l'bbé iolet (1875-1956)

 

Au début de son récit, dans "une leçon de politesse", Eugène écrit :

(...) Le Maire est un homme sec, aussi sec qu'Harpagon, aussi pingre que lui, absolument insignifiant, et conduit par sa femme comme une pauvre marionnette.
Madame est née dans le Luxembourg. Elle a les cheveux rouges, et la figue ornée de grosses taches de rousseur. Elle se teint et se peint.
Elle était intimement liée, avant la guerre, avec une certaine demoiselle Koetsemberg, brêmoise d'origine, qui avait une volumineuse correspondance avec l'Allemagne, et de nombreuses visites, en son domicile, à Paris, rue...
Cette Koetsemberg, était-ce une espionne ? Sans doute.
Tous les Allemands, établis en France, couvraient notre pays d'un vaste réseau d'espionnage (...)

Bien après, dans la partie "un bon maire", sur le même sujet, il dit :

(...) Ce qui m'indignait le plus, c'est de penser qu'avant la guerre ces gens-là frayaient avec nos ennemis, étaient les intimes de cette Koetsemberg, une espionne sans nul doute. De plus, on racontait que Madame la mairesse avait reçu par la Hollande une lettre de Brême, dans laquelle la Koetsemberg demandait à Madame de mettre en sûreté son mobilier, surtout sa bibliothèque... et je devinais le reste (...)

Enfin, dans les documents insérés dans le carnet, on lit ceci :

Confidentiel
26 octobre

Impossible de se procurer en ce moment des renseignements officiels sur l'origine exacte des parents de Mme Plassard Kehen. Le Luxembourg, leur pays d'origine, étant vous le savez très bien occupé par l'ennemi.
Madame Plassard Kehen s'est toujours entourée d'allemands. Ses domestiques, avant la guerre, étaient presque tous allemands et sa meilleure amie était parfaitement cette Kutsemberg, sujette allemande et protestante employée comme institutrice dans une œuvre catholique dirigée par l'abbé Violet, rue du Chemin Vert.
La dite Kutsemberg, qui se trouvait soit disant en Allemagne au moment de la mobilisation, habitait à Paris, 25 rue Froideveaut, où elle avait comme voisine un de ses compatriotes artiste peintre. Elle recevait journellement de nombreuses visites de dames et 5 à 6 lettres venant d'Allemagne.
Quelque temps après la mobilisation, Mlle Kutsemberg a écrit à Madame Plassard pour la prier de payer son loyer et, lorsque celle-ci s'est présentée ou plutôt a envoyé sa femme de chambre pour payer, il lui a été répondu que l'œuvre avait fait le nécessaire et que même le mobilier de Mlle Kutsemberg, y compris sa bibliothèque, avaient été portés à l'œuvre.
Si la bibliothèque de Mlle Kutsemberg aujourd'hui sous séquestre contenait quoi que ce soit de suspect au moment de la mobilisation, il est probable qu'elle aura été vidée avant le déménagement par les amies qui ont été autorisées à entretenir son appartement et qui l'ont visité très souvent entre la déclaration de guerre et l'enlèvement du mobilier.

N.B. Mme Plassard habitant depuis la guerre Epernon et M. Plassard tantôt à Canuz tantôt St Léger où il est maire, j'ai dû, étant très malade, faire prendre les renseignements par un de mes camarades et ils m'ont coûté 75 f.

 


 

Des monarchistes constitutionnalistes dénoncent le libéralisme économique et l'exploitation sociale ; ils sont les précurseurs de ce que l'on appellera le catholicisme social ; ils en dénoncent les retombées sur la famille de plus en plus désorganisée, qui favorise le travail des femmes et des enfants.

Ils ont conscience que les familles nombreuses sont les plus mal loties et réclament des mesures fiscales en leur faveur. L'idée se fait jour qu'elles seules contribuent à la richesse de la nation et qu'elles ont des droits. L'idée se fait jour aussi face à l'inertie des pouvoirs publics qu'elles doivent peser sur le plan politique à juste proportion de " leur poids " d'où l'idée du suffrage familial proportionnel au nombre d'enfants.

L'abbé Violet fonde en 1902 le Moulin Vert, chargé d'une action éducative et d'assistance aux familles ; il sépare ainsi le social d'avec le confessionnel et en même temps qu'il fonde une association familiale dans le XIVe arrondissement, il fonde aussi une société pour l'amélioration du logement ouvrier. L'abbé Violet a été dreyfusard et il considère que les familles ne doivent pas tout attendre de l'Etat-providence mais qu'elles doivent s'aider par la prévoyance et la mutualité. De cette idée sortira en 1919 la "Confédération générale des Familles", clin d'œil et allusion à peine voilée à la Confédération générale du Travail, soulignant ainsi l'aspect revendicatif du mouvement.

 

 

"L'espionne" Koetsemberg habite à Paris 14e, rue Froidevaux, et l'abbé Violet est rue du Moulin Vert.

 

De ces débats et mouvements qui traversent l'opinion publique française sortira la loi du 14 juillet 1913, dite loi d'assistance aux familles nombreuses qui crée une allocation forfaitaire pour les familles nombreuses sans ressources, une déduction de 5 % par enfant de l'impôt sur les revenus. Par la suite, la loi du 30 décembre 1913 accordera des indemnités pour charge de famille aux officiers, sous-officiers et gendarmes.

La plupart de ces associations, à l'exclusion de celles essentiellement catholiques qui ont refusé la IIIe république, puis la loi de 1905, sont plus traditionalistes que réactionnaires ; certaines s'inscrivent totalement dans le cadre républicain même celles qui donnent un ton moraliste à leurs discours ; elles sont natalistes par patriotisme car elles ont peur à juste titre de l'effondrement. Il n'aura pas lieu en 1914 ; il aura lieu en 1940.

Le déclenchement de la guerre de 1914 va leur donner raison : la publication en décembre 1914 de deux rapports sur les origines de la guerre, l'un français, l'autre allemand, pointe le rôle déterminant du déséquilibre démographique dans le conflit.

La guerre, on le sent, sera terrible ; dévoreuse d'hommes et particulièrement de familles nombreuses ; on le réalise peu aujourd'hui mais des fratries entières seront décimées.

Au sortir de la guerre, les portes paroles des associations familiales parleront des familles nombreuses sacrifiées et de dette de la nation : "la Nation leur doit son salut." (Dr Bertillon).

 

 

le square du Chanoine Violet, 72 rue du Moulin Vert (14e)

Ce jardin, ouvert en 1939, d'une surface de 3 300 m², rend hommage à l’abbé Violet (1875-1956), qui fonda les Œuvres du Moulin Vert (logements économiques, colonies de vacances, secours à l’enfance…), pour venir en aide aux personnes en difficulté dans le 14e arrondissement. Au printemps 1944, il accueillit clandestinement chez lui, rue de Gergovie, le Conseil National de la Résistance.

 

Source : http://90plan.ovh.net/~republiq/index.php?option=com_content&task=view&id=117&Itemid=53
Lien (bref historique sur le site du Moulin Vert) : http://mv-cmpp.org/cmpportail/modules/tinycontent/index.php?id=6

 

 

 

 

 

https://www.stleger.info