Les
occupants allemands implantent un grand camp de munitions
dépendant de l'armée de l'air allemande "Luftwaffe" au
sud du village, ce qui interdit la route du Puits d'Orléans,
la route de Montmacq et le chemin des Plainards. Le long des voies
d'accès sont creusés de nombreux merlots qui abritent
séparément des explosifs.
style de
baraquement
Ces explosifs arrivent par train
à la gare de Ribécourt puis sont transportés en
camions dans le dépôt de la forêt de Laigue
à Saint-Léger-aux-Bois. A l'occasion d'un convoi, un
jeune du village, Jean-Claude LEGUEBELLE, sera victime d'un accident
lors d'une manuvre d'un camion, il décèdera, au
grand désespoir du conducteur accablé.
Dans le camp travaillent des
prisonniers principalement nord-africains, issus de régiments
de soldats marocains, qui y sont enfermés au cur du
village, auxquels viendront s'ajouter plus tard des travailleurs
requis pour le S.T.O. (service du travail obligatoire). Ces
derniers seront logés chez les habitants de la commune.
Ainsi Raymonde PROTIN (dont le mari soldat est prisonnier en
Allemagne), domiciliée près du camp de prisonniers,
hébergera un jeune homme requis, Marcel FAGE,
le fils des
épiciers du GOULET-TURPIN (entreprise française de
commerce aujourd'hui disparue) de Rantigny.
photo prise lors d'une visite des
parents de Marcel FAGE (1920-2011), pantalon clair au 1er plan, chez
sa logeuse

Le camp de prisonniers marocains, qui
s'étend jusqu'à la place de la Liberté, actuelle
salle des sports, se compose de 3 longs bâtiments :
2 sont perpendiculaires à la route des Etangs ;
l'entrée est face au n°3 (la charcuterie de M. Gaston
CLÉMENT), entre la grange de M. NARDIN et la maison de briques
et de pierres de l'ancienne fabrique de balle à jouer
BERNARD.
Le 3e bâtiment est orienté perpendiculairement à
la Grande Rue, face à la mairie (en bas à droite sur le
plan ci-dessous).

Arlette PROTIN dans son jardin -
au fond, à
gauche, le camp de
prisonniers avec entrée sur la rue des Etangs..
Il a pu y avoir jusqu'à 600
prisonniers, arrivés de Ribécourt par le pont suspendu
de l'exploitation de glaise SAMAIN, à côté des
étangs. Ce
sont eux qui ont édifié leur camp, clôturé
de barbelés.
Les prisonniers sortent tous les
jours du camp, au centre du village, sous bonne garde des soldats
allemands, pour remonter la Grande Rue vers le sud jusqu'au
dépôt de munitions, dont l'entrée principale
barre la route du Puits d'Orléans à l'orée de la
forêt de Laigue.
Leur détention se fait
apparemment dans des conditions assez humaines, mais ils manquent
souvent d'eau. Les militaires allemands qui gardent le camp sont pour
la plupart des vétérans, certains ayant pu
connaître le premier conflit mondial. Aussi n'ont-ils pas
d'attitudes fanatiques.
La Kommandantur occupe le bâtiment principal de l'ancienne
fabrique de balles à jouer, rue des Etangs, à
proximité du camp. Les soldats allemands sont nombreux
à être logés dans le bâtiment en face.
Certains qui logent chez l'habitant arborent néanmoins des
portraits d'Adolphe HITLER.
Il y eut cependant beaucoup
d'évasions ou de tentatives mais, du second étage du
"Chalet Gabriel", les Allemands pouvaient voir très loin, et
s'évader n'était pas chose facile.
Un prisonnier, n'ayant pas pu s'évader, aurait trouvé
refuge et serait resté caché dans le clocher de
l'église plus d'un an, nourri par le sonneur du village. Il
communiquait par courrier avec sa famille car le sonneur, à
l'instar de nombreux habitants de la commune, envoyait les lettres
(notamment celles que les prisonniers jetaient en boule dans les
propriétés) aux familles des prisonniers restées
en Afrique du Nord.
De ce camp, il ne reste aujourd'hui
aucune trace, mais de nombreux souvenirs.
Cette main d'uvre qui
travaillait à la construction et au transport du
dépôt de munitions paiera un lourd tribut à
l'occasion de plusieurs accidents et bombardements
alliés.
Dans ces enclos,
édifiés tant par une main-d'uvre locale que par
certains prisonniers de guerre, des dizaines, des centaines de tonnes
d'obus, de mines, de cartouches, de grenades, de bombes et de
détonateurs furent stockées pendant toute la
durée de l'occupation et gardées en grande partie...
par des Russes
prisonniers.
Deux bombardements alliés, sur
le camp de munitions, l'un sur le secteurs des Plainards, l'autre sur
le Puits d'Orléans, feront de nombreux morts parmi les soldats
allemands et les prisonniers et requis au STO.
Le 7 mars 1944, une escadrille
alliée, sans doute avertie par la Résistance
(réseau Hunter Nord), vint jeter quelques bombes et plaquettes
incendiaires sur la forêt, comptant sur la chance pour faire
exploser de proche en proche les dépôts. Mais les
levées de terre bien espacées jouèrent leur
rôle et il n'y eut finalement que peu de
résultats.
Par contre, de nombreux prisonniers
soviétiques et indigènes coloniaux qui y travaillaient
sous la contrainte, ainsi que des civils français,
furent victimes
de 2 bombardements.
Le Maire monsieur DEMONT sera réquisitionné, ainsi que
des villageois, pour aller relever plusieurs dizaines de morts en
forêt de Laigue, autour du carrefour du Puits
d'Orléans.
Les jeunes prisonniers marocains sont
intégrés au sein du village, comme les autres habitants
qui subissent l'occupation allemande. Certains tissent des liens avec
les villageois.
Jacqueline DEMONT, âgée de 20 ans, épousera en
1946, à Clichy, Ben Ali LAYABI, un ex-prisonnier du camp de
Saint-Léger.

Jacqueline
DEMONT
|

Ben Ali
LAYABI
|
Un camp de prisonniers de guerre et
de travail, employés au dépôt de munitions, fut
établi par les Allemands à St-Léger-aux-Bois.
Les Frontstalags sont des camps
ouverts par les Allemands durant la Seconde Guerre mondiale mais
implantés à l'extérieur du Reich. Ils
étaient situés essentiellement en France et en
Pologne.
Ils étaient destinés
aux soldats prisonniers issus des colonies françaises. On en
dénombre, en avril 1941, 22 sur le territoire occupé
qui recueillent environ 69 000 "indigènes" : près de 50
000 Nord-Africains, 16 000 Sénégalais, les autres se
répartissant selon les engagements (Malgaches, Antillais,
Indochinois, etc.)
Par le jeu combiné des
libérations effectuées pour des raisons diverses
(accords politiques, maladies, inaptitude au travail), et en raison
des décès et de quelques évasions, le chiffre
des prisonniers passe à 44 000 en mars 1942 et à 37 000
en mai 1943. Ces libérations ne concernent cependant ni les
anciens combattants de 14-18 ni les pères de famille
nombreuse.
La vie dans les camps n'est pas
facile. Les prisonniers sont affectés à des
détachements de travail dans les charbonnages, l'agriculture,
les forêts et le bâtiment. Certains sont même
utilisés dans les usines d'armement. Un certain nombre est
frappé par la tuberculose. Malgré l'aide de la
population locale et des organisations de secours, la faim n'est pas
comblée et le froid est mal combattu. La solidarité des
habitants permet également la réussite des
évasions qui auraient été vouées à
l'échec car les évadés sont trop facilement
reconnaissables. Cette complicité oriente de nombreux
évadés vers les réseaux de la Résistance.
Les gardiens de ces camps sont des
sentinelles allemandes, souvent anciens combattants de 14-18, et
relativement cléments à l'égard des prisonniers.
A partir de janvier 1943, devant les besoins du front de l'Est, la
Wehrmacht mobilise tous ses moyens et le gouvernement français
répond favorablement à la demande allemande de faire
assurer la garde dans certains frontstalags par des officiers
français. Ce transfert crée une situation
inédite et suscite des interrogations puisque les anciens
officiers français des troupes indigènes deviennent
subitement leurs geôliers. Ceci accroîtra la
démoralisation des prisonniers ainsi que le sentiment d'avoir
été trahis au nom d'une raison
d'État...
Impatients de rejoindre leur terre et
leur famille, ils vivent dans des conditions sanitaires difficiles,
souvent mal nourris et mal habillés. Ils connaîtront des
fortunes diverses lors de leur retour au pays constatant
amèrement qu'ils ont été oubliés et
trahis. En France, les traces commémoratives sont quasiment
absentes, mis à part quelques tombes éparpillées
et le plus souvent anonymes.
Source : https://www.cheminsdememoire.gouv.fr/index.php/fr/les-frontstalags
Ci-dessous 2 résistants
passés par le camp de St-Léger :
René PITON,
Résistant du réseau Manipule (par Jean-Yves
Bonnard)
|
René Piton devient agent de
renseignement après sa rencontre avec Albert Bénicy en
février 1943. Aidé d'André Boucher, de
Chevincourt, il livre des renseignements sur le camp de munitions
de Saint-Léger-aux-Bois, le camp d'aviation
d'Asny-Beuvraignes (Somme), les emplacements des états-majors
de l'Air et du Transport...
Paul PLONQUET, alias Larret,
FFI massacré (par Jean-Yves Bonnard)
|
Né le 6 février 1925
à Giraumont (Oise), Paul Plonquet s'engagea dans la marine
nationale à Toulon jusqu'à l'invasion de la zone libre
et le sabordage de la flotte française le 27 novembre 1942.
Mis en congé en décembre 1942 et revenu dans son
village, il travailla comme journalier à la
Société française d'alimentation avant
d'être employé au Centre de Ravitaillement et de Triage
des Prisonniers de Guerre (CRTPG) de Compiègne. Requis pour
travailler à Soissons puis à
Saint-Léger-aux-Bois, il se réfugia en culture dans
sa commune natale chez le cultivateur Albert Debry.
A la mi-août 1944, à Giraumont, il fut recruté
dans la Résistance par Hugues Leroy avec son camarade Albert
Lagny. Il devint par la suite l'agent de liaison d'Hugues Leroy. Le
27 août 1944, l'état-major FFI de l'Oise ayant mis en
action les groupes actifs, le groupe n°1 des FFI de
Compiègne créa un maquis de 21 hommes dans les ruines
du château de Rimberlieu, entre Villers-sur-Coudun et
Giraumont. Le 28 août 1944, vers 6h du matin, les FFI
placés sous la direction du lieutenant Leroy-Sainte-Marie
furent attaqués par un détachement allemand. Quinze
d'entre eux parvinrent à s'échapper. Les 6 autres,
Jacques de Préval, Pierre Forest, Albert Lagny, Roger Lescot,
Irénée Marié et Paul Plonquet furent
encerclés et capturés par les Allemands qui
s'emparèrent d'armes et de munitions. Considérés
comme des terroristes, les six FFI furent torturés,
exécutés sur place et enterrés dans deux fosses
qui ne furent dégagées que deux jours plus tard, peu
après la Libération par les Américains.
Le corps de Paul Plonquet repose dans le cimetière de sa
commune. Reconnu Mort pour la France, une rue de Giraumont porte son
nom.
Un frère de Paul Plonquet s'est engagé en 1942 en
Algérie dans les Forces Françaises Libres. Il participa
à la libération du territoire métropolitain au
sein de la l'armée française reconstituée.
Un monument dit "de Rimberlieu" rendant hommage aux six FFI martyrs
fut érigé grâce à la
générosité des habitants de Giraumont,
Villers-sur-Coudun et Coudun à l'entrée de la
propriété du château. Il fut inauguré le
10 décembre 1944.
Si vous avez des documents ou des
anecdotes sur ce camp de prisonniers écrivez-nous à
assostleger@orange.fr.
Nous partagerons ici vos éléments.
https://www.stleger.info