la fête de la aint acques, en août 2006

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Edouard donne les noms des disparus de l'année et ceux du monument aux morts.

 

tradition et émotion pour le festin

"Nous avons été durement frappés en cette année 2006 par le décès de plusieurs St Liégeois et nous n'avions pas trop le coeur à faire la fête, mais nous avons tenu à respecter les traditions en organisant de nouveau ce festin et toutes ses animations" : c'est en ces termes que le maire Edouard David s'est adressé à ses concitoyens et aux élus lors du dépôt de gerbe au monument aux morts et à l'occasion de l'apéritif d'honneur.

Poursuivant son propos, il a rappelé les réalisations communales récentes les plus marquantes et annoncé la fin des problèmes d'eau potable qui avaient perturbé le village notamment en juillet.

Tout au long de ce week-end, St Liégeois et vacanciers, jeunes et anciens, auront pu se divertir avec 2 grands bals, le spectacle des enfants, un concours de boules et le swing jazz parade des soirées estivales du conseil général.

Pour être complet, ce festin 2006 aura été marqué par la présence de Christophe Ripoche, fondateur et animateur de l'association nationale des St Léger de France et d'Europe qui regroupe 73 communes portant ce patronyme en France, Belgique et Suisse.
Dans son allocution, le maire a tenu à le remercier et à lui rendre hommage pour son action.

Robert Velay, conseiller général, maire de Puget-Théniers, président de la C.C.V.A, représentait le ministre Christian Estrosi, entouré de plusieurs maires ou adjoints des communes voisines ; Charles-Ange Ginésy, député-maire de Péone Valberg, 1er vice-président du conseil général, retenu dans sa commune, était excusé.

Alain Depresle

Accompagnait cet article de Nice-Matin une photo ainsi légendée : "Recueillement lors du dépôt de gerbe, en présence du maire Edouard David, du père David Fenot aumônier de la marine, du 1er adjoint et président du comité des fêtes Jean-Claude Don, et des représentants des anciens combattants."

 

 

 la procession de St Jacques

 

Prouvençau e Catouli
Nosto fe, nosto fe a pas fali
Canten touti trefouli
Provençau et Catouli

La Provenço te suplico
Dins soun vièi e dous parla
La Provenço es catoulico
Nosto damo escouto-la (1875)

 

 

un Saint-Jacques patriotique et républicain

La statue du saint patron des lieux à l'écharpe tricolore provient du prieuré de St Léger dont les biens sont nationalisés et mis aux enchères en 1795. Le prieur devient alors fonctionnaire en prêtant serment à la République, et reçoit un appointement de l'Etat pour l'exercice de son ministère.
Deux versions viennent expliquer l'écharpe tricolore passée à la statue du saint patron du village, Saint-Jacques. Est-ce un témoignage de l'attachement des villageois au sentiment révolutionnaire et républicain ou un témoignage patriotique français pendant la période sarde jusqu'en 1860 ?
Cette coutume unique en France a été maintenue à travers les âges.

 

 

 

 saint Léger, dans le choeur de l'église

 

une enclave dans la guerre

Le village de St Léger bénéficie de son enclave géographique. Accessible par une petite route se terminant en cul-de-sac, l'entrée du village était gardée pendant toute la seconde guerre par le pont suspendu. La garnison allemande en poste à Puget-Théniers depuis 1943 n'osa jamais le franchir de peur de ne jamais revenir.

Léon Schulman, l'un des réfugiés juifs, décrit ainsi le village : "Le bout du monde, 14 km au-dessus de Puget-Théniers, au bord des gorges de Daluis. Impossible d'aller plus loin sans se jeter dans le vide."

L'octroi de sauvegarde des Juifs prend dans le village un caractère spontané, où tous les villageois vont fomenter un véritable complot informel pour entraver la politique anti-juive officielle.

Ainsi le village a accueilli, protégé et sauvé quelque 30 réfugiés israélites de Nice dès septembre 1943, suite à l'invasion des troupes allemandes de la zone d'occupation italienne. Pendant plusieurs mois et jusqu'à la Libération, le village a gardé son secret.

Cela signifiait beaucoup de courage et de sacrifices, notamment pour les coupons de rationnement. Zoé David, alors secrétaire de mairie, avait compris que révéler aux instances cantonales et départementales la présence de 30 consommateurs supplémentaires dans le village mettrait un terme à leur sécurité. Elle falsifia les coupons destinés à l'autorisation de mouture de grains (les quantités de farine étaient alors attribuées en fonction du nombre de personnes vivant dans un foyer).

 

Zoé David en 1975

une broderie de Zoé datée de 1915

Zoé David (1908-1994) - maire de St Léger de 1945 à 1983

 

Il est arrivé que des habitants recourent à l'abattage clandestin et que les meuniers travaillent la nuit pour nourrir la population du village. En cas d'alerte, l'une des deux cabines téléphoniques du village retentissait. Les personnes sûres informaient les villageois lorsque les troupes allemandes s'engageaient sur la route de la Roudoule. Les enfants juifs quittaient alors l'école pour rejoindre leurs parents et gagner la forêt. L'alerte passée, des villageois suspendaient des draps à certaines fenêtres, le signal du retour était ainsi donné.

En 1989, des réfugiés présents à St Léger durant la guerre ont rendu hommage à l'action de Zoé David en lui décernant l'une des plus hautes distinctions de l'Etat d'Israël, la Médaille des Justes, reconnaissant ainsi son dévouement et celui d'un village tout entier.

 

article du bulletin communal "La Lettre de Saint Léger n° 32"

Le 26 novembre 1989, en présence de tout le village et de ses nombreux amis, Mme Zoé DAVID, Maire Honoraire de Saint-Léger, a reçu des mains de M. Itzhäk AVIRAN, Ministre Plénipotentiaire d'Israël en France, "La Médaille des Justes". De nombreux discours furent prononcés à cette occasion par E. DAVID Maire du village, J.P. ASTIER Conseiller Général du Canton, Léon Bernard SCHULMANN initiateur de cette manifestation, M. Itzhäk AVIRAN, Mme Zoé DAVID, Jean-Claude DEMAR représentant M. Yvon OLLIVIER, Préfet des Alpes Maritimes.

Cette journée fut une réussite, malgré l'éboulement du Chaudan sur la R.N. 202, qui obligeait à un grand détour pour se rendre à Saint-Léger et qui empêcha nombre de nos amis d'être présents.

Un grand merci à "L'Harmonie Pugétoise" qui, présente au grand complet, interpréta la Marseillaise et l'Hymne d'Israël, spécialement appris à cette occasion.

Suivent le discours de Mme Zoé DAVID, ainsi que quelques extraits de la lettre écrite par M. SCHULMAN à son retour à Paris.


Mme ZOE DAVID :

"A vous tous, ici présents, que pourrais-je dire après tant de discours élogieux à mon égard ? Rassurez-vous, je dirai tout simplement ce que je ressens en ce moment.

D'abord, de la fierté pour mon village natal et pour moi-même, car je suis consciente de l'honneur que l'on fait à "Notre Saint-Léger", en m'attribuant cette distinction de la "Médaille des Justes".

Ensuite, je suis très émue d'avoir revu une partie des Israélites qui se cachaient ici pendant la guerre. Je dois leur dire que j'ai été très touchée qu'au bout de tant d'années, ils aient eu cette délicate pensée de revenir pour manifester publiquement leur reconnaissance. C'est un beau geste qui les honore.

Je tiens à remercier, son Excellence, M. le Ministre Plénipotentiaire d'Israël, de s'être dérangé de Paris pour venir dans notre minuscule village de montagne. Je remercie en bloc (comment faire autrement, vous êtes si nombreux), toutes les personnes ici présentes qui se sont déplacées, également les amis et parents qui ont aidé à préparer cette salle pour vous accueillir, l'Equipement, les Gendarmes qui, à cause de moi, ont un dimanche bien chargé et l'orchestre que je n'attendais pas et qui a été pour moi une agréable surprise.
Je dois ajouter un merci spécial pour M. Marius BAUD, le facteur de l'époque, car nous agissions comme des complices dans des circonstances délicates et cela ne s'oublie pas.

Vous me permettrez, en ce jour de fête, d'avoir une pensée pour tous ceux qui vivaient à Saint-Léger durant les années 1943-1944 et qui, hélas, sont décédés. Je pense à M. et Mme SCHULMANN, les parents de Gustave, Bernard et Henri, à M. KITROSSER, à Mme Léon GROSCOT, au Docteur KARASSIK (que nous appelions familièrement "pur sucre").
Je pense aussi à mon père, César DAVID, qui dut assumer ses responsabilités de Maire, et à tous ceux du village qui ont contribué à ce que les juifs de Saint-Léger ne soient pas pris. Je pense particulièrement à ceux qui les ont logés. Seuls M. et Mme Marius DOUHET sont encore en vie. Les autres, Mme Vve BARET Maria, M. et Mme Ange DOUHET, M. et Mme Ernest COSTE, sont, hélas, décédés.

Mes pensées vont aussi vers les vivants qui n'ont pas pu venir, comme Mme KITROSSER, sa fille Marie-Thérèse et sa famille, Mme Carola CORST (" Lola " pour nous) qui sont aux Etats-Unis, les MEYER de Paris qui s'abritèrent dans un autre département français grâce aux papiers que je pus leur faire parvenir à temps. Je pense aussi à l'institutrice de l'époque, Marie-Jeanne LIONS (épouse FOUQUES) qu'un imprévu empêche d'être présente et qui s'en excuse, car elle aurait aimé revoir Henri SCHULMANN et Marguerite GROSCOT, qui ont été ses élèves.

En conclusion, avec le recul et les expériences vécues, je dirais aux jeunes qui ont eu la chance de ne pas connaître la guerre, ni les restrictions, que je souhaite pour eux qu'ils sachent être tolérants, car le respect des autres me paraît une chose indispensable pour aider à la Paix dans le monde."


Monsieur SCHULMANN

"A peine remis des émotions et des péripéties imprévues de notre incursion fugitive à Saint-Léger, il me reste maintenant le sentiment amer d'avoir manqué cette cérémonie solennelle après l'avoir souhaitée et préparée depuis de nombreuses années.

(…) finalement victime d'une catastrophe naturelle, imprévisible, obligé de vous quitter précipitamment à la sauvette. Dommage pour la Fête que se faisait toute une population si heureuse de ces retrouvailles, si heureuse aussi de votre récompense tellement méritée et dont elle se sentait co-récipiendaire et votre complice de notre survie au temps des persécutions.

Je me sens coupable et en même temps impuissant, et prisonnier de l'horaire imposé, implacable pour assurer comme prévu le retour à Paris de son Excellence M. AVIRAN.

Avec mon frère Henri, sans bruit, sans fanfare, nous reviendrons à la belle saison. Nous retournerons à Saint-Léger que nous n'avons jamais oublié pendant notre long silence. Nous reverrons tous ceux qui nous ont connus, qui se souviennent, leurs enfants, les enfants de leurs enfants.

Alors nous pourrons ensemble égrener nos souvenirs réciproques et prouver tout simplement que dans notre tête, dans notre coeur, nous n'avons jamais été séparés (…)"

 

Zoé David désignée Juste des Nations - article de presse de 1991

Aux dires des membres de la mission, le moment fort de ce voyage d'étude et d'information - mis à part la nuit à l'aéroport - fut la cérémonie organisée par le musée Yad Vashem en l'honneur de Mme Zoé David.

Zoé est née il y a 82 ans à St Léger, petit village perché là-haut, dans la montagne des Alpes Maritimes, à 1000 mètres d'altitude.
En 1943-44, Zoé a sauvé dix-neuf Juifs de la mort - parmi eux, Léon Schulman et André Groscot, deux des participants à cette mission - en leur offrant un refuge dans son village.
Zoé est venue en Israël avec la délégation : "C'est Léon qui m'a contactée. J'ai été surprise et touchée."
Zoé raconte : "Mon père était maire du village. Il m'avait nommée secrétaire. J'avais donc accès aux tampons. C'est comme ça, par exemple, que Léon a pu échapper au STO."
Mais Zoé a aussi organisé la population de son village (84 habitants à l'époque) et elle a réussi à recevoir l'appui de la gendarmerie.

Dans son allocution, Lucien Lazare, historien de la Choa et membre de la commission chargée de désigner les Justes des Nations, note que "Zoé symbolise le réconfort et l'espoir surgissant du désespoir." Tant de fonctionnaires ont collaboré sous l'Occupation. Zoé, au contraire, a su user des rouages de l'administration - et de son influence personnelle - pour déjouer l'occupant nazi.

Cette femme souriante est touchante d'humilité : "Que voulez-vous, il n'y avait rien d'autre à faire. On a eu beaucoup de chance. Je suis contente que la population de mon village ait su garder sa langue."
A la Libération, lorsque les femmes obtinrent le droit de vote, Zoé fut élue maire de St Léger, fonction qu'elle occupera jusqu'en 1983.

Encadrée par Léon et André, Zoé écoute la prière du Yizkorf et le Kadish… "On m'a attribué le titre de Juste des Nations. On ne faisait pas ces choses-là pour une médaille." dit-elle pudiquement. Après avoir déposé une gerbe dans la crypte du souvenir, Zoé plantera un caroubier dans l'Allée des Justes.
En 1975, Zoé sera décorée de la Légion d'Honneur. Il était juste que son courage et sa sensibilité fussent reconnus à jamais par l'Etat d'Israël.

P. K.

 

article du bulletin communal "La Lettre de Saint Léger n° 115"

Rentrée scolaire 1944

lI nous a paru intéressant de vous faire connaître les paroles par lesquelles l'institutrice en poste à St Léger à cette époque-là accueillit les élèves le jour de la rentrée.
L'institutrice était mademoiselle Maria Jeanne LIONS qui avait pendant la guerre accueillit dans son école les enfants des familles qui avaient cherché refuge à Saint Léger.


"Nous voici de nouveau réunis pour une nouvelle année scolaire.
Depuis votre départ en vacances, l'un des plus grands événements de notre histoire s'est produit : notre pays a été libéré de la brutale occupation étrangère qui durait depuis 4 ans.
Notre joie a été immense. Elle sera encore plus grande, le jour où toute la France sera libérée car l'ennemi occupe encore l'Alsace et la Lorraine et certains points de notre territoire moins importants.
Votre rentrée est une rentrée exceptionnelle et vous ne l'oublierez pas.
Nous ne commencerons pas notre année de travail sans élever nos pensées et nos cœurs vers le Général de Gaulle, le grand Français que les circonstances ont placé à la tête de la République française.
Moins qu'aucun autre, il n'a jamais désespéré. Dans les circonstances les plus difficiles, malgré la défaite et l'Armistice, il a incarné la volonté de vivre et de résister de la France. Il a su communiquer sa foi et sa flamme. Il a déjà libéré la France. Il la conduira à la victoire définitive.
Après avoir rendu hommage au chef, notre pensée va vers tous ceux qui l'ont suivi clandestinement au risque de leur vie, vers ceux qui ont travaillé à rassembler et équiper les troupes qui viennent de nous libérer vers les victimes des féroces représailles allemandes, vers tous les combattants ; vers ceux qui ont versé leur sang dans la lutte au cours de la libération ; vers toutes les victimes de la guerre ; vers toutes les familles dont le cœur saigne de douleur.
Nous demandons en particulier une pensée fervente aux cinq martyrs de Puget-Théniers et à leurs familles.
Nous envoyons nos pensées les plus affectueuses à tous les absents qui souffrent encore à cette heure et nous leurs souhaitons le prochain retour.
La plus grande guerre de l'histoire finira bientôt.
Dans la paix retrouvée, notre patrie qui a tant souffert de la guerre se remettra au travail et pansera ses blessures.
Vous vivrez dans une société meilleure que celle dans laquelle ont vécu vos pères.
Mais vous aurez d'impérieux devoirs à remplir. Vous devrez être des hommes et des femmes forts sérieux, travailleurs, dévoués à vos semblables et à votre patrie que vous devez aimer par dessus tout. Plus que par le passé, vous devrez travailler à faire une France plus nombreuse, plus unie et plus forte.
Vous voudrez de toute votre âme que notre pays soit une grande nation républicaine, travailleuse, pacifique et forte.
C'est à l'école que vous apprenez vos devoirs. Nous ne voulons pas commencer notre année de travail sans souligner la beauté et la gravité du moment, sans faire appel à vos sentiments patriotiques de petits Français. Nous vous demandons de bien travailler au cours de l'année qui s'ouvre devant vous, d'être des enfants raisonnables, sérieux, bien élevés, aimant bien leurs parents, leurs frères et sœurs, leur école et leur village.
Nous vous demandons de faire tous vos efforts pour satisfaire vos maîtres et vos familles de vous préparer avec la plus grande foi à devenir les hommes et les femmes que notre pays attend.
Au travail donc, et vive la France !"

 

 

village de tolérance

Le buste de Marianne trône à la mairie tandis que la Vierge à l'enfant orne l'église paroissiale.
Ces deux statues noires ont été réalisées et offertes à la commune par Marguerite Groscot, réfugiée avec ses parents pendant la guerre à St Léger.
Ces deux symboles sont l'expression d'un sentiment fort de tolérance.

 

la uite

 

 

 

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