Notice sur St-Léger-les-uthie
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tiré de "Histoire d'Authie, de son prieuré conventionnel et de son château féodal,
suivi d'une Notice sur St-Léger-les-Authie"
par l'abbé Danicourt - 1885

 

Cette Notice contient un instructif plan de St Léger de l'époque (1885). 
Vous pouvez le consulter en cliquant ici

Sauf mention particulière, toutes les photos datent d'août 2005.

 

 

Moeurs - Coutumes - sages

(...) "Situé loin des villes, et caché pour ainsi dire dans une vallée profonde, le village de Saint-Léger a conservé pendant longtemps l'esprit religieux et la simplicité des mœurs ; mais en ces dernières années, les goûts et les idées modernes y ont pénétré comme partout ailleurs, de sorte que s'il est changé au point de vue physique, depuis un siècle, il l'est également au point de vue moral depuis 20 ans.

A une époque de transformation sociale comme celle du XIXe siècle, il importe de rappeler, en passant, certaines coutumes, certains usages qui disparaissent ou tendent à disparaître de jour en jour.

 

 

Un usage remontant à une très haute antiquité et aboli presque partout a été conservé jusqu'ici à Saint-Léger : c'est la fête des brandons*.

* De l'Anglo-Saxon ou de l'Allemand brand qui signifie feu, tison

Authie a eu sa fête des brandons de temps immémorial jusqu'à la fin du siècle dernier; nous l'avons vu dans bon nombre de procès et de dénombrements ; mais elle y est complètement abolie depuis longtemps, tandis que les villages de Saint-Léger, Couin, Coigneux la célèbrent encore avec un enthousiasme caractéristique.

Voici en quoi elle consiste : le premier dimanche de carême, les jeunes gens fabriquent d'énormes et longues torches en paille qu'ils enroulent autour d'une perche ; puis, les ayant allumées par une des extrémités, ils les portent en guise de flambeaux en marchant le long des haies, sur les coteaux, en dansant autour des pommiers. Dans bon nombre de localités, ces manifestations du 1er dimanche de carême étaient appelées Béhourdis, à St-Léger on appelle cela aller bordir. Des auteurs prétendent que cet usage est une réminiscence des fêtes païennes en l'honneur de Cérès ou du dieu Pomone : quoiqu'il en soit, il fait partie ici des réjouissances qui précèdent le carême chrétien, le dimanche gras.

Le jour du mardi-gras, les hommes ou jeunes gens qui promènent un mannequin dans les rues pour demander l'aumône ou recueillir quelques pièces de monnaie, etc, emploient, dans le refrain qu'ils débitent aux portes des maisons, l'expression au gui nel. Au gui nel, au gui neuf, pour au gui l'an neuf remonte au temps où les Gaulois nos ancêtres partaient à la recherche du gui sacré. Cette cérémonie marquant chez eux le commencement de l'année religieuse et civile, l'expression au gui nel se confondit par la suite avec celle des vœux de bonne année et fut employée pour demander les étrennes, faire appel à la générosité...

Le jour des Rameaux, chacun allait autrefois, après l'office, planter le buis bénit sur la tombe de ses parents, dans les champs de blé en herbe. Cette pratique tend aussi à disparaître.

Une coutume qui rappelle le Cloqueman* s'est maintenue jusqu'en ces derniers temps.

* Cloque-man, homme de la cloche. Dans la ville de Ham, pendant des siècles, le cloqueman remplissait cet office le jour du vendredi saint. A Péronne, il y avait le réveilleur toutes les nuits.

De même que dans certaines localités, le jour du vendredi saint, un homme parcourait les rues avec une cloche ou un autre instrument bruyant, et recommandait aux prières des fidèles l'âme de défunt N.-S.-J.-C. ; de même que, dans d'autres pays, toutes les nuits passait le réveilleur qui recommandait les trépassés, au village de St-Léger, dans la nuit du jeudi au vendredi saint, les enfants de chœur, après avoir veillé au sépulcre ou reposoir en compagnie d'autres personnes, quittaient l'église vers minuit, parcouraient les rues et réveillaient les habitants en les engageant à venir prier au tombeau de N.-S.-J.-C.

Le jour de Pâques, jusques il y a 15 ans, le clerc laïque ou instituteur se présentait dans toutes les habitations du village et offrait une grande hostie ou grand pain d'autel : le maître ou la maîtresse de maison la fixait à la potière ou étagère, ou bien à quelque endroit apparent de la pièce principale. Cet usage qui a une origine essentiellement chrétienne rappelait la Pâques des Israélites : de même qu'au jour de Pâques, c'est-à-dire au passage du Seigneur, toutes les familles qui voulaient être épargnées par l'Ange exterminateur devaient marquer la porte de leur maison du sang de l'agneau ; de même la sainte hostie qui devient l'Agneau immolé par la Consécration et la vraie Pâques par la communion sacramentelle, rappelait aux chrétiens le grand préservatif de la Loi Nouvelle, et était une bénédiction pour le toit domestique.

 

 

Un usage traditionnel consiste à planter des mais : bien qu'il tende à disparaître, il existe encore.

Dans la nuit qui précède le 1er dimanche de Mai, les jeunes gens vont dans les bois couper des arbrisseaux, souvent même des arbres entiers qu'ils plantent, chacun en face de la maison de sa fiancée ; l'arbre préféré est toujours le bouleau à la blanche écorce, aux rameaux gracieux.

Ceux qui en plantent par mépris, par dérision ou par vengeance, emploient le sureau à l'odeur désagréable.

Les lieux de pèlerinage les plus fréquentés par les habitants de St-Léger ont été jusqu'ici : les' chapelles de St-Pierre dans le cimetière de Couin, de Notre-Dame de bonne Foi à Coigneux, et de Notre-Dame de Brebières à Albert.

Les marchés les plus suivis sont, pour les céréales et les graines grasses : Arras, Doullens, Albert et Pas ; pour les bestiaux : Mailly, Pas et Doullens.

Les foires où ils se rendent habituellement sont celles de St-Simon à Albert, de St-Michel et de St-Martin à Doullens, de St-Jean à Amiens et de la St-Jean à Bus.

La fête banale est fixée au deuxième dimanche d'octobre depuis des siècles ; elle est commandée par le patron qui tombe le 2 du même mois.

Comme elle est amoindrie par la coïncidence de celle d'Authie, remise au même dimanche depuis le grand incendie de 1803, les habitants prennent leur revanche 15 jours après dans ce qu'ils appellent le rebond, la plus grande de toutes Ies réjouissances profanes du pays.

Les principaux divertissements du pays sont : le jeu de paume ou de tamis, le jeu de ballon, le jeu de quilles. A une époque, les Belges introduisirent le jeu de la cholle ou de crosse : il consistait à lancer une petite boule en bois dur à l'aide d'une crosse également en bois, armée d'une pointe de fer en forme de pied de biche.

 

[le ballon au poing]

 

le jeu des javelots

 

 

 

Il y a toujours les jeux de cartes dans les cafés et enfin la danse pour la jeunesse des deux sexes, mais celle-ci est bien moins fréquente qu'à Authie.

 

 

Plan - ues - Lieux-dits

[plan ]

Le plan de St-Léger que nous donnons au commencement de cette Notice a été calqué sur le plan de la Mairie exécuté par un géomètre expert. C'est après l'avoir complété par l'addition des habitations nouvelles et l'avoir fait réduire par l'appareil photographique, afin d'en conserver les proportions exactes, que nous l'avons confié au graveur.

La principale rue, connue sous le nom de Grand'Rue, n'est autre que la route de Marieux à Souastre, traversant la plus grande partie du village.

Elle est coupée à angle droit par la rue de la Carrière qui descend du calvaire vers la rivière, pour prendre ensuite le nom de rue de l'Eglise.

Celle-ci, à partir de la grande ferme, porte le nom de rue des Jovelets jusqu'au pied de la montagne ; puis elle s'appelle rue des Prêtres jusqu'au marais où elle devient le chemin des Prêtres.

 

A Couin, village voisin, un monument à la mémoire des animaux "morts à la guerre"

 

Vers l'extrémité de la rue des Prêtres, en face du chemin de Douai*, descend la ruelle du Pati ou du Pâturage ; autrefois, elle était continuée par la ruelle Brédaine jusqu'à la grand'rue. Cette dernière ruelle est remplacée par un égout.

* Ce nom lui fut donné à la suite d'un fait qui s'est passé dans la ville de Douai et dont les auteurs étaient de St-Léger.

La rue haute ou rue de haut prend naissance en face de la maison d'école, dans la rue de la Carrière, pour descendre ensuite vers la grand'rue.

Quant aux lieux-dits nous en marquons plusieurs sur notre plan, tels que : le Château ou ancien Château, le Bosquet du Château, le Guet où les gens du seigneur allaient en observation pour prévenir l'arrivée des ennemis, des bandes de brigands, etc ; la Porte Rouge ; les Gauguez ou Noyers séculaires, contemporains de l'ancien château, abattus en 1860. La verte vieillesse qu'ils portaient encore à celle époque n'eût pas résisté à l'hiver de 1879 à 1880 qui en a tant fait périr. Ils sont une preuve que, depuis plus d'un siècle, depuis au moins 1709, il n'a pas gelé avec autant d'intensité que cette année-là.

La Fontaine, située à 60 mètres environ de l'église, est une des principales sources de l'Authie : les nombreux jets d'eau que l'on voit sourdre dans son lit circulaire lui mériteraient à bon droit les noms de fontaine bouillante ou de fervaques* que l'on a donnés en certaines localités...

* Fervaques, ferventes aquae, eau bouillante : les jets d'eau produisent absolument les mêmes effets que l'eau bouillante. C'était bien plus sensible, il y a 25 ans, avant que cette fontaine ne soit comblée. Comme elle était devenue à sec en 1858, on y creusa et l'on trouva à une profondeur de 12 pieds de grandes marches en grès ; puis un encadrement en grès énormes, formant une sorte de chaise de puits ; un pieux en chêne calciné, etc.

 

 

Le Flot ou mare proche de la grande ferme ; la Manderrie ou Maladrerie ; la Nocterie sise derrière le groupe d'habitations que l'on voit, sur notre plan, en face du portail de l'église ; l'ancien moulin Caron ; l'ancienne houblonnière ; l'emplacement de l'Arbre de la Liberté de 1848 ; le pré Gauguez ou pré aux noyers, qui y croissaient en grand nombre ; la Vallée de St-Martin à cause du couvent ou de la ferme de ce nom ; le chemin de St-Pierre qui mène à la chapelle dédiée à ce saint ; le pont du Radeau, attendu que cette passerelle était composée de deux madriers juxtaposés et plongeant dans l'eau toutes les fois que celle-ci grossissait un peu. Nous l'avons vu écrit aussi rat d'eau.

Si, de la vallée, nous montons dans la plaine nous avons au Midi la Folie ; à côté, le Chapitre ainsi dénommé parce que ce canton était la propriété du Chapitre d'Amiens ou de l'Université des Chapelains. Plus haut, au Sud-Est, on aperçoit le Bosquet Moroy ou Monroy : auprès de ce bosquet, M. Guislain comte de Louvencourt, qui avait le droit exclusif de chasse sur le terroir, fit bâtir une tour carrée, il y a une vingtaine d'années, partie en briques, partie en bois, pour surveiller les chasseurs et surprendre les braconniers. Lors de la guerre de 1870, des uhlans, venant de Bus vers St-Léger, aperçurent cette tour et rebroussèrent chemin bride abattue : elle préserva donc les habitants de St-Léger d'une visite plus que désagréable. L'ouragan du 12 Mars 1876 la jeta par terre ; elle ne fut pas relevée de ses ruines. Du haut de cet édifice, on avait le plus beau point d'observation de toute la contrée.

 

 

Les autres lieux-dits de la même plaine sont: le Casse-cou, ainsi nommé à cause des cailloux énormes que l'on y rencontrait autrefois ; le Moulin, auprès du chemin conduisant à Bus, à 600 mètres environ du village : c'est l'emplacement de l'ancien moulin de la famille Bury. Puis vient le Champ croisette en descendant vers le Warnimont : il doit son nom à tout un canton de la plaine et rappelle la vengeance d'un laboureur qui, après la récolte de son blé, fit, par une belle nuit, des croisettes, en sillonnant en tous sens avec une charrue son champ ensemencé de trèfle (sans autorisation) par le fermier qui devait lui succéder dans l'exploitation de son marché de terre.

Un peu plus bas c'est le Cerisier : non loin de l'arbre de cette espèce, l'on apercevait en ces dernières années le hêtre le plus beau de toute la région. Le diamètre, l'élévation et la rectitude de son tronc, l'immense étendue et la parfaite régularité de ses rameaux, en faisaient une merveille. Les touristes venaient de très loin pour l'admirer. Une trombe suscitée par un violent orage en Juin 1875 le déracina complètement.

De l'autre côté du village, nous signalerons les grands larris, le long du bois de Laleau ; la Valéïette ou Valéette, petite vallée qui fait suite à celle de St-Martin ; le Héron ainsi nommé à cause des oiseaux de cette espèce qu'on y voit de temps à autre.

Les Attaques désignent la partie haute de la plaine qui s'étend entre St-Léger et Pas : la tradition veut qu'il y ait eu un combat dans celle belle plaine. Il n'y a rien d'étonnant en cela, surtout quand on sait que les Anglais, les Espagnols, les Allemands, les Hauts-Alliés, les Français ont campé dans le voisinage et peut-être en ce lieu à diverses époques.

En allant des Attaques dans la direction de l'Est, on rencontre la Motte Hérenguère ou Haranguière. Si c'est la première acception que l'on doit admettre, cette expression a une origine qui remonte aux temps de la féodalité : heri ou here* angariae, redevances en nature que l'on payait au seigneur du lieu ou au Maître du Temple dont la ferme était voisine (ce qu'on appelait le Couvent de St-Martin).

* Here, expression celtique qui signifie maître, chef, seigneur - Heri, du latin herus, maître, possesseur

La motte hérenguière aurait dans ce cas désigné la ferme seigneuriale ou grange dans laquelle on aurait transporté le terrage ou champart, de même que l'on conduisait les produits de la dîme dans les 4 granges dîmeresses situées à divers points du territoire d'Authie.

S'il faut préférer la 2e acception, Haranguière serait pour Parangariae, expression qui veut dire poste pour les transports, centre de ravitaillement pour les troupes : ce lieu étant situé près du chemin d'Authie à Hénu, entre la Picardie et l'Artois, il n'est pas étonnant que, dans les nombreuses guerres qui ont ravagé la contrée, on y ait établi un centre de ravitaillement pour les troupes campées aux environs." 

 

 

Notice sur St-Léger-les-Authie - 1885

Le nom du village
St-Léger, autrefois et aujourd'hui
L'ancien château

Les Fermes du Roi à St-Léger
L'ancienne église et la moderne
La commune

Les coutumes
Les rues et les lieux-dits

 

 

erci de fermer l'agrandissement sino

 

 

 

 

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