argantua à St Léger de ontbrun ?!
 

 
illustration de Gustave Doré

 

 

Gargantua a été repéré un peu partout sur le territoire français sous son nom propre, ou bien sous un de ses multiples prête-noms qui n'empêchent pas de le reconnaître à son allure et aux exploits qui lui sont attribués. Différents chercheurs se sont attachés, depuis un siècle et demi, à collecter les informations concernant les légendes locales. Voici celles ayant trait aux Deux-Sèvres (79) :

  • Sainte Macrine, montée sur une mule ferrée à l'envers, fuit devant Gargantua. La bête, fatiguée, s'arrête dans l'île de Magné, près du champ des Idoles, où l'on sème de l'avoine. Lorsque Gargantua arrive, l'avoine est miraculeusement prête pour la moisson, et le paysan nie avoir vu quiconque passer depuis le moment où il semait. Gargantua abandonne sa poursuite et secoue ses sabots pour former les buttes de Sainte Macrine et de la Garette.
  • Gargantua s'assied sur le clocher de Notre-Dame de Niort, les pieds sur ceux de Fontenay-le-Comte et de Luçon.
  • Un gros mamelon arrondi dans la vallée de la Sèvre, près de Saint-Maixent, et de la route à la Motte-Saint-Heraye, est un étron de Gargantua, qu'il dépose un pied dans lîle de Montaï, près de Palu, l'autre sur le coteau Pèss'Marin, près de Nanteuil.
  • Gargantua boit le Thouet au gué de Ligaine, près de Taizé. Puis il mange six boeufs, avec une charrette chargée d'épines et le bouvier, et s'endort. Il forme deux buttes en vidant un de ses sabots à Montcoué, l'autre à Tourtenay, avant de poursuivre sa route vers le nord, par Saint Léger de Montbrun et Oiron. Il avale alors un moulin sur les côteaux de la Loire, et en meurt car les ailes continuent de tourner dans son ventre.
  • Gargantua avale l'eau de la mer qui s'étendait jusqu'à Niort, ce qui forme le Marais Poitevin.
  • Gargantua boit la Sèvre Niortaise avec un bateau et assèche le Marais Poitevin.

 

 

 

Petite lecture rabelaisienne...

omment argantua mangea en salade six pèlerins

 

 

Le propos requiert que racontions ce qu'advint à six pèlerins qui venaient de Saint-Sébastien près de Nantes, et qui, pour soi héberger celle nuit de peur des ennemis, s'étaient mussés au jardin dessus les tiges de pois entre les choux et laitues.
Gargantua se trouva quelque peu altéré et demanda si l'on pourrait trouver des laitues pour faire salade. Et entendant qu'il y en avait des plus belles et grandes du pays, car elles étaient grandes comme pruniers ou noyers, y voulut aller lui-même et en emporta en sa main ce que bon lui sembla. Ensemble emporta les six pèlerins, lesquels avaient si grand peur qu'ils ne osaient ni parler ni tousser.
Les lavant doncques premièrement en la fontaine, les pèlerins disaient en voix basse l'un à l'autre : "Qu'est-y de faire ? nous nous noyons ici, entre ces laitues, parlerons-nous ? Mais, si nous parlons, il nous tuera comme espions."

Et comme ils délibéraient ainsi, Gargantua les mit avecques ses laitues dedans un plat de la maison, grand comme la tonne de Cîteaux, et avecques huile et vinaigre et sel, les mangeait pour soi rafraîchir davant souper, et avait jà engoullé cinq des pèlerins.

Le sixième était dedans le plat, caché sous une laitue, excepté son bourdon qui apparaissait au-dessus. Lequel voyant Grandgousier dit à Gargantua :
" Je crois que c'est là une corne de limaçon, ne le mangez point.
- Pourquoi ? dit Gargantua. Ils sont bons tout ce mois. "
Et tirant le bourdon, ensemble enleva le pèlerin et le mangeait très bien. Puis but un horrible trait de vin pineau, et attendirent que l'on apprêtât le souper.

Les pèlerins ainsi dévorés se retirèrent hors les meules de ses dents le mieux que faire purent, et pensaient qu'on les eût mis en quelque basse fosse des prisons. Et lorsque Gargantua but le grand trait, cuidèrent noyer en sa bouche, et le torrent du vin presque les emporta au gouffre de son estomac. T
Toutefois, sautant avecques leurs bourdons comme font les micquelots, se mirent en franchise à l'orée des dents. Mais par malheur l'un d'eux, tâtant avecques son bourdon le pays, à savoir s'ils étaient en sûreté, frappa rudement en la faulte d'une dent creuse. et férut le nerf de la mandibule. Dont fit très forte douleur à Gargantua, et commença crier de rage qu'il endurait.
Pour doncques se soulager du mal, fit apporter son cure-dents, et sortant vers le noyer grollier, vous dénicha messieurs les pèlerins. Car il attrapait l'un par les jambes, l'autre par les épaules, l'autre par la besace, l'autre par la poche, l'autre par l'écharpe ; et le pauvre hère qui l'avait féru du bourdon, le accrocha par la braguette. Toutefois, ce lui fut un grand heur, car il lui perça une bosse chancreuse, qui le martyrisait depuis le temps qu'ils eurent passé Ancenis.

Ainsi les pèlerins dénichés s'enfuirent à travers la vigne le beau trot, et la douleur s'apaisa. En laquelle heure fut appelé par Eudémon pour souper, car tout était prêt.
"Je m'en vais doncques, dit-il, pisser mon malheur."
Lors pissa si copieusement que l'urine trancha le chemin aux pèlerins, et furent contraints passer la grande rivière.

Rabelais, Livre I, chap. XXXVIII

 

 

Source : cette page a pu être écrite grâce à un site dont nous conseillons la visite "Mythes, contes et légendes de la France". Vous le trouverez à l'adresse http://www.mythofrancaise.asso.fr/mythes/index3.html  

 

 

 

 

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