Journal des Marches et des Opérations (JMO)
journée du 12 novembre 1914

 

Le 77e Régiment d'Infanterie - celui d'Auguste - fait partie en 1914 de la 36e Brigade d'Infanterie et de la 18e Division d'Infanterie.

Voici des extraits de plusieurs JMO (Journal des Marches et des Opérations), écrits sur place par des officiers et qui donnent une idée de la terrible journée du 12 novembre 1914, jour de la mort probable, ici même, d'Auguste Jaud.

- JMO du 77e Régiment d'Infanterie

- JMO de la 36e Brigade d'Infanterie

- JMO de la 18e Division d'Infanterie

- JMO du 135e Régiment d'Infanterie, régiment voisin du 77e R.I. d'Auguste, au moment de sa mort

 

 

les forces en présence

 

uniformes de la 6e Division de Cavalerie
(aux côtés de la 18e Division d'Infanterie
dont fait partie la 36e Brigade d'infanterie avec le 77e R.I.)

7e Cuirassier -10e Cuirassier

11e Hussard - 13e Chasseur

2e Dragon - 14e Dragon - 17e Dragon - 26e Dragon

 

 

JMO du 77e Régiment d'Infanterie

 

24 octobre 1914
départ de Dickbuch vers 7h 30 - Le Régiment traverse Ypres (…) et se dirige vers Zonnebeke, le 3e Bataillon en tête.

25 octobre 1914
Le Régiment est en liaison avec l'armée anglaise. Le 3e Bataillon se porte à droite de la route de Zonnebeke et, par bonds successifs, sous un violent bombardement, il va renforcer les Anglais qui viennent de s'emparer du village de Moorsleede. Les troupes passent la nuit dans des tranchées allemandes conquises, où gisent de nombreux blessés et cadavres allemands.

26 octobre 1914
Le régiment passe au nord de Zonnebeke, appuyé à la voie ferrée de Zonnebeke à Roulers, direction Roulers. Le Colonel Eon ayant été blessé, le Colonel Lestoquoi prend le commandement de la Brigade, le Commandant Baunard prend le commandement du Régiment. Le Lieutenant de Dinechin est nommé Capitaine et prend le commandement du Bataillon (…)
Dans la soirée, le Régiment, dont une partie est relevée par les Anglais, se déplace vers la gauche et occupe la partie comprise entre la voie ferrée et la route de Passchendaele.

27 octobre 1914
Dans la matinée, le Capitaine Henrion, arrivé la veille au Régiment, prend le commandement de la 6e Compagnie. Vers 10h, le Commandant Mariani reçoit l'ordre de prendre le commandement du 135e.
Il passe le commandement du 2e Bataillon au Capitaine Henrion.
Au cours d'une reconnaissance exécutée ce jour, le Capitaine Henrion est tué d'une balle à la gorge.

28 octobre 1914
Le Général de Division vient sur place et donne l'ordre d'avancer coûte que coûte.
Malgré un violent bombardement, nous avançons, sans subir beaucoup de pertes, jusque près de la station de Passchendaele. Le Commandant Baunard installe son P.C. à la ferme du cabaret de Bellevue.

2, 3 et 4 novembre 1914
Le Capitaine de Dinechin est tué.
Organisation des tranchées. Les Allemands sont à une trentaine de mètres.
Au cours des 2, 3 et 4 novembre, quelques attaques des ennemis sont finalement repoussées, avec des pertes assez sensibles pour eux.

12 novembre 1914
Le 135e, qui est à notre droite, a subi beaucoup de pertes. Plusieurs de ses éléments se rendent et, par ce fait, une Compagnie du 77e, la 7e, est en partie prisonnière.
Par suites de relèves, la 3e Compagnie, qui se trouve à droite du 3e Bataillon, étant attaquée, doit se replier. Sa retraite occasionne des pertes à la 11e Compagnie qui subit une attaque violente de l'ennemi. A ce moment, nos effectifs sont très réduits. Chaque Compagnie ne dispose que de 60 ou 80 fusils environ.
A droite de la route de Passchendaele, les attaques allemandes ont pénétré jusque dans nos lignes.
Le 92e Régiment d'Infanterie et d'autres régiments arrivent et essaient, mais en vain, de reprendre les tranchées perdues. Malgré un bombardement violent de chaque jour, nous conservons nos positions jusqu'au 19 novembre.

 

 

 

 

JMO de la 36e Brigade d'Infanterie

journée du 11 novembre 1914
De très violentes attaques ennemies s'étant produites à notre droite sur la gauche anglaise, la ligne anglaise subit de ce fait un léger fléchissement, et le Colonel commandant la 36e Brigade, sans rien modifier sur son front, donne l'ordre à 2 compagnies du 32e et à l'escadron à pied dont il dispose d'occuper :
1- les ouvrages à cheval sur le ravin sud-ouest de Zonnebeke
2- les tranchées de la région du Moulin, sud de Zonnebeke
3- les ouvrages sud de Zonnebeke et à l'est de la Briquetterie.
Dans la soirée, à la suite d'une contre-attaque sérieuse, les Anglais reprennent une partie de leurs tranchées.

journée du 12 novembre 1914
Reçu à 3h l'ordre d'opérations pour la journée du 12, la mission de chacun étant de se renforcer pendant la nuit sur les positions qu'il occupe actuellement et de s'y maintenir énergiquement dans la journée, en attendant la reprise prochaine de l'offensive.
Le matin, vers 6h, reçu le compte-rendu ordinaire des évènements de la nuit : rien d'anormal au 77e ni au 135e. Et cependant, vers 7h 40, un pli de la brigade anglaise, nos voisins de droite, nous prévient que des troupes françaises à leur gauche se sont rendu prisonnières et que la brigade anglaise ne se retirera pas, restant comme point d'appui pour notre artillerie.
Renseignements pris, le tout était exact. Certaines compagnies du 135e, surprises et cernées au petit jour, avaient disparu et les Allemands s'avançaient sur la 2e ligne. L'alerte fut vite donnée et le Colonel commandant la 36e Brigade put y parer heureusement, en organisant des contre-attaques et grâce à l'appui de l'artillerie.
Vers 11h, l'offensive de l'ennemi était enrayée et, avec un renfort de 2 compagnies du 114e envoyées de la 2e Division d'Infanterie, une contre-attaque est menée pour repousser l'ennemi de la crête occupée par la route Broodseinde-Becelaere.
Au soir, notre ligne se maintenait fortement un peu en arrière de la crête.
Le 77e n'avait pas abandonné ses positions, malgré les attaques furieuses de l'ennemi et des pertes sérieuses.
Ordre lui est donné tout de même le soir de remettre un peu plus à l'ouest, le long de la route Passchendaele-Becelaere, les compagnies qu'il avait à l'est de cette route, dans les bois.

 

 

 

JMO de la 18e Division d'Infanterie

"(…) Toute la journée du 11, les tranchées et le village de Zonnebeke sont très fortement bombardés.
On signale de nouveaux engins lancés des tranchées allemandes et ayant fait plusieurs morts.
Dans la soirée, les Anglais nous disent qu'ils ont repris une partie des tranchées occupées par eux dans la matinée.

 

 

 

jeudi 12
Dans la matinée, vers 5h, après une nuit épouvantable, vent, orage, pluie, une violente attaque allemande se produit sur le front de la 18e D.I. Dans l'obscurité, 7 compagnies du 135e R.I. sont entourées, cernées et disparaissent. Les Allemands, profitant de ce trou, arrivent jusqu'à la route Broodseinde-Becelaere.
A ce moment l'A.D 18 (Artillerie Divisionnaire de la 18e Division) arrête l'offensive allemande.
Bientôt, l'A.C 9 (Artillerie du 9e Corps d'Armée), l'artillerie de la 6e D.C (Division de Cavalerie) et un groupe de l'A.D 17 (Artillerie Divisionnaire de la 17e Division) renforçant l'A.D 18 tirent sur cette route.
La 16e Brigade Légère envoyée par la 6e D.C vient occuper des tranchées, le 11e Hussards au sud de Zonnebeke, le 13e Chasseurs au sud du passage à niveau ouest de Zonnebeke. Le 77e R.I., malgré de très nombreuses et très violentes attaques, maintient ses positions face à l'arrêt, mais recule un peu en son centre. Par mesure de précaution et pour la nuit, on fait revenir le 77e sur la route Passchendaele-Broodseinde, sa droite à 100 m au nord du carrefour. Notre ligne s'infléchit ensuite vers l'ouest pour couper la route Zonnebeke-Broodseinde, à 200 m ouest du carrefour, et notre ligne se poursuit presque parallèlement à la route de Becelaere par une compagnie du 135e R.I., sa gauche à la route. Une Compagnie du 77e et deux Compagnies du 114e R.I. arrivent à souder leur droite à la gauche de la 2e ligne anglaise, sur la route de Becelaere et à environ 1000 m du carrefour de Broodseinde.
Une Compagnie du 32e RI est à la sortie est de Zonnebeke, une autre Compagnie du 32e à la sortie sud de ce village avec les 2 Escadrons du 11e Hussards.

 

l'église de Zonnebeke bombardée

 

 

ruines de Zonnebeke - canons allemands sur le quai de la gare

 

vendredi 13
Dans la matinée, le 77e est attaqué mais conserve ses positions. A 18h, le Général apprend qu'il va recevoir 2 bataillons de renfort du 92e, et immédiatement prépare avec ces 2 bataillons une attaque pour reprendre les positions perdues la veille.
L'attaque part à 14h. A 16h, on avait repris la route de Broodseinde-Becelaere au sud du carrefour, sur une certaine étendue. Quelques Allemands sont encore entre nous et la gauche anglaise. Au cours de l'attaque, le Colonel Knoll, commandant le 92e, est tué, un chef de bataillon également tué, un autre blessé. Le manque de commandement se fait sentir et nous reperdons la route en maintenant l'occupation du carrefour de Broodseinde et la route au nord.

samedi 14
Dès 7h, violente canonnade sur tout le front. A 9h, les Allemands attaquent entre le carrefour de Broodseinde et la voie ferrée sur le front du 77e. L'artillerie fait un barrage en avant des tranchées du 77e et arrête l'attaque. A 16h, le 77e entend des renforts ennemis arriver (…)"

 

 

Zonnebeke

 

 

 

 

 

JMO du 135e Régiment d'Infanterie

11 novembre 1914
8h 30 : canonnade très forte sur les tranchées du 32e
11h : canonnade sur le front, particulièrement sur les tranchées NE du bois de sapins, occupées par la 2e Compagnie du 32e - fusillade très peu dense
11h 15 : Une attaque allemande semble se préparer sur le front. Ordre est donné aux 2 Compagnies du 135e et aux 2 du 32e qui se trouvent à Zonnebeke de prendre les armes, ainsi qu'à la Compagnie Hors Rang, également cantonnée à Zonnebeke.
jusqu'à 16h, violente canonnade ennemie - fusillade assez nourrie par moments
16h : situation sans changement - Pendant l'attaque de l'après-midi, la 1re ligne a tenu bon.
17h : Ordre est donné à la Compagnie Cycliste de conserver plus que jamais un contact intime avec la gauche anglaise.
20h : Les Allemands lancent dans certaines tranchées des projectiles divers : obus de très faible calibre, grenades à main, fusées.
23h : Une relève s'opère sans incident.
pertes de la journée
1 soldat tué / 1 sous-officier et 18 soldats blessés

12 novembre 1914
La mission de chacun est de se renforcer cette nuit sur les positions qu'il occupe et de s'y maintenir énergiquement dans la journée, en attendant la reprise prochaine de l'offensive.
A partir de 5h, une attaque allemande s'est produite sur la droite du secteur occupé par le Régiment. Le Régiment, cédant à des forces ennemies très importantes, a perdu quelques tranchées de 1re ligne.
Le secteur du Régiment a été fortement canonné et, à la fin de l'engagement, vers 9h, les Allemands occupaient la route de Paschendaele-Becelaere, à l'est du carrefour de Broodseinde, et quelques tranchées au sud.
Une Compagnie, la 1re à gauche du secteur, a tenu ses positions jusqu'à la nuit et n'a dû se replier que sur ordre pour se trouver à hauteur du Régiment.
A 14h 45, le 92e R.I., venant de l'arrière et soutenu par les feux du 77e et du 135e, prononce une contre-attaque à 300 m sud du carrefour de Broodseinde et 150 m nord.
15h 30 : Le 114e fait sa jonction avec le 135e et participe à la contre-attaque, à la suite de laquelle l'ennemi a été repoussé à la baïonnette sur la route de Paschendaele-Becelaere, à hauteur du carrefour de Broodseinde.
A la suite du combat du matin, le Régiment n'avait plus que 6 Compagnies organisées, les 3e, 6e, 8e, 9e, 10e et 12e Compagnies ayant perdu ses cadres et hommes qui ont été tués, blessés ou fait prisonniers.
pertes de la journée :
1 sous-officier, 11 soldats tués
44 sous-officiers, 795 soldats disparus
15 sous-officiers, 76 soldats blessés

 

 

un fusil à baïonnette

 

 

77e et 135e RI - revue passée le 16 mars 1916 - Auguste est mort depuis longtemps

 

 

  

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