit permette aux brancardiers de pouvoir relever les blessés.
9h. Les Boches n'avancent plus. Je constate que ma bande molletière a été coupée par une balle à hauteur de la cheville gauche sans autre dommage. La neige tombe, je perds mon sang et commence à grelotter. Il faut coûte que coûte quitter ces lieux pour aller me faire panser à l'arrière, mais il n'y a ni tranchée ni boyau et il faut se déplacer à découvert. Les mitrailleuses balaient le terrain sans arrêt. Devant moi, un blessé passe en rampant, il est tué d'une balle. Cela ne m'incite guère à sortir de mon trou. Enfin, à la garde de Dieu, je tente ma chance. Un camarade blessé au bras nous crie tout joyeux : "Ça y est les copains, on va aller voir les petites infirmières !". Il avait à peine fini cette phrase qu'une balle lui traverse la tête. Profitant d'une légère accalmie, je m'avance lentement à plat ventre jusqu'à un petit pli de terrain. Aucune balle ne siffle. Je continue ma progression, m'arrêtant de temps en temps pour reposer ma jambe qui me fait beaucoup souffrir. De temps à autre, une balle ricoche dans la terre non loin de moi. Sur mon chemin, les cadavres s'échelonnent, des blessés râlent ; l'un d'eux, atteint d'un éclat d'obus à la tête, a une horrible blessure mettant le cerveau à nu. Après avoir parcouru environ 500 mètres sur le ventre, dans la boue, m'aidant de mes mains et du genou valide, j'arrive au fond d'un vallon (ravin de la Couleuvre).
Á une centaine de mètres, il y a un bois ; là, c'est la délivrance. Je ne serai plus à la vue de l'ennemi et pourrai me déplacer plus aisément. J'arrive au bois, prends un bâton pour me servir de canne et pars à la recherche du poste de secours. Chemin faisant, je rencontre mon ami Girardot qui m'accompagne un moment puis retourne à sa compagnie. J'arrive à un poste de secours, malheureusement pour moi, c'est celui du 153e et, comme j'appartiens au 174e, on ne veut pas me soigner. Les infirmiers m'indiquent l'emplacement de notre poste de secours. Deux fois, je m'égare en chemin. Un obus de fort calibre tombe tout près de moi dans un entonnoir rempli d'eau, je suis copieusement arrosé. Enfin, à midi, j'arrive et suis pansé, non sans douleur car les deux aide-majors qui me soignent (jeunes gens dont les études ont dû être interrompues par la mobilisation) ramonent mes plaies avec des bandes de pansement imbibées de teinture d'iode. Je mords le brancard pour ne pas crier. Je passe une partie de la nuit dans un abri souterrain au fort de Souville."

5 mars 1916

"Vers 3h du matin, je suis emporté sur un brancard jusqu'à Fleury sur Aire où une auto m'emmène à l'ambulance de la 153e division. Second pansement encore douloureux puis vaccination anti-tétanique. Des autos anglaises me conduisent dans un camp de triage constitué par de vastes tentes. Á 8h, départ, toujours en auto pour l'ambulance de Chaumont sur Aire."

 


 

autres témoignages

Dillen, caporal au 35e R.I., rapporte une ruse des Allemands, dont sa compagnie fut victime : "Ma compagnie, à laquelle s'étaient joints des hommes de plusieurs unités, et notamment des zouaves, est restée isolée pendant trois jours vers le haut de la Côte de Talou. Le 27 février, vers 1 heure de l'après-midi, nous voyons venir vers nous, de Samogneux, des zouaves avec une mitrailleuse. Ils sont par petits groupes et sautent de trou en trou. Arrivés assez près de nous, ils se mettent à nous mitrailler. Ce sont des Allemands déguisés en zouaves !"

Louis Brayelle, caporal au 110e R.I., est témoin de l'attaque menée par le 174e R.I. dans les ruines du village de Douaumont, le 3 mars : " (...) Douaumont flambait ; un combat acharné se livrait à quelques centaines de mètres de nous. Obus, grenades, coups de fusil et de mitrailleuses nous assourdissaient; des ombres s'agitaient dans la nuit, éclairées par la lueur des explosions ; des blessés passaient, des commandements retentissaient, des sections de réserve s'avançaient pour entrer dans la fournaise. C'était un spectacle atroce, mais combien émouvant !"

 

18 mars 1916

Albert écrit de Crest à sa petite Raymonde (4, avenue Jean Jaurès à Paris) : "Reçois nos bons et doux baisers; J'espère que tu ne t'ennuies pas de l'absence de ta maman."
Il semble que Georgina soit allé au chevet de son époux blessé, en soin à Crest.

 

 

? mars 1916

Marthe Bonnart : "Mes chères filles, merci de vos vœux et souhaitons qu'ils se réalisent, surtout celui qui me tient le plus au cœur ! Si on savait le jour de votre arrivée, on irait à la gare. Nous aussi entrons en vacances le 1er août. S'il continue à faire si chaud, vous serez bien ici, mes chéries, mais vous n'aurez pas froid pour votre voyage à Saint-Léger : il est vrai que vous pourrez arrêter à Thourotte et partir le matin de bonne heure, il fait moins chaud. Si tu penses me rapporter un litre ou 2... S'il en faut prendre 2 de cognac ou rhum, je te les payerai cette fois, ça ferait plaisir à grand-père. Yvonne et Odette m'ont apporté ce matin 2 jolis bouquets. Elles sont vraiment gentilles ! N'oublie pas ton arithmétique. Votre mère dévouée. J'espère une petite lettre de mon grand chéri aujourd'hui. J'en ai reçu le 24 du 20, il ne disait pas qu'il était remonté à Verdun. Il le connaîtra !"

 

11 mai 1916

De son lit, à Crest, il écrit à sa fille Raymonde sa "chère mignonne", et encore le 7 juin 1916.

 

18 mai 1916

"Mon cher Albert, je te remercie de la carte que tu nous as envoyée, d'abord que tu vas mieux et ensuite que tu rentres à Saint-Denis, ce qui est le mieux de tout. Ce sera la fin de cet affreux cauchemar et pour tes pareils également un gros chagrin de moins. Il faut bien espérer qu'il n'y aura pas de complications à redouter, et c'est dans cet espoir que nous t'envoyons un prompt rétablissement et t'embrassons tous deux, ainsi que grand-mère, de tout cœur. Thourotte vient de recevoir ce soir encore une dizaine d'obus au chantier vers la gare. Tu viendras nous voir quand tu reprendras ton service à l'usine. Ta tante dévouée. Aline BONNART née PESTEL"

 

20 juillet 1916

"Mes chers enfants. A l'heure où vous recevrez cette carte, peut-être notre cher Albert sera-t-il à Saint-Denis. Faites bien tout votre possible pour venir à Bois d'Ageux. Marcelle est toujours à Lacroix jusque dimanche. Papa demande que vous lui rapportiez 2 douzaines de papier à cigarettes, il n'en trouve pas à Verberie. Marthe BONNART"

 

28 juillet 1916

"D'abord, merci de tes souhaits. Nous fêterons la Ste Marthe ensemble et surtout ton retour ! Il n'est plus possible d'obtenir un laisser-passer pour venir, tandis que pour repartir on t'en donnerait sans difficulté. Adresse-toi au commissaire de Saint-Denis. Tu l'auras pour quelques jours peut-être, mais cela n'a pas d'importance puisqu'on t'en donnera un pour le retour, mais sans pièce d'identité : ni le Maire, ni Mme TANGUY n'en veulent délivrer. Donc à lundi, on ne peut vous le refuser et bons baisers. Si vous avez du sucre à volonté, apportez-m'en, je vous le payerai. Ici c'est la guerre pour l'avoir. Marthe BONNART"

 

26 août 1916

Du 26 août au 21 novembre 1916, il est mis en traitement au centre de physiothérapie d'Enghien pour arthrite musculaire cuisse droite.

 

3 janvier 1917

Lacroix-Saint-Ouen - carte d'Eugénie COLLAS, veuve BERNARD, à Georgina BERNARD sa nièce : "Chère Georgina, Réponse à ta lettre qui vient de revenir du Francport. Voilà la chose : Marie est malade d'une forte grippe, donc notre voyage est ajourné. Je suis rentrée en bonne santé. Malgré tout, j'ai aussi un bon rhume. Hier, reçu lettre de papa qui m'a encore fait verser bien des larmes. Le voilà aussi bien malade, le médecin lui conseille d'aller à l'hôpital, mais certainement il ne voudra pas dire comme lui, il faut le sonder (...)"

 

24 février 1917

Le commandant du dépôt du 170e R.I. à Epinal certifie que Maurice Fulbert Arthur BONNART a droit au port du ruban, avec étoile émaillée rouge, constituant l'insigne spécial pour les blessés de guerre, au cours de la Campagne actuelle contre l'Allemagne et ses alliés.

 

26 février 1917

Lacroix-Saint-Ouen - carte d'Eugénie COLLAS, veuve BERNARD, à Georgina BERNARD, sa nièce : "Albert est retourné à son dépôt, peut-être va-t-il obtenir un congé de prolongation ? Au sujet de mon pauvre Roger, rien de nouveau à t'apprendre. Toujours la même question : où peut-il être ? Voilà le froid qui diminue vraiment. Ce n'est pas le rêve pour toi d'aller au charbon. C'est cette maudite guerre qui en est la cause. Nous avons du bois à volonté ; seulement le prix est cher comme dans tout."
Roger BERNARD, son fils, est disparu en mars 1915 dans la Marne.

 

24 février 1917

Le commandant du dépôt du 170e R.I. à Epinal certifie que Maurice Fulbert Arthur BONNART a droit au port du ruban, avec étoile émaillée rouge, constituant l'insigne spécial pour les blessés de guerre, au cours de la campagne actuelle contre l'Allemagne et ses alliés.

 

31 mars 1917

Il est affecté en renfort au 143e d'Infanterie.

 

1917 - Maurice BONNART, dit Albert, soldat en pause familiale

 

26 juin 1917

Le Bois d'Ageux : "Ma chère Georgina, A l'heure où tu recevras ma carte, tu feras probablement les préparatifs de départ. Si tu veux apporter ce que tu as de linge sale, tu le lessiverais ici où la place et le chauffage manquent moins qu'à Saint-Denis. Albert, cher enfant, doit être tout à la joie de son départ, si comme il le pense il part le 29. Si tu avais quelques cartes de mon école de Saint-Léger, tu me ferais plaisir de m'en apporter une ou deux vues, toutes les nôtres étant perdues. N'oubliez pas mes lunettes. Marthe BONNART"

 

11 juillet (1917 ?)

De Noroy-sur-Ourcq : "Nous ne partons pas et restons ici jusqu'à nouvel ordre."

 

30 août 1917

carte militaire, Maurice BONNART 143e R.I., 10e compagnie, 2e section, au Bois d'Ageux : "Ma chère Marcelle, J'ai reçu votre lettre contenant de la sténo de Mimi et la carte de Raymonde à qui je répondrai quand nous serons en pays reconquis. Je pense que lorsque tu recevras cette carte, votre maman sera parmi vous. Pour le cas où elle serait repartie, renvoyez-lui la lettre que je lui ai écrite ce matin à Saint-Denis. Si grand-mère se sert toujours de l'encre violette, envoyez-moi un peu de poudre dans une lettre, très peu pour en faire une toute petite bouteille. Je suis toujours en bonne santé et espère que vous êtes de même. Dans l'attente de vous lire, embrasse tous pour moi et toi, ma grande chérie, reçois les bons et affectueux baisers de ton papa qui pense à vous."

 

13 septembre 1917

carte militaire, Maurice BONNART à Marcelle : "Ma grande chérie, j'ai reçu ta carte du 7 avant-hier et t'en remercie. Ici le temps nous semble si long dans nos trous que les lettres et cartes sont toujours pour nous un réconfort de savoir qu'on est pas tout à fait retranché du reste du monde civilisé (...) Nous verrons peut-être cousine Florence si nous allons à Saint-Léger le mois prochain. Ce que j'ai hâte de vous revoir tous, et toi, ma grande fille chérie, grandis encore (...)"

 

23 novembre 1917

Bois d'Ageux : "Mon fils bien aimé, tes gentilles lettres de dimanche et mardi nous ont fait bien plaisir. Nous souhaiterions que tu restasses là longtemps. Tu as la chance d'avoir des nouvelles de ta tante, je n'ai rien eu d'elle depuis sa permission. J'ignore si mes ruines sont revenues de Saint-Léger, comme je n'ai pas de nouvelles de personne de là. Vraiment, que prétend la mère d'Eugénie pour leur faire faire mauvais ménage ? A quoi aboutira-t-elle, à une désunion ? Elle serait bien avancée, avec 2 enfants. Et puis, quelle vie gâchée ! S'il a le tort de trop dépenser, c'est fort probablement ce motif qui a amené ses trop vives remontrances. Elle ne doit pas toujours être bonne non plus, cette femme-là. Eugénie aurait bien mieux fait de rester chez elle avec ses deux enfants et d'y chercher une occupation. Elle qui n'est pas sotte se serait tirée d'affaires. Après tout, qu'ils se débrouillent. J'ai supposé que tu écrirais à ton père : aujourd'hui 65e anniversaire. Que nous voilà vieux et besoin fait ville trotter. En ce moment, à part ma classe et ma leçon, je ne fais pas grand chose d'autre. Le jardin se repose. Marthe BONNART"

 

1917 - Maurice BONNART, 143e, en convalescence

 

20 décembre 1917

Eugénie COLLAS veuve BERNARD, la mère des 2 frères disparus, écrit de Saint-Léger-aux-Bois : "Mon cher Albert, C'est par un temps bien froid que je t'écris. Nous te remercions de ta carte pour l'anniversaire, nous pensons tous les jours à toi. Nous pensons combien il a froid, nous avons de la neige. Voilà déjà la petite classe quelle s'en va, il y a n'a 500 de parti aujourd'hui, bien heureux que nous avons un bon feu comme ça il ne fait pas chaud à lever, enfin il y a que ça à faire en ce moment. Nous avons pas encore touché notre allocation. Je ne sais pas si nous la toucherons, ça fait 2 mois. Ton père, ta mère et moi, je te dis de prendre courage. Nous t'embrassons tous déjà." E BERNARD

 

21 janvier 1918

Saint-Denis : "Mon cher Albert, Rien encore, je pensais pourtant bien avoir quelque chose aujourd'hui. Ce matin, je croyais que tu allais arriver, aussi j'ai été désappointée. Où es-tu ?? Reçu un mot d'Amélie hier, elle devait venir mais a travaillé, je viens de lui répondre et lui donne de tes nouvelles. J'ai piqué à la machine toute l'après-midi, je crois que je dormirai bien. Hier j'ai été à l'hôpital, nous étions revenus à 4 h. Et toi, mon grand, es-tu encore au D.D. ? Je me le demande. Dans l'espoir de te lire ce soir, je t'envoie pour toutes trois mes plus doux baisers. Ta G. (Georgina) qui pense à toi et t'embrasse."

 

30 janvier 1918

Saint-Denis : "Mon cher Albert, Rien eu ce matin. Peut-être ce soir. Je pensais que tu serais arrivé aujourd'hui, mais voilà 4 heures et comme tu devais arriver dans la matinée...Encore quelques jours de patience. Il y avait du brouillard ce matin, pas très chaud, le soleil à midi était bon. Tu sais, c'est la ration c'est fois pour Marcelle. Espérant que tu es en bonne santé, nous t'envoyons toutes trois nos meilleurs et affectueux baisers. Ta G. qui t'embrasse bien fort et t'attend avec impatience."

 

14 avril 1918

carte de Maurice BONNART à son épouse, ce dimanche : "Ma grande chérie, C'est avec plaisir que j'ai reçu la carte-lettre du 10 où j'y vois que tu te plais à ton nouveau métier. Ecoute bien les conseils que Nini te donnera et à tes loisirs ne reste pas à rien faire, exerce-toi à faire de la ronde et perfectionner ton écriture pour que, dès qu'il y aura une place de libre, tu puisses la remplir au gré de tes chefs. Nous avons voyagé à la hâte hier en auto par temps gris et une poussière est quelques chose. Aujourd'hui, il fait temps comme au mois de novembre tellement il fait froid. C'est bien malheureux pour ceux qui se battent. Espérant que ma carte te trouvera en bonne santé et dans l'attente de vous lire, embrasse maman et Chouchou pour moi et toi, ma grande chérie, je t'embrasse de tout cœur. M B."

 

8 juillet 1918

"(...) Emile pourra dire qu'il a souffert, encore une opération. Donne-lui les cigarettes que je lui ai envoyées aussitôt arrivées. Au plaisir de te lire demain peut-être. Embrasse bien nos chéries pour moi et toi, mon amour de Ginette, reçois les plus doux baisers de ton grand trésor, à toi mon cœur avec mes chères pensées. Maurice Bonnart"

 

5 janvier 1919

carte de Maurice BONNART à sa fille Marcelle : "Je reçois en arrivant ici ta carte et te remercie de tes bons souhaits en te priant d'accepter les miens en retour. Il faut bien espérer qu'elle sera meilleure pour nous tous que celle qui vient de finir et que bientôt j'aurai la joie d'être près de vous définitivement, enfin (...) M.B."

 

Maurice BONNART est libéré le 21 février 1919 au dépôt démobilisateur de Saint-Denis. Il est renvoyé dans ses foyers, titulaire de 2 carnets de pécule (arrêté le 21 février 1919) et dont le montant s'élève à la somme de 145 francs. (fait à Saint-Denis)

 

 

de Saint-Léger-aux-Bois à La Chanvrière (1789-1799)
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