Aristide Lemoine raconte... Pour que
ne renaisse
|
J'ai pris le train à
Valenciennes jusque Witten où j'ai été
affecté dans une usine d'aiguillage. Au bout de quelques
semaines, j'ai commencé à inciter mes camarades
à ralentir au maximum la production. C'est là qu'a
commencé le calvaire... En février 43, j'ai
été transféré dans une usine Messerchmitt
dépendante du camp de Dachau. A la fin de l'année
1944, j'ai été emmené au camp de Leonberg
jusqu'au début de l'année 45. Au mois d'avril de cette
même année, l'avance des alliés contraignit les
allemands à nous évacuer. Le 27 avril, alors que nous
étions rassemblés dans une petite vallée, nous
avons vu au sommet d'une colline une chenillette
américaine... Une immense clameur s'est
alors élevée du groupe : NOUS ÉTIONS LIBRES
! J'ai traversé
l'Allemagne et l'Est de la France, je suis arrivé à
Cambrai où j'ai pris le train jusqu'à la gare de Trith
où personne ne m'a reconnu... Aujourd'hui, ce que je
souhaite de tout mon coeur, c'est que le calvaire que j'ai
vécu, empêche les générations futures de
se laisser entraîner par des idéologies
extrémistes de haine envers les autres
peuples... Tiré
de "Trith St Léger, notre commune de 1170 à nos
jours"
J'avais été embauché quelques années
auparavant à la société Métal-Escaut
où j'occupais un poste au laminoir.
Une première fois, en 1942, j'ai refusé de partir en
Allemagne travailler dans le cadre du Service du travail obligatoire,
pour le compte de la machine de guerre hitlérienne, et puis au
mois de novembre, faisant confiance à la direction de mon
usine qui m'avait assuré qu'elle ne laisserait pas partir ses
ouvriers, je me suis présenté au boulevard Saly
à Valenciennes (STO) avec trois de mes camarades.
A partir de là, tout a été très
vite.
Afin de mobiliser le maximum de soldats, les nazis avaient eu
l'idée de faire tourner leurs usines avec des ouvriers venus
de toute l'Europe occupée.
La journée de travail commençait à 6 heures pour
se terminer à 18 heures.
En janvier 1943, j'ai envoyé une lettre au directeur de
l'usine en lui faisant part de nos revendications.
Quelques jours après, nous nous mettions en grève.
Le lendemain, j'ai vu surgir dans l'immense dortoir où nous
étions vingt gestapos armés.
Ils m'ont emmené avec quatre autres de mes camarades.
J'ai tout d'abord été jeté en prison à
Bochum où j'ai survécu pendant 18 jours.
Puis, sans être jugé, la gestapo m'a emmené
à Welwelsbourg dans un camp dépendant de
Buchenwald.
Les conditions de vie étaient épouvantables : notre
ration quotidienne de nourriture était de 200 grammes de pain
plus une "soupe" de rutabaga.
A longueur de journée, j'ai cassé des pierres.
Nous étions surveillés par des "droits communs". Les
grands industriels allemands avaient de la main-d'oeuvre à bon
marché.
Nous avons marché pendant cinq jours, les gars tombaient
exténués...
Forcément, je ne faisais plus que 42 kilos, j'avais le
crâne rasé et je portais encore l'habit rayé de
prisonnier.
Service d'Information de la ville de Trith St Léger /
1988