la guerre vue par deux grands écrivains
l'un français, l'autre allemand

 

le Français Maurice Genevoix
en février 1915

l'Allemand
Erich Maria Remarque

Maurice Genevoix (1890-1980), à l'époque instituteur, est grièvement blessé de 3 balles en 1915. Il est soigné 7 mois durant et perd l'usage de la main gauche.

L'auteur, qui s'exprime à la première personne, est officier *.
Après une longue marche, il approche avec les hommes qu'il commande de l'endroit où la bataille fait rage.

Erich Maria Remarque (1898-1970), élève instituteur allemand, est incorporé dans l'armée en 1916 et blessé en juillet 1917 par des éclats de grenade au cou et aux membres.

Son livre "À l'Ouest, rien de nouveau", roman pacifiste sur la 1re guerre mondiale, connut, dès sa parution en 1929, un succès mondial. Il sera brûlé par les Nazis en 1933. Remarque quittera alors l'Allemagne.

"Tu entends ?
- Quoi donc ?
- La fusillade.
- Non !"
Comment est-ce possible qu'il ne l'entende pas ? À présent, je suis sûr de ne pas me tromper. Cette espèce de pétillement très faible et qui pourtant me pique les oreilles sans interruption, c'est la bataille acharnée vers laquelle nous marchons, et qui halète là, de l'autre côté de cette crête que nous allons franchir. Allons-y, dépêchons-nous. Il faut que nous nous y lancions, tout de suite, en plein tumulte, parmi les balles qui filent raide et frappent. C'est nécessaire [...]
Derrière nous, nos hommes marchent ; chaque pas qu'ils font les rapproche de ce coin de terre où l'on meurt aujourd'hui, et ils marchent. Ils vont entrer là-dedans, chacun avec son corps vivant ; et ce corps soulevé de terreur agira, fera les gestes de la bataille ; les yeux viseront, le doigt appuiera sur la détente du Lebel ** ; et cela durera aussi longtemps qu'il sera nécessaire, malgré les balles obstinées qui sifflent, miaulent, claquent sans arrêt, malgré l'affreux bruit mat qu'elles font lorsqu'elles frappent et s'enfoncent [...]
Et ils auront peur, c'est certain, c'est fatal ; mais ayant peur, ils resteront !"

Maurice Genevoix
"Sous Verdun" dans "Ceux de 14" (1916)

* Un officier se distingue des soldats du rang. Il a un pouvoir de commandement.
** fusil qui équipait l'infanterie française depuis 1886

la mort aveugle et industrielle

"Sur nous plane le hasard ... C'est par hasard que je reste en vie comme c'est par hasard que je puis être touché.

Le bombardement ne diminue pas. Il s'étend aussi derrière nous. Partout où la vue peut atteindre jaillissent des jets de boue et de fer. L'artillerie couvre ainsi une zone très vaste.

L'attaque ne se produit pas, mais le bombardement se maintient. Peu à peu nous devenons sourds. Personne ne parle plus ; d'ailleurs on ne pourrait pas se comprendre.

Notre tranchée est presque détruite. En beaucoup d'endroits, elle n'a plus 50 centimètres de haut ; elle est criblée de trous, entonnoirs et montagnes de terre. Droit devant notre galerie éclate un obus. Aussitôt, c'est l'obscurité complète. Nous sommes enfouis sous la terre et il faut que nous nous dégagions."

Erich Maria Remarque
"À l'Ouest, rien de nouveau" (1928)

 

 

 

 

 

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