de Saint Léger aux Bois à La Chanvrière (1789-1799)

par Jacques BERNET

 

Issu d'une vénérable création monastique médiévale, Saint-Léger-aux-Bois était à la fin de l'Ancien Régime un gros village occupant une clairière de la forêt de Laigue et la majorité de ses 690 habitants de modestes bûcherons et/ou chanvriers, que rien ne paraissait prédisposer à faire remarquer durant la décennie révolutionnaire.

La période nous est d'ailleurs assez mal connue car cette malheureuse commune des confins du Soissonnais et du Noyonnais, située sur la ligne du front pendant la Grande Guerre, y fut détruite à 80 % et perdit presque tous ses anciens fonds d'archives municipales.

Saint-Léger-aux-Bois a pourtant défrayé la chronique révolutionnaire, avant tout dans le domaine politico-religieux, une des grandes sources de conflits de la décennie 1789-1799 : à la suite de décès, successions ou options de prêtres locaux en pleine période de profonde réforme de l'institution, la paroisse ne vit pas moins en dix ans de six prêtres - dont deux se marièrent - se succéder et officier dans son église. Le village s'est trouvé aussi confronté à la déchristianisation révolutionnaire de 1793-1794, qui s'y exprima de manière spectaculaire par le changement de nom, certes éphémère mais hautement significatif, imposé en l'an II par le District de Compiègne à la commune, qui devint pour un temps "La Chanvrière" ou "La Chanvrerie" (1), à l'instar de Saint-Crépin-aux-Bois, alors rebaptisé "La Blanchirie".

Ces péripéties souvent pittoresques sont certainement révélatrices d'une partie au moins des débats et des enjeux de cette transition majeure de notre histoire, mais elles ne sauraient toutefois occulter des questions économiques et sociales sensiblement plus vitales pour la population laborieuse, que l'on n'entrevoit cependant guère qu'en filigrane, du fait des grosses lacunes de nos sources locales : celles-ci privilégient en effet davantage le Directoire (2) par rapport aux cinq premières années décisives de la décennie, moment où se mit en place un nouveau paysage administratif déjà contemporain, et où s'opéra l'apprentissage laborieux de nos actuelles pratiques électives et démocratiques.

 

Saint-Léger-aux-Bois en 1789

Si les origines lointaines du village remontent aux rois mérovingiens, qui y possédaient un pavillon de chasse (3), sa véritable fondation est à rattacher à la concession de ce morceau du domaine royal à l'Église par le roi Capétien Philippe 1er, en 1083, pour la fondation d'un prieuré consacré à Saint-Léger.
Les religieux l'établirent auprès d'une source et furent à l'origine du défrichement de la forêt comme du peuplement rural, à partir du XIIe siècle.
Conforté dans ses possessions par le Pape Célestin III en 1190, placé sous la dépendance des moines du Francport en 1590, puis attribué en 1624 par Louis XIII à son aumônier Michel de l'Arche, le prieuré passa en janvier 1749, sous l'autorité de l'évêque de Soissons, qui en attribua les biens et revenus au séminaire diocésain, en lui adjoignant une cure et un vicariat (4).

 

 

A la fin de l'Ancien Régime, les biens de l'ancien prieuré consistaient en une maison et jardin, un moulin à eau, quelques setiers de terres, prés et arpents de bois, occupant seulement 2 % du finage paroissial (5).
L'essentiel des bois, couvrant les trois-quarts du petit terroir de Saint-Léger, faisaient en effet partie de la forêt de Laigue, massif comptant alors quelque 7000 arpents (environ 3570 ha), avant tout en taillis, avec réserve de baliveaux (6), qui relevait, comme celle de Retz, mais à la différence de la forêt royale de Cuise ou Compiègne, de l'apanage d'Orléans, attribué en 1661 par Louis XIV à son frère Philippe, puis transmis à ses héritiers jusqu'à la Révolution.
Cette vaste forêt princière, délimitée par l'Aisne au sud et l'Aronde à l'ouest, "connaissant de tous les bois ecclésiastiques et des bois des particuliers qui se trouvent en deçà de ces deux rivières qui leur ont servi de tous temps de séparation" (7), réserve de chasse seigneuriale mais aussi d'exploitation lucrative pour le bois de chauffage (8), était administrée par une maîtrise particulière des Eaux-et-Forêts spécifique, disposant d'une juridiction séparée, qui avait son siège à l'auditoire royal de Compiègne, à l'instar de la maîtrise de la forêt royale du même nom.
En 1789, la maîtrise particulière de Laigue était composée de garde-bois encadrés par quatre officiers : un noble, Louis Le Caron de Mazencourt (1747-1820), maître particulier et lieutenant des chasses, Marie-Louis-Pierre Carbon, garde-marteau, Marie-François de Salle de Crouy dit l'aîné, fils du maire de Compiègne, et Jean-Charles Delavallée de Calfeux, tous deux procureurs du Roi en la maîtrise.
En mars 1789, se présentant à eux seuls comme un des corps du Tiers Etat de la ville, ils rédigèrent leur propre cahier de doléances, un court texte au contenu très corporatif, réclamant le maintien des maîtrises et le retour du contentieux, dont les avait privés l'édit du 8 mai 1788 au profit des présidiaux (9).

 

les administrations d'ancien régime

Au plan religieux, la paroisse dépendait donc désormais de l'évêque de Soissons, présentateur de la cure, et des subdivisions de son diocèse (archidiaconé de la Rivière et doyenné de Vic-sur-Aisne). Saint-Léger appartenait aussi à l'Election et à la Généralité de Soissons, étant placé sous l'autorité de ses subdélégué et Intendant, pour tout ce qui concernait l'administration générale et la fiscalité directe. Le village était toutefois rattaché au Grenier à sel de Compiègne, percepteur de la gabelle, mais aussi au bailliage de la ville royale, pour toutes les affaires judiciaires courantes, au civil comme au criminel, appliquant la coutume de Senlis et ressortissant du Parlement de Paris en cas d'appel.
Comme le siège de la maîtrise de Laigue se trouvait également à Compiègne, on note que Saint-Léger-aux-Bois, village situé aux confins du Noyonnais et enclavé dans la forêt, se trouvait dans une situation administrative inconfortable, étant partagé au point de vue religieux, fiscal et judiciaire, entre l'influence traditionnelle de Soissons et celle croissante de Compiègne, villes qui n'étaient atteintes que par de mauvais chemins forestiers et par la voie d'eau, en l'absence de routes carrossables proches.
Les réformes révolutionnaires devaient simplifier la situation à cet égard, en rattachant la commune en 1790 au département de l'Oise et au district (puis arrondissement) de Compiègne, l'appartenance cantonale fluctuant entre Rethondes (1790-1800) puis Ribécourt (depuis 1800).

 

 

population et démographie

Les plus anciens dénombrements fiscaux remontant au début du XVIIIe siècle, alors calculés en "feux", en indiquent une bonne centaine, un chiffre stagnant entre 1709 et 1720, période de crise démographique des dernières années du règne de Louis XIV et du début de la Régence.
A partir du milieu de la décennie 1720 s'amorce le décollage de la population française qui devait caractériser le "beau XVIIIe" siècle, par l'atténuation progressive, sinon la totale disparition, des crises chroniques de surmortalité dues aux intempéries et aux mauvaises récoltes, aux épidémies et aux guerres.

 

Population de Saint-Léger au XVIIe siècle (10)

année
feux
hab.
1709
105

1713
106

1720
105
420 (?)
1724
115
340 (?)
1725
115
303 (?)
1726
111
343 (?)
...
...
...
1790
143
690
an II (1793-94)

641
an IV (1795-96)

699
1801

779

 

Saint-Léger-aux-Bois, qui avait déjà gagné une dizaine de feux en 1725 par rapport au début du siècle, s'en trouva encore augmenté d'une trentaine à l'aube de la décennie révolutionnaire, preuve de l'installation de nouveaux habitants et signe d'un réel essor économique du village, tant pour l'activité agricole et pastorale traditionnellement marginale, que pour l'exploitation forestière et surtout la culture du chanvre, spécialité de Saint-Léger jusqu'à la première moitié du XIXe siècle, comme le souligne Louis GRAVES, qui écrit à la fin des années 1830 : "Le village est célèbre dans tout le département pour sa culture du chanvre qui occupe la majorité de ses habitants, le reste étant occupé à l'exploitation de la forêt de Laigue." (11)
Il semble également que la taille moyenne des familles ait augmenté au cours du siècle, pour autant que l'on puisse accorder crédit aux chiffres d'habitants donnés avant 1790 : ils auraient presque doublé entre 1720-25 et 1790, ce qui est sans doute exagéré, mais suggère une plus grande longévité des couples et, partant, davantage d'enfants, une moindre mortalité infantile et juvénile du fait de l'amélioration des conditions d'accouchement, des progrès de l'hygiène et de l'alimentation humaine.
Passées ses premières années, la décennie révolutionnaire devait confirmer cette tendance.

 

les débuts méconnus de la Révolution à Saint-Léger-aux-Bois

En l'absence de délibérations municipales conservées dans la commune, les premières années de la Révolution restent bien mal connues à Saint-Léger, à la différence de Saint-Crépin (12).
On sait seulement l'identité des deux députés, que la communauté d'habitants de Saint-Léger élut et envoya pour la représenter, lors de l'assemblée du Tiers-Etat du bailliage secondaire de Compiègne, qui se tint dans la ville le 9 mars 1789 (13) : Pierre François WIART, désigné dans le procès-verbal comme "cultivateur", qui était aussi clerc séculier et maître d'école de la paroisse depuis 1785, puis devait être greffier municipal en 1790 (14), et Pierre RICART, dont on ignore la profession.
Les villageois n'avaient pas désigné pour les représenter François NATTIER, nommé lieutenant de justice (seigneuriale) pour la paroisse par l'économe du séminaire de Soissons en septembre 1788, mais il est difficile d'en tirer des conclusions, d'autant que nous n'avons aucune idée du contenu du cahier de doléances rédigé par les habitants et confié à leurs deux députés en mars 1789.

Sur les événements inouïs du printemps et de l'été 1789, "l'année sans pareille", on ne peut que supposer leurs répercussions au village : crise frumentaire à la "soudure" de mai-juillet, crise sociale, que l'on dut tenter d'atténuer, comme à Saint-Crépin, en employant les chômeurs aux travaux de reboisement et à la réparation des chemins (15). La nouvelle de la prise de la Bastille, puis de la nuit du 4 août, précédée de la "Grande peur", dont le Clermontois fut un des foyers majeurs et qui toucha le Noyonnais, avec l'attaque du château de Frétoy, le 27 juillet (16).

 

mise en place de la première municipalité - février 1790

Saint-Léger-aux-Bois s'est assurément doté, en août 1788, à l'instar de Saint-Crépin et de toutes les autres paroisses du royaume, d'une première assemblée municipale composée du curé membre de droit, d'un syndic, d'un greffier, et de quelques notables, simple relais administratif de l'Assemblée provinciale du " département " de Soissons chargée avant tout de veiller à la publication des édits, à la confection des rôles de taille, à la nomination des collecteurs ou à la répartition des secours publics.
Mais il fallut attendre l'effondrement brutal de l'Ancien Régime en 1789 pour que les Etats Généraux devenus Assemblée Constituante, après avoir adopté la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen le 26 août, base des principes de la future Constitution et de la "régénération" de la France, entament la refonte complète de nos institutions, dans un esprit de simplification, de rationalisation et de décentralisation conforme aux Lumières du siècle.
Au point de départ de cette reconstruction, la loi municipale de décembre 1789, qui mit en place des communes au statut uniforme, qu'il s'agît des anciennes municipalités urbaines ou des paroisses et communautés rurales, d'où la création de nos quelque 36 000 communes, directement issues pour l'essentiel des 40 000 paroisses des villes et des campagnes.
La nouvelle instance était administrée par un conseil général constitué d'officiers et de notables municipaux, au nombre variable selon la population, ayant à leur tête un maire et un procureur, tous personnages élus par leurs concitoyens actifs, domiciliés dans la commune depuis au moins un an, âgés de 21 ans et plus, de sexe masculin, et acquittant un minimum de contribution directe.

Les nouvelles municipalités furent mises en place début février 1790, le 7 à Saint-Crépin, sans doute à même époque à Saint-Léger, après l'adoption du nouveau découpage administratif de la France en départements, districts et cantons. Le département de l'Oise et Thérain, selon l'appellation initiale du ressort aux limites pratiquement inchangées depuis janvier 1790, fut divisé en neuf districts au nom de leurs villes chefs-lieux.
Par sa position excentrée, Saint-Léger-aux-Bois, limitrophe du ressort de Noyon, fut intégré au district de Compiègne, comme l'une des dix communes de l'éphémère canton de Rethondes, alors que Tracy-le-Mont, qui voulait être rattaché à Compiègne, le fut au district de Noyon et au canton d'Attichy.
Nous ignorons la composition du conseil général initial de Saint-Léger. Le premier maire connu, par un document de mai 1791, est le cultivateur Jean-Baptiste MERCIER (17) ; le second, le bûcheron Jean-Louis LOMBARE, élu en novembre 1791, reconduit en novembre 1792, toujours en fonction à l'automne 1793 quand il fut mis en cause par la municipalité de Saint-Crépin et le district de Compiègne. François NATTIER, ancien lieutenant de justice de la paroisse en 1788, est mentionné comme procureur de la commune en janvier 1793, Pierre-François WYART greffier municipal en 1791, le curé A-G. LECOEUR, officier municipal, devint officier public en novembre 1792.

 

 

conflits autour des prêtres de la paroisse - 1790-1793

Issue de l'ancien prieuré, la paroisse et cure de Saint-Léger-aux-Bois, village pauvre, n'était pas une place négligeable pour un prêtre, étant dotée d'un bénéfice confortable et bien pourvue en personnel, puisque le curé était aidé par un vicaire et un clerc séculier faisant aussi fonction de maître d'école.
Le curé Nicolas DIDELET (1712-1789) devait y rester en fonction plus de 30 ans : mentionné dans le registre paroissial dès 1769, il présida à la bénédiction des quatre nouvelles cloches de l'église, le 3 juillet 1769. Le poste de vicaire, généralement occupé par des prêtres en début de carrière, offrait moins de stabilité - on ne note pas moins de dix titulaires successifs de 1769 à septembre 1789 (18), moment de l'arrivée de Nicolas-Marie BARBIER (1765-1845), le dernier en date, qui dut remplacer au pied levé le curé DIDELET âgé et malade, décédé le 6 novembre 1789 à 77 ans. Ses obsèques solennelles conduites par le doyen rural Pierre-Jean BRUNAT, curé de Saint-Crépin d'Offémont, rassemblèrent huit prêtres du voisinage, venus de Choisy-au-Bac, Montmacq, Thourotte, Tracy-le-Mont, Tracy-le-Val, Villers-sur-Coudun (19), témoignant de son ancienneté et de sa notoriété, mais ouvrant une difficile succession, en pleine période de réforme de l'Église.

Le vicaire BARBIER desservit seul la paroisse de Saint-Léger, depuis la maladie et le décès du curé DIDELET, jusqu'en juillet 1790, date où le remplacement du curé provoqua un vif conflit d'autorité entre la municipalité de Saint-Léger et le District de Compiègne.
Ce dernier dénonça en effet, dans sa délibération du 21 juillet 1790 "(…) le procès verbal de la municipalité de Saint-Léger portant opposition à la prise de la cure du lieu par un jeune ecclésiastique résignataire du curé de Montmacq, lequel l'était lui-même du dernier curé de ladite paroisse de Saint-Léger, portant aussi nomination à la dite cure du vicaire actuel de la paroisse (…) Il sera mandé à ladite municipalité de ne procéder à aucune nomination, qu'elle serait attentatoire aux décrets." (20)

La "résignation" ou abandon d'un bénéfice ecclésiastique telle une cure, en faveur d'une personne désignée (parent ou relation), selon une pratique courante sous l'Ancien Régime, était légitimement contestée, car signifiant souvent le népotisme.
La municipalité de Saint-Léger n'en commettait pas moins un abus de pouvoir aux yeux du District, en désignant elle-même le nouveau curé, ce qui était jusque là l'affaire du collateur de la cure (ici l'évêque de Soissons), et que la Constitution civile du Clergé, adoptée par la Constituante le 12 juillet et promulguée le 24 août 1790, devait bientôt transférer aux assemblées de districts, où les citoyens actifs éliraient désormais les nouveaux curés, comme tous les "fonctionnaires publics". La municipalité de Saint-Léger dut ainsi faire machine arrière et accepter la nomination de Louis Désiré DAVRICOURT (21), résignataire de Jean-Baptiste François LEFEVRE, curé de Montmacq, qui devait officier comme curé de la paroisse à partir de la fin juillet 1790, BARBIER reprenant sa fonction de vicaire.
Tandis que la municipalité de Saint-Léger se faisait une nouvelle fois épingler par le District, le 24 décembre 1790, pour "dilapidation", ayant enlevé sans son autorisation des ornements de l'église "sous prétexte que M. l'évêque de Soissons leur en avait donné la permission" (22), le nouveau curé avait su se faire apprécier de ses paroissiens, qui devaient regretter son remplacement et son départ au printemps 1791, dans le contexte d'un nouveau conflit politico-religieux dépassant cette fois le cadre villageois, l'affaire des serments à la Constitution civile du Clergé.

 

le prieuré et église paroissiale de Saint-Léger, avant 1914

 

la question du serment constitutionnel à Saint-Léger

A la suite de l'opposition de la majorité des évêques français à la Constitution civile du Clergé, la Constituante imposa, en novembre 1790, à tous les prêtres séculiers conservés comme "fonctionnaires publics", un serment constitutionnel, qui devait envenimer les choses en divisant profondément le bas clergé et les fidèles, avant même la condamnation des réformes de l'Eglise par le Pape qui n'avait pas été consulté, en mars-avril 1791.
Si trois-quarts des curés et vicaires du district de Compiègne acceptèrent de prêter le serment, il y eut néanmoins quelques noyaux de prêtres à le refuser ou émettre des restrictions, qui les firent considérer comme des "réfractaires", réputés démissionnaires et à remplacer.
Cette résistance concertée de certains prêtres, toucha plus spécialement la partie oisienne du diocèse de Soissons, sous l'influence du curé Jean GRAVIER de Jaulzy, un proche de Mgr De BOURDEILLES (23), qui rallia dans son opposition à la Constitution civile du Clergé ses confrères de Couloisy, Croutoy, Courtieux, Hautefontaine, mais aussi de Montmacq et de Saint-Léger-aux-Bois.

En fait, le curé et le vicaire de Saint-Léger prêtèrent bien le fameux serment à l'issue de la messe dominicale du 9 janvier 1791, du moins la municipalité ne fit-elle pas alors état des restrictions dont l'aurait assorti le premier (et non le second) ; mais le 22 janvier, le District de Compiègne reçut la rétractation formelle de son serment par DAVRICOURT, laquelle fut envoyée au Département et le fit bientôt considérer comme un prêtre "réfractaire".
Sa cure, déclarée vacante, fut donc proposée, à l'instar de 10 autres du ressort, à l'élection des citoyens actifs réunis en assemblée de district, le 8 mai à Compiègne. Et c'est un prêtre compiègnois qui fut élu pour Saint-Léger: Jean-Marie Nicolas MAURICE, né en 1760, vicaire chapelain de la collégiale Saint-Clément puis prêtre habitué en la paroisse Saint-Antoine de Compiègne, obtint ainsi sa première cure, dont il prit possession le dimanche suivant 15 mal.
Selon son témoignage adressé au District, il aurait reçu un bon accueil de la part de la municipalité et de la population de Saint-Léger, en dépit de l'émotion et des regrets exprimés, du fait de l'estime où était tenu son prédécesseur (24).

 

Témoignage sur sa réception à Saint-Léger, le 15 mai 1791
lettre du curé J.M.N. MAURICE au District, A.C. Compiègne, 5 PI

"Saint-Léger au bois, ce 16 mai 1791

Messieurs,

J'ai pris possession hier quinze du mois de mai de la cure de Saint Léger au bois ; et c'est avec une véritable satisfaction que je vous fais part de la manière dont je fus reçu par le peuple le plus doux et le plus honnête que je connaisse.

Arrivé à Talpier, hameau dépendant de ma paroisse, j'appris que le pasteur non assermenté que j' allois remplacer chantoit la messe paroissiale. Il falloit attendre. Je profitai de cet interval pour faire passer à la municipalité la lettre que vous m'aviez confiée ; mais l'injonction de me recevoir convenablement étoit inutile, et l'ordre des cérémonies était bien disposé depuis longtemps. J'entrai dans les rangs de la garde nationale et Mr le Commandant, après un compliment honnête, ordonna une salve générale, et l'on se mit en marche vers l'église.
Chemin faisant, j'examinais la phisionomie de ces bonnes gens qui circuloient en foule autour de moi, et tous me parurent tels que le pouvais les désirer ; ni gais ni tristes. Ils perdoient un curé digne d'estime, et leurs regards attendris sembloient me dire : vous réparerez la perte que nous faisons. Au reste la situation pénible où leur âme se trouvoit, n'a pas peu contribué à rendre la cérémonie de l'inauguration plus touchante et plus religieuse. Lorsque nous fûmes arrivés à l'église, je présentai ma lettre d'institution aux membres présents de la municipalité qui la remit avec la vôtre à leur greffier pour en faire lecture, et je prêtai ensuite dans la forme prescrite le serment civique, après un discours analogue à la circonstance ; n'oubliant pas surtout de faire l'éloge de l'ancien curé, et moins encore de déclarer que si sa conduite religieuse devait être le modèle de la mienne, je ne partagerais jamais ses sentiments sur la Constitution civile du Royaume.

Voilà, Messieurs, à peu près le résultat de la cérémonie ; car je crois pouvoir passer sous silence et l'office que j'ai célébré, et l'argent que j'ai distribué, et les santés qui m'ont été portées, mais inutiles à raconter."

 

Le nouveau curé constitutionnel, "intrus" pour les partisans de son prédécesseur, ne devait pourtant pas faire une longue carrière à Saint-Léger, d'où il démissionna le 2 décembre 1791, après son élection comme curé de la paroisse Saint-Thomas de Crépy-en-Valois, poste urbain plus prestigieux et lucratif, convenant davantage aux ambitions de ce prêtre "patriote", paraissant quelque peu arriviste (25).

La cure de Saint-Léger-aux-Bois donna donc lieu à une nouvelle élection, le 18 décembre 1791 (26). Le choix des électeurs compiègnois se porta sur Antoine-Gabriel LECOEUR, né en 1767 à Tracy-le-Val, fils d'un mulquinier (artisan qui fabriquait les étoffes de lin). Il n'était pas inconnu à Saint-Léger, où le vicaire Jean-Louis CARRÉ l'avait accueilli comme pensionnaire pour sa formation en 1784 (27). Ordonné prêtre par l'évêque constitutionnel de l'Oise MASSIEU le 24 septembre 1791, il avait prêté le serment comme vicaire à Tracy-le-Mont, le 2 octobre 1791.
Le second curé constitutionnel de Saint-Léger s'investit dans ses fonctions sacerdotales mais aussi dans la vie municipale, élu officier municipal puis "officier public", lors du transfert de l'état civil de la paroisse à la commune, le 13 novembre 1792, un poste conservé jusqu'en l'an III (1795).
Menacé d'arrestation fin octobre 1793 - on ne sait si c'était comme membre de la municipalité contestée par le District ou pour son refus de renoncer à ses fonctions sacerdotales - il abdiqua son état de prêtre auprès du District, le 21 novembre 1793, obtint un certificat de civisme, le 29 floréal an II (19 mai 1794), et une pension de 400 livres en juillet 1794 (28).
Devenu meunier au village, il y épousa, le 1er pluviôse an III (20 janvier 1795), Marie-Thérèse DELORME, dont il eut deux filles. Sous le Directoire, on le retrouve comme adjoint municipal et percepteur et il put régulariser sa situation sous le Consulat par un mariage religieux en mai 1803, après le Concordat (29). La seule déclaration de culte à Saint-Léger, au moment du retour du catholicisme, mais apparemment sans suite, émana de l'ancien vicaire Antoine-Marc CHARLOT, le 20 thermidor an III (7 août 1795) (30).

 

Les prêtres à Saint-Léger-aux-Bois sous la Révolution

Nicolas DIDELET (1712 - 6 novembre 1789)

Curé de Saint-Léger-aux-Bois depuis au moins 1769, il présida à la bénédiction des quatre nouvelles cloches de la paroisse, le 6 juillet 1769.
Absent de l'Assemblée générale du Clergé pour les États Généraux à Senlis en mars 1789, suppléé à partir de mai 1789 par Thomas, ancien curé de Choisy-au-Bac et Lefèvre, curé de Montmacq son résignataire, ainsi que par les vicaires Lobbé, Legras puis Barbier.
Décédé le 6 novembre 1789, âgé de 77 ans, enterré en présence de Pierre-Jean Brunat, curé de Saint-Crépin d'Offémont, doyen rural de Vic-sur-Aisne, Henri Louis Boutin, curé de Choisy-au-Bac, Louis François, curé de Tracy-le-Mont, Jean Baptiste Lefèvre, curé de Montmacq, Jean-Louis Lobbé. vicaire de Tracy-le-Mont, Antoine Legrand, curé de Villers-sur-Coudun, François Féron, curé de Tracy-le-Val, Adrien-Charles Barbillon, curé de Thourotte, Nicolas-Marie Barbier, vicaire de Saint-Léger.

Nicolas-Marie BARBIER (24 juillet 1765 - 17 mai 1845)

Vicaire de Saint-Léger-aux-Bois, à partir de septembre 1789, il suppléa le curé Didelet, malade, et fit fonction de desservant de la paroisse après son décès jusqu'en juillet 1790, à l'arrivée de Louis Désiré Davricourt qui obtint la cure, malgré le soutien de la municipalité de Saint-Léger en faveur du vicaire desservant.
Il prêta le serment à la Constitution civile du Clergé le 9 janvier 1791 avec le curé, mais sans se rétracter. L'assemblée du 8 mai 1791 lui ayant préféré le Compiègnois Maurice, il resta vicaire de la paroisse jusqu'en novembre 1791, cessant ses fonctions après l'élection de LECOEUR.
Devenu instituteur puis cordonnier, il épousa au village, le 20 messidor an II (8 juillet 1794), Marie-Magdeleine BRIDOUX, dont il eut un fils le 7 germinal an V (27 mars 1797) ; celle-ci devait décéder le 17 septembre 1809. Il prêta, le 15 brumaire an VII (6 novembre 1798), le "serment de haine à la royauté et à l'anarchie", comme pensionné ecclésiastique. Décédé à Saint-Léger le 17 mai 1845.

Louis-Désiré DAVRICOURT

Ephémère curé de Saint-Léger-aux-Bois, de juillet 1790 à mai 1791. Résignataire du curé Lefèvre de Montmacq, sa nomination fut contestée par la municipalité de Saint-Léger, qui lui préférait le vicaire Barbier, mais il reçut alors l'appui du District de Compiègne.
Rétractant le 22 janvier le serment à la Constitution civile du Clergé prêté le 9 janvier avec le vicaire, il fut déclaré "réfractaire" et démissionnaire, mais resta en fonction jusqu'au 15 mai, disant une dernière messe juste avant l'arrivée de son remplaçant, qui témoigna auprès du District de l'estime de la municipalité et de la population à l'égard de ce jeune prêtre qui avait su se faire accepter.
La Municipalité de Saint-Léger devait le déclarer "émigré" après le 15 mai 1791, le 25 prairial an II (13 juin 1794).

Jean-Marie-Nicolas MAURICE (29 septembre 1760 - 18??)

Né à Compiègne, vicaire-chapelain de la collégiale Saint-Clément (1785-1790), prêtre habitué de Saint-Antoine de Compiègne (octobre 1785 - mars 1791), il y prêta le serment à la Constitution civile du Clergé, le 9 janvier 1791.
Élu par l'unanimité des 47 électeurs de Compiègne curé le Saint-Léger-aux-Bois le 8 mai 1791, il prit possession de la cure le 15 mai, se disant bien accueilli, fit l'inventaire de l'église le 17 octobre, demandant des ornements au District. Élu curé de Saint-Thomas de Crépy-en-Valois le 30 octobre 1791, il en prit possession le 27 novembre, annonçant sa démission de Saint-Léger le 2 décembre.
Patriote prononcé, greffier municipal, un des fondateurs de la Société populaire de Crépy en septembre 1793, qui fit imprimer son discours pour la bénédiction du drapeau de la Garde nationale, il abdiqua devant elle ses fonctions sacerdotales, le 26 novembre 1793, se proposant comme instituteur de morale. Marié le 25 octobre 1802 avec Marguerite-Elisabeth Gatté, fille d'épicier, demanda en vain sa réconciliation au cardinal-légat du Pape de 1803 à 1805.

Antoine-Gabriel LECOEUR (28 novembre 1767 - 27 mai 1830)

Né à Tracy-le-Val, fils d'un mulquinier, pensionnaire du vicaire Jean-Louis Carré à Saint-Léger en juin 1784, ordonné prêtre par l'évêque Massieu le 24 septembre 1791, vicaire à Tracy-le-Mont, prêta le serment le 2 octobre 1791.
Élu curé de Saint-Léger-aux-Bois le 18 décembre 1791 à Compiègne, au traitement annuel de 1200 livres. Elu officier municipal et officier public, de novembre 1792 à l'an III.
Il abdiqua le 21 novembre 1793 et remit ses lettres de prêtrise au District, bénéficia d'un certificat de civisme le 29 floréal an II. Devenu meunier, il épousa le 1er pluviôse an III Marie-Thérèse Delorme, dont il eut deux filles.
Adjoint municipal et percepteur en fructidor an V (août 1797), sa situation fut régularisée sous le Consulat par un mariage religieux, en mai 1803, après le Concordat.
Perdant sa femme en pluviôse an XIII (février 1805), il n'obtint pas du Pape l'autorisation de se remarier religieusement et épousa civilement, le 16 mai 1810 à Saint-Léger, Marie Thérèse Philippine Dumont, dont il eut quatre enfants, dont un fils, Joseph Benjamin, qui devint prêtre, notamment curé de Saintines ; mais, mal vu des habitants, ce dernier devait quitter cette paroisse et finir ses jours à Saint-Léger.
A.G. Lecoeur décéda à Saint-Léger le 27 mai 1830.

Antoine-Marc CHARLOT (1752 - 1808)

Né à Choisy-au-Bac le 24 avril 1752. Vicaire à Saint-Léger-aux-Bois en 1778. Curé de Coeuvres (Aisne) en 1790. Assermenté en 1791 mais non abdicataire en l'an II.
Desservant d'oratoires privés à Soissons en 1795, fit une déclaration de culte à Saint-Léger le 20 thermidor an III (7 août 1795), apparemment sans suite. Déporté en ventôse an VII. Desservant d'Ambleny (Aisne) (1804) et Saint-Bandry (1805). Décédé à Ambleny, le 17 janvier 1808.

 

Saint-Léger-aux-Bois sous la Convention - 1792-1795

Pour autant que l'on connaisse les péripéties de son histoire en cette période, la commune y paraît plutôt mal notée par le District de Compiègne et de surcroît en conflit avec sa voisine, Saint-Crépin-aux-Bois, laquelle passait pour être davantage attachée à la Révolution.
Ainsi, le 22 septembre 1793, la municipalité de Saint-Crépin accusa le maire de Saint-Léger, le bûcheron Jean-Louis LOMBARE "(…) de propos incendiaires contre la commune dudit Saint-Crépin, l'apostrophant et la calomniant au point de lui porter le blâme qu'il existerait une liste qui constaterait que les citoyens de cette commune ont fait une contribution de 10 sols par chaque ménage pour faire passer aux ennemis de la République" (31). Cette affaire donna lieu à l'interpellation de LOMBARE, traduit devant la justice de paix du canton de Rethondes, et dénoncé auprès des autorités du District, mais on en ignore les suites et le maire devait rester en poste jusqu'en l'an II (32).

Le 28 octobre 1793, le substitut du procureur-syndic du District, le notaire Jean-Baptiste SIVÉ (33), ténor jacobin de Compiègne, vint à Saint-Léger faire appliquer les premiers arrêtés déchristianisateurs des représentants en mission LEVASSEUR et DUMONT, portant saisie des cuivres des églises et interdisant la messe les ci-devant dimanches et fêtes, en application du nouveau calendrier révolutionnaire, qui remplaçait la semaine par la décade et le dimanche par le décadi.
SIVÉ reprocha à la municipalité de n'avoir pas appliqué les arrêtés, le curé, officier municipal et public, ayant dit la messe le dimanche précédent et étant de ce fait menacé d'arrestation.
L'émissaire du District fit en plus état d'une plainte, parvenue le 24 octobre à Compiègne (on ignore si elle émanait de Saint-Léger ou de Saint-Crépin, contre le maire LOMBARE "qui n'affiche aucun décret depuis février 1793 et fraude dans l'achat des biens nationaux" (34).
Cette intervention semble avoir incité le curé LECOEUR, échaudé, à abdiquer ses fonctions sacerdotales moins d'un mois plus tard : il en envoya l'acte écrit au District, le 21 novembre 1793, accompagné de ses lettres de prêtrise (35). Cette renonciation était certes le fruit d'une contrainte extérieure, mais, à la différence de la majorité de ses confrères, LECOEUR persistant dans cette voie, ne reprit pas le culte après la fin de la Terreur et il imita, en janvier 1795, l'ex-vicaire BARBIER qui s'était marié dès juillet 1794 : il s'agissait là de jeunes prêtres de moins de 30 ans, qui ne résistèrent pas à la pression des événements.

C'est aussi dans ce climat de coercition que fut imposée la déchristianisation au village. Le curé ayant assez tôt renoncé à ses fonctions, l'église se trouva fermée au culte catholique, dont l'exercice public devait être suspendu pendant de longs mois, en l'an II-an III (1793-1795). Sa transformation en temple de la Raison (et un peu plus tard de l'Etre Suprême) est attestée par le District, début mai 1794 (36), mais elle devait être antérieure, puisque l'agent national Bertrand ne trouva rien à redire à cet égard, lors de son passage en tournée d'inspection à Saint-Léger, le 7 floréal an II (28 avril 1794), où il maintint en place le maire LOMBARE et le procureur NATTIEZ (37).
On peut toutefois douter de l'enthousiasme de la commune pour les nouveaux cultes révolutionnaires. Il fallut attendre floréal an II pour que "l'on commence à s'accoutumer aux décadis", selon le District, et la seule fête civique mentionnée dans la correspondance de l'agent national de la commune au District fut celle du 10 août 1794, second anniversaire de la chute de la monarchie. Dès brumaire an III (octobre 1794), celui-ci note la "non observance des décadis", même si la "lecture de lois" par la municipalité y est déclarée "décente".

Le changement révolutionnaire du nom de la commune, initiative justifiée par l'abandon de toute référence monarchique, féodale ou catholique dans la toponymie, n'a pas été non plus le fait de la municipalité de Saint-Léger, à la différence de Saint-Crépin, mais bien imposé par le District.
La municipalité de Saint-Crépin, au lendemain il est vrai du passage de ROGER, commissaire du District venu saisir l'argenterie et les cuivres de l'église, proposa, le 7 frimaire (17 novembre 1793), de changer un nom "(…) qui nous rappelle l'ancien préjugé, et la Commune désirant de substituer un nom révolutionnaire en reconnaissance des bienfaits que la révolution procure et sur la proposition d'un membre, il a été arrêté à l'unanimité que désormais cette commune sera nommée Brumaire-aux-Bois, qui rappelle en même temps les droits libres de l'homme et pour témoigner du désir de l'éloignement pour le fanatisme superstitieux qui nous ont enchaîné jusqu'à ce jour, délibérons en outre qu'extrait de la présente délibération sera présenté à l'administration du district de Compiègne pour l'inviter à donner son approbation et faire connaître notre dite commune comme telle (…)" (38).
L'administration du District de Compiègne devait d'ailleurs imposer un autre nom à Saint-Crépin, en même temps qu'à Saint-Léger, par une série collective de changements de toponymes, proposée le 25 frimaire et confirmée le 4 nivôse an II (15 et 24 décembre 1793) (39).

 

Changements de toponymes dans le district de Compiègne
4 nivôse an II (24 décembre 1793)

"Vu la lettre du Département du 1er de ce mois, portant que le Ministre de l'Intérieur, dans le plus bref délai, demande une liste exacte des noms des municipalités et des changements jugés nécessaires, vu la nomenclature ci-jointe, le conseil, oui l'agent national, après avoir fait sur ladite nomenclature les corrections typographiques, estime qu'il y a eu lieu de faire pour quelques communes les changements suivants :

anciens noms
noms proposés
Estrées-Saint-Denis
Estrées-Franciade
La Croix Saint-Ouen
Silvie (du mot Silva)
Saint-Sauveur
Sauveur
Saint-Etienne
(La) Queue du Bois
Saint-Jean
(La) Solitude
Saint-Crépin
La Blanchirie
Saint-Léger
(La) Chanvrière"

 

Saint-Léger-aux-Bois fut ainsi rebaptisé La Chanvrière (parfois aussi écrit La Chanvrerie), un toponyme rappelant certes la vocation première de la commune en matière de culture du chanvre, mais qui ne fut guère employé que dans les textes administratifs jusque sous le Directoire et eut peu de succès parmi les habitants.
Ces derniers étaient sans doute bien davantage préoccupés par les soucis et besoins de la vie quotidienne, les jeunes volontaires ou requis partis au front, en une période de guerre et de pénurie, surtout dans une commune pauvre, loin d'être autosuffisante pour les subsistances.
La forêt de Laigue offrait néanmoins à cet égard des ressources renouvelées, d'autant qu'elle était moins surveillée que sous l'Ancien Régime : il s'ensuivit un véritable saccage des bois par le ramassage excessif, les coupes et pacages illégaux, au point qu'il fallut envoyer, à l'automne 1794, une force armée spécifique pour surveiller et protéger la forêt. On employa ainsi 18 cavaliers montés, dont le séjour à Saint-Léger nous est attesté par une note de frais de 36 livres 15 s. envoyée à l'administration du District par le cabaretier GRUGNY, le 5 frimaire an III (24 novembre 1794). (40)

 

Saint-Léger-aux-Bois et le Directoire - 1795-1799

Après l'adoption par referendum de la Constitution de l'an III en août 1795, la Convention, assemblée provisoire d'exception qui avait duré plus de trois ans, put se séparer pour faire place au régime républicain modéré mais instable du Directoire.
Il comportait pourtant un heureux effort de simplification de l'administration territoriale, qui fut réduite, avec la disparition des districts, aux deux seuls échelons du département et des municipalités, urbaines ou cantonales en milieu rural.
Le 23 brumaire an IV (14 novembre 1795) était formée la municipalité cantonale de Rethondes, où Saint-Léger-aux-Bois-La Chanvrière fut représenté, à l'instar de chacune des 9 autres communes du ressort, par un agent municipal et son adjoint.
A la tête de la nouvelle instance, Pierre André LEBEL, président, Charles Eustache LEFEBVRE, de Rethondes, secrétaire, élus par l'assemblée, LEBAILLY, de Berneuil, nommé commissaire national du gouvernement auprès l'administration cantonale. (41) Parmi les élus municipaux identifiés pour Saint-Léger, de 1795 à 1800, on note les noms de LECLÉRE, probable agent en brumaire an IV, l'ex-curé Antoine-Gabriel LECOEUR, adjoint en fructidor an V (août 1797), remplacé après le coup d'Etat du 18 fructidor par Louis MOGNIOLLE, en vendémiaire an VI, et Jean-Marie FERTE, agent municipal en germinal an VI (avril 1798).

Le premier Directoire (1795-1797) fut marqué à la fois par une détente politique et religieuse, qui devait profiter aux royalistes et aux catholiques lors des scrutins législatifs d'avril 1797, et une crise financière, économique et sociale prolongeant et aggravant celle de l'an III.
L'hyperinflation, consécutive à la chute de l'assignat et de son éphémère successeur le mandat territorial, conduisit bientôt à la suppression du papier monnaie, d'où la pénurie de moyens monétaires et la paralysie des échanges. S'ajoutèrent des hivers rudes et des récoltes médiocres, une pénurie de bras et de chevaux pour l'agriculture, du fait de la prolongation de la guerre.
Sollicité pour l'approvisionnement du marché de Compiègne, le canton de Rethondes protesta en frimaire an IV (décembre 1795) contre les réquisitions de grains "vu le mauvais terrain et la petite récolte que l'on a faite en bled cette année, attendu que la majeure partie des territoires dudit canton sont portées en chanvrières, prez, bois, rivières, larris, savarts et la forest de Laigue qui en mange beaucoup" - une description qui s'appliquait particulièrement à Saint-Léger - brossant un tableau alarmant de la situation sociale en sa pétition du 20 frimaire (11 décembre) : "Les choses prennent une tournure désespérante pour quiconque aime la République, nous ne voyons pas sans alarmes que le désespoir plane sur la classe nombreuse des individus de ce canton qui n'ont d'autres ressources que les travaux pénibles de bocquillons ; ils touchent au moment d'avoir consommé ce qu'ils ont gagné de bleds par leur moisson et déjà beaucoup sont aux expédients pour s'en procurer (…) " (repoussés des marchés urbains, ils essuient aussi le refus des cultivateurs de leur vendre du grain et d'accepter les assignats) " (…) alors que les granges sont encore aux 2/3 pleines au moins " (…) " tout annonce contre ces derniers des troubles dont l'ordre public peut être ébranlé ; les relations que nous avons de nos communes respectives nous mettent à même d'en juger : veuillez donc, citoyens, nous indiquer promptement ce que nous devons faire pour éviter ces événements " (…) "Le besoin qu'ils ont en bleds n'est point factice, non plus que tous les détours que montrent continuellement les cultivateurs pour se soustraire aux fournitures qu'on leur demande" (…) "Sur la communes du canton, 6 tiennent à la forêt de Laigue et 2 à celle de Compiègne, de manière que nos ressources en tous genres sont presque nulles, excepté trois ou quatre cultivateurs qui ne peuvent pas suffire aux consommations de leurs communes (…)"

L'été suivant, huit communes du canton, dont Saint-Léger, furent touchées par la grêle du 30 messidor (18 juillet 1796), qui fit de gros dégâts dans les récoltes.
Les bois étaient une ressource mais aussi un lieu d'insécurité. Le 28 brumaire an V (18 novembre 1796), on dénonça des "gens sans aveu, notamment dans le parc d' Offémont et par suite dans la forêt de Laigue, lesquels ont été mis en fuite " (…) "une menace pour la sécurité publique". A l'approche de l'hiver, on entreprit de chasser et détruire les loups en forêt de Laigue, en organisant des battues au fusil de six citoyens encadrés par les gardes chasses et le garde général de la forêt, LHOSTE, de Saint-Crépin, "dès qu'il paraîtrait une bonne neige", le rendez-vous étant pris au carrefour du Puits d'Orléans (20 frimaire an V - 10 décembre 1796).
Les années suivantes, de meilleures récoltes permirent de redresser la situation alimentaire, même si le canton restait déficitaire en grains et largement tributaire de l'extérieur.

On peut se faire une idée de la part relative de Saint-Léger dans la production agricole du canton grâce au tableau des réquisitions opérées en faveur du magasin militaire de Compiègne, au titre des contributions de l'an VII, que l'on acquittait alors en nature :

 

équipement des conscrits du canton de Rethondes en l'an VII (1799)

Les 6 conscrits de Saint-Léger-aux-Bois étaient :

  • Jean-Baptiste FAVRIAUX (1777-1863)
  • Jacques DELORME (1776-1854)
  • Pierre HUE (1777-1832)
  • Jacques LACROIX (né en 1777)
  • Jean-Christosome LARDOT (né en 1777)
  • François-Casimir FRANÇOIS (né en 1776).

 

Répartition de la réquisition pour les contributions,
dans le canton de Rethondes (26 thermidor an VII - 14 juillet 1799)

bleds (qtx)
seigle (qtx)
foin (bottes)
avoine (sacs)
Rethondes
9
3
25
4
Berneuil
19,5
6,5
20
9
Couloisy
4
1,5
15
3
Jaulzy
21,5
7
10
4
Trosly-Breuil
9
3
20
5
Saint-Crépin
21
7
30
9
Saint-Léger
6
2
20
4
Montmacq
4,5
1,5
20
3
Plessis-Brion
6
2
20
4
Choisy-au-Bac
12
4
20
5
Total
112,5
37,5
200
50

 

La répartition des 112,5 quintaux de bleds froment, 37,5 de seigle, 200 bottes de foins et 50 sacs d'avoine pour l'ensemble du ressort, témoigne du fort déficit en grains de Saint-Léger (6 quintaux de froment et 2 de seigle), alors que les chiffres sont dans la moyenne pour le foin et l'avoine.

Nous n'avons pas d'indication sur le retour de la vie religieuse dans la paroisse avant le Concordat, en l'absence de déclaration de culte catholique postérieure à celle d'Antoine-Marc CHARLOT en août 1795, apparemment sans suite.
Le serment dit de "haine à la royauté et à l'anarchie" a été prêtés par A.G. LECOEUR, le 15 fructidor an VI (1er septembre 1798) et N .M. BARBIER le 15 brumaire an VII (6 novembre 1798), comme simples pensionnés ecclésiastiques, car mariés en l'an II et l'an III, devenus pères de famille sous le Directoire, ni l'un ni l'autre ne pouvait reprendre le culte au village.
Tout en tolérant le retour d'une certaine pratique catholique semi-privée, dans le cadre d'une rigoureuse séparation de l'Eglise et de l'Etat, le régime s'efforça de promouvoir les cultes civiques républicains et d'imposer le calendrier révolutionnaire, surtout après le coup d'Etat antiroyaliste du 18 fructidor an V (4 septembre 1797).

Les fêtes civiques se multiplièrent et le culte décadaire fut rétabli au chef-lieu de canton. On commémorait les grandes dates de la Révolution (21 janvier, 14 juillet, 9-10 thermidor, 10 août, 22 septembre), mais aussi l'agriculture, la jeunesse, les époux, les vieillards, la souveraineté du peuple, les victoires de la République…
En l'an VI et l'an VII, les fêtes républicaines prirent un tour de plus en plus martial et national : pompe funèbre du général Hoche, le 30 vendémiaire an VI (21 octobre 1797), célébration de la paix de Campo-Formio avec l'Autriche, le 30 nivôse an VI (19 janvier 1798), commémoration de l'assassinat de la délégation française à Rastatt, le 20 prairial an VII (8 juin 1799), où l'on s'écria "vengeance, vengeance, vengeance".

A partir de l'an VII (septembre 1798), le culte décadaire fut réactivé, en faisant de ce seul jour de repos autorisé celui des mariages et de la lecture des lois au temple du chef-lieu, les cérémonies catholiques étant même proscrites les ci-devant dimanches et fêtes. Mais le calendrier révolutionnaire se heurta à non moins de résistances qu'en l'an II, ce dont témoigne cette délibération municipale du 1er vendémiaire an VII (22 septembre 1798) : "L'administration municipale du canton de Rethondes, informée que dans la majorité des communes de son ressort les décades ne sont observées chez les cultivateurs qu'au détriment de l'agriculture, que leurs voituriers vulgairement appelés chartiers ont formé entre eux une espèce de coalition pour exiger de ceux qui les emploient que, malgré ces jours consacrés au repos par la loi du 13 fructidor, ils chômaient encore les ci-devant dimanches et fêtes, que depuis même plusieurs d'entre eux ont osé proposer leur compte si on exigeait d'eux qu'ils travaillassent ces mêmes jours, considérant que si un semblable désordre pouvait être toléré plus longtemps il nuiroit à l'agriculture et seroit préjudiciable aux intérêts des cultivateurs, considérant qu'une pareille coalition ne peut tirer sa force que de gens malfaisants ennemis de la République qui ne cherchent qu'à paraliser les institutions républicaines, considérant que la loy du 17 thermidor, en imposant aux Français de se reposer les jours de décade et fête nationale, n'entend point consacrer trois jours de repos de plus par mois, mais au contraire que ceux exceptés, tous les autres doivent être employés au travail, notamment par les employés à l'agriculture, (…) arrête que toutes personnes gagées employées à la culture des terres qui, par effet de la ligue dont il a été fait mention cy-dessus, refuseront de travailler les jours de cy-devant fêtes et dimanches ou demanderont leur compte au cultivateur qui voudra les faire travailler, seront à la diligence du commissaire du pouvoir exécutif près ce canton traduits au tribunal de police correctionnelle pour être poursuivis et condamnés suivant la rigueur des lois " (…) " sur l'observation de plusieurs cultivateurs que 9 jours consécutifs de travail sont un terme trop long pour le repos des hommes et des chevaux, arrêtons en outre qu'il leur sera fait une invitation de donner l'après-midi de chaque demi-décade aux citoyens employés à leur service pour se reposer".

A l'impopularité des décades devait bientôt s'ajouter celle de la conscription, mise en place par la loi Jourdan-Delbrel du 5 septembre 1798, qui s'appliqua dans l'Oise par les trois levées successives du 3 vendémiaire an VII (24 septembre 1798), du 28 germinal (17 avril 1799) et du 10 messidor (28 juin 1799), portant respectivement sur 2367, 1922 et 2103 hommes (42).
A Saint-Léger-aux-Bois, les levées de l'an VII se traduisirent par le départ de 6 conscrits, dont les noms ont pu être identifiés (43) : une nouvelle saignée dans la jeunesse, qui devait susciter de l'insoumission et des désertions.

 

conclusion

Le 5 frimaire an VIII (4 décembre 1799), l'ensemble des "fonctionnaires publics" et de la municipalité du canton de Rethondes prêtèrent un nouveau serment de fidélité "à la République, une et indivisible fondée sur l'égalité, la liberté et le système représentatif , signifiant leur ralliement unanime au Consulat provisoire que venait de mettre en place le général Bonaparte, au lendemain de son coup d'Etat militaire des 17-18 brumaire an VIII (6-7 novembre 1799).
Le 5 pluviôse suivant (25 janvier 1800), les mêmes élus, fonctionnaires ou pensionnés (parmi lesquels on note les signatures de l'instituteur MOURET et de N.M. BARBIER pour Saint-Léger) prêtèrent serment à la Constitution de l'an VIII, établissant le régime autoritaire du Consulat, qui conservait certes la République, mais devait apparaître rétrospectivement comme l'antichambre de l'Empire. C'est pourquoi on a coutume de tourner la page de la décennie révolutionnaire avec l'arrivée au pouvoir de Bonaparte, fils de la Révolution mais aussi son fossoyeur, effectivement perçu par les contemporains comme l'homme providentiel seul capable de rétablir l'ordre et la stabilité, en attendant la paix victorieuse et le retour de la prospérité.

La commune de Saint-Léger-aux-Bois, désormais rattachée au canton de Ribécourt, retrouva définitivement son nom en 1800, un conseil municipal, un maire et des adjoints, non plus ou pas encore élus, mais nommés par le sous-préfet de l'arrondissement de Compiègne, au terme d'une forte décennie, fertile en événements et source de changements au village, pour les uns superficiels et éphémères comme celui de son nom, pour les autres plus essentiels et irréversibles.

 

notes

(1) À Saint-Crépin, la municipalité proposa, le 27 novembre 1793, de rebaptiser la commune Brumaire-aux-Bois (Délib. mun. de Saint-Crépin, 1 D 1), mais le District de Compiègne lui attribua le nom de La Blanchirie ; pour Saint-Léger, La Chanvrière, parfois décliné en La Chanvrerie, fut en revanche imposé par le District et adressé au Comité de Sûreté générale le 25 frimaire an II (15 décembre 1793), dans une liste de nouveaux noms pour sept communes rurales, sans compter la ville de Compiègne, qu'une délibération de la Société populaire du 18 novembre 1793 voulut changer en Marat-sur-Oise.
(2) A.D. Oise, 3 Lp 146, Délibérations de la municipalité cantonale de Rethondes, brumaire an IV pluviôse an VIII
(3) Cette maison apparaît dans les textes anciens sous le nom latin de "HERBAUDIANISVA" ou "HARBAUDIAMISUA". Située à la limite des diocèses de Noyon et de Soissons et disputée entre leurs évêques, elle aurait été d'abord attribuée à celui de Noyon par le synode de Reims de 814.
(4) Les habitants de Saint-Léger dépendirent auparavant des paroisses de Thourotte puis du Plessis-Brion. Le choeur de l'église, consacré à Saint-Léger, resta réservé au prieuré, qui conservait jusqu'à la Révolution des droits de moyenne et basse justice ; la nef fut dédiée à Saint-Jean-Baptiste, patron de la paroisse.
(5) D'après les calculs effectués à partir de la série Q des A. D. Oise, vente des Biens nationaux sous la Révolution. À Saint-Léger, pour une superficie de 830 ha, les Biens nationaux dits de "première origine" (clergé) ne représentaient que 15,6 ha. comprenant les terres du prieuré et du séminaire de Soissons, 1 mancault de pré de l'abbaye d'Ourscamp, 2 setiers de terres et 2 boisseaux de prés de la cure, auxquels s'ajoutèrent en 1792, 8,8 a. de prés attenant à l'Oise pour les biens de la Liste Civile.
(6) Selon un mémoire de 1776 comparant la forêt de Compiègne jardinée en haute futaie, à celle de Laigue "exploitée en taillis avec réserve de baliveaux. La première contenant 28 000 arp. ne rapportait que 174 000 liv. ; la seconde contenant 7000 arp. rapportait 70 000 liv." (Monique HARLÉ d'OPHOVE "La Forêt de Compiègne, de la réformation de Colbert à la Révolution", Société Historique de Compiègne, 1968, p. 180. La superficie actuelle de la forêt de Laigue est de 3827 ha, contre 14 885 ha pour celle de Compiègne (ONF).
(7) "Mémoire des officiers de la maîtrise de Laigue à Mgr le Duc d'Orléans," A.D. Oise, B 1768-63, cité par M. HARLÉ d'OPHOVE, p. 56
(8) Destiné avant tout à alimenter Paris. Alors en taillis plus qu'en grandes futaies, la forêt de Laigue rapportait plus que celle de Compiègne au XVIIIe.
(9) A. C. Compiègne, BB. Cahiers du Tiers Etat en 1789. Doléances de la maîtrise de Laigue. La maîtrise de Compiègne demanda la continuation de la politique de reboisement, une meilleure exploitation par l'aménagement de routes, une claire délimitation avec la maîtrise de Laigue, après 60 ans de contestation.
(10) D'après Robert LEMAIRE "Paroisses et communes de France" Oise, Paris, EHESS, 1976, p. 707
(11) Louis GRAVES "Précis statistique sur le canton de Ribécourt" Beauvais, 1839, rééd. Res Universalis, Paris, 1991
(12) A.C. Saint-Crépin-aux-Bois, Délibérations municipales, Registre 1 D 1,10 août 1788-1835
(13) Hélène SIMON "Les cahiers de doléances des pays d'Oise en 1789" T.III, bailliage principal de Senlis et bailliages secondaires, Beauvais, 1999, p.174
(14) A.D. Oise, Registre de catholicité de Saint-Léger-aux-Bois, 1769 1787
(15) Le 17 mai 1789, l'assemblée municipale de Saint-Crépin répartit un secours de 350 livres pour l'emploi des pauvres à la réparation des chemins.
(16) Clay RAMSAY "Un épisode de la Grande Peur dans le Noyonnais, l'attaque du château de Frétoy (juillet 1789)", Ann. Hist. Comp. na 16,1981, p.24-30
(17) A.C. Compiègne, 5 Pl, Procès verbal d'installation du curé MAURICE, 15 mai 1791, par le greffier municipal Pierre-François WIART, mentionnant les signatures "des membres de la Municipalité et plusieurs de la Commune MERCIER maire, MOGNIOLLE, CASSE, GRUGNY, LECLERE, FAVRIEAUX, FLOBERT, LARDOT, ROLLET, NATTIER, MOGNIOLLE l'aîné, LEFEVRE, MOURET, DEMONT"
(18) Les registres paroissiaux de 1769 à 1792 donnent les noms des vicaires PARIS (1769), COULON (1770-1775), CROCHET, MOINET (1776-1777), CHARLOT (1778-1782), BÉGUIN (1782-1784), Jean-Louis CARRÉ (1784-1788), dont le futur curé Jean-Gabriel LECOEUR était pensionnaire en juin 1784, LOBBÉ, LEGRAS (1789), et Nicolas-Marie BARBIER vicaire desservant, seul dans la paroisse de septembre 1789 à juillet 1790, date de l'arrivée du curé DAVRICOURT.
(19) A.D. Oise, Registre paroissial de Saint-Léger-aux-Bois, 1788-1799, 6-7 novembre 1789, décès et obsèques de Nicolas Didelet, âgé de 77 ans, en présence de Pierre-Jean BRUNAT, curé de Saint-Crépin d'Offémont, doyen rural de Vic-sur-Aisne, Henri-Louis BOUTIN, curé de Choisy-au-Bac, Louis FRANÇOIS et Jean-Louis LOBBÉ, curé et vicaire de Tracy-le-Mont, Jean Baptiste LEFEVRE curé de Montmacq, Antoine-Benoît LEGRAND curé de Villers-sur-Coudun, François FÉRON, curé de Tracy-le-Val, Adrien-Charles BARBILLON, curé de Thourotte et du vicaire BARBIER
(20) A.D. Oise, 2 Lp 5014, délibérations du Directoire du District de Compiègne, 21 juillet 1790
(21) Ce prêtre mal connu, en dehors de son "mauvais serment" de janvier 1791, aurait émigré vers le 15 mai 1791, selon la municipalité (Correspondance au District, 25 prairial an II - 13 juin 1794).
(22) A.D. Oise, 2 Lp 5014, délibérations du Directoire du District de Compiègne, 24 décembre 1790
(23) Il devint grand vicaire de ce prélat, investi de pouvoirs d'administration clandestine du diocèse après son émigration en juin 1791. On incrimina aussi l'archevêque de Narbonne Arthur DILLON, alors réfugié au château de Hautefontaine.
(24) A.C. Compiègne, 5 Pl, Clergé constitutionnel, 16 mai 1791
(25) A Crépy-en-Valois, le curé MAURICE fut l'un des fondateurs et animateurs de la Société Populaire, devant laquelle il renonça au culte en novembre 1793. Greffier municipal, il acquit l'ancienne abbaye Saint-Arnoult.
(26) L'assemblée électorale pourvut aux cures de Saint-Léger et de Saint-Etienne, dont le curé POIRET avait donné sa démission. LECOEUR fut élu par 46 voix sur 47 votants. (AC. Compiègne, 5 Pl).
(27) A.D. Oise, registre paroissial de Saint-Léger, 1769-1787, en juin 1784, "Jean Gabriel Lecoeur, pensionnaire chez M. le vicaire".
(28) A.D. Oise, Délibérations du District de Compiègne, 2 Lp 2006, 1er frimaire an II - 21 novembre 1793, avec l'envoi de ses lettres de prêtrise ; Délibérations du comité de surveillance de Compiègne, 4 Lp 244, 29 floréal an II (19 mai 1794)
(29) Notice de Gaston BRAILLON "Le Clergé du Noyonnais pendant la Révolution", Noyon, 1987, p. 220
(30) A.D. Oise, Délibérations du District de Compiègne, 2 Lp 2012, 20 thermidor an III (7 août 1795)
(31) A.C. Saint-Crépin, délibérations municipales, 1 D 1,22 septembre 1793
(32) A.D. Oise, 2 Lp, tableau des instituteurs du district, ventôse an II
(33) Jacques BERNET "Un Babouviste compiègnois ? Jean-Baptiste SIVÉ (1766-1808)", Ann. Hist. Comp. na 67-78, 1997, p. 27-32
(34) A.D. Oise, 2 Lp 2006, Délibérations du conseil du District de Compiègne, 24 octobre 1793
(35) Idem. 1er frimaire an II (21 novembre 1793)
(36) A.D. Oise, 2 Lp 2008, Délibérations du conseil du District de Compiègne, 13 floréal an II (2 mai 1794)
(37) A.D. Oise, 2 Lp 5045, correspondance de l'agent national du District de Compiègne, 7 floréal an II (28 avril 1794)
(38) A.C. Saint-Crépin, délibérations municipales, 1 Dl, 7 frimaire an II (27 novembre 1793)
(39) A.D. Oise, 2 Lp 2007, Délibérations du conseil du District de Compiègne, 25 frimaire et 4 nivôse an II 15 et 24 décembre 1793)
(40) A.D. Oise, Délibérations du District de Compiègne, 2 Lp 2010, 5 frimaire an III - 24 novembre 1795)
(41) A.D. Oise, 3 Lp 146, Délibérations de la municipalité cantonale de Rethondes, brumaire an IV pluviôse an VIII. Source majeure utilisée pour la période du Directoire
(42) Vincent REIG "La conscription dans le département de l'Oise de 1798 à 1805", Ann. Hist. Comp. n a 75-76, 1999, p. 5-14
(43) Grâce aux données aimablement transmises par Guy FRIADT, on sait que l'un de ces conscrits, Jean-Baptiste FAVRIAUX, eut une belle carrière militaire et une grande longévité : né à Saint-Léger le 12 novembre 1777, parti en 1799, il fit les campagnes jusqu'en 1809-1813, valant la médaille de Saint-Hélène en 1857 à ce vétéran décédé le 3 novembre 1863 à près de 86 ans.

 

Chronologie de la Révolution Française à Saint-Léger-La Chanvrière

- septembre 1788 : François NATTIER nommé lieutenant de justice de la paroisse par l'économe du séminaire de Soissons
- 9 mars 1789 : Pierre-François WIART, cultivateur-maître d'école et Pierre RICART, élus délégués de la communauté de Saint-Léger-aux-Bois dans l'assemblée électorale du Tiers-État du bailliage de Compiègne
- 6 novembre 1789 : décès de Nicolas DIDELET (1712-1789), curé de Saint-Léger depuis plus de 30 ans, provisoirement remplacé par le vicaire Nicolas-Marie BARBIER (1765-1845), arrivé à Saint-Léger en septembre 1789
- février 1790 : La commune de Saint-Léger est rattachée au canton de Rethondes, district de Compiègne, département de l'Oise. Formation de la première municipalité : premier maire connu, Jean-Baptiste MERCIER, cultivateur, en mai 1791
- 14 juillet 1790 : Fête de la Fédération : la municipalité de Saint-Léger s'oppose à la prise de possession de la cure par "un jeune ecclésiastique résignataire du curé de Montmacq, lequel !'était lui-même du dernier curé de lad. paroisse de St Léger" et y nomme le vicaire BARBIER contre l'avis du District. Louis-Désiré DAVRICOURT curé de Saint-Léger, en juillet 1790
- 24 décembre 1790 : Le District de Compiègne accuse la municipalité de Saint-Léger de "dilapidation", pour avoir enlevé des ornements de l'église "sous prétexte que M. l'évêque de Soissons leur en avait donné la permission".
- 9 janvier 1791 : serment à la Constitution civile du Clergé du curé DAVRICOURT et du vicaire BARBIER de Saint-Léger
- 22 janvier 1791 : rétractation de serment de DAVRICOURT, considéré comme "réfractaire", démissionnaire et à remplacer
- 8 mai 1791 : élection à la cure de Saint-Léger de Jean-Nicolas MAURICE, prêtre habitué de Saint-Antoine de Compiègne
- 15 mai 1791 : prise de possession de sa cure par MAURICE, départ de DAVRICOURT, BARBIER vicaire jusqu'en novembre
- 2 décembre 1791 : départ de MAURICE, élu le 17 octobre à la cure de Crépy-en-Valois, remplacé par Antoine-Gabriel LECOEUR, vicaire de Tracy-le-Mont, élu le 18 décembre 1791 à Compiègne pour la cure de Saint-Léger
- 13 novembre 1792 : transfert de l'état-civil de la paroisse à la commune. Le curé LECOEUR, élu notable municipal, devient élu officier d'état civil et conserve le poste jusqu'en l'an III (1795).
- 13 août 1793 : noyade accidentelle dans l'Oise du laboureur Jean-Baptiste MERCIER, 47 ans.
- 22-24 septembre 1793 : dénonciation de la municipalité de Saint-Crépin contre le maire de Saint-Léger, J.-L. LOMBARE
- 28 octobre 1793 : intervention à Saint-Léger du notaire SIVÉ, substitut du procureur-syndic du district de Compiègne, contre le maire LOMBARE, accusé de ne pas publier les décrets et de frauder sur les ventes de biens nationaux depuis février 1793, de s'opposer à l'application des premiers arrêtés déchristianisateurs des représentants LEVASSEUR et DUMONT
- 21 novembre 1793 : abdication du curé LECOEUR de ses fonctions sacerdotales et envoi de ses lettres de prêtrise au district
- frimaire an Il (décembre 1793) : Saint-Léger-aux-Bois est rebaptisé "La Chanvrière" par le District de Compiègne.
- 7 floréal an Il (27 avril 1794) : épuration de la Municipalité de Saint-Léger par l'agent national du District, Bertrand. "On commence à s'accoutumer aux décadis" dans la commune.
- 2 mai 1794 : L'église est transformée en "Temple de la Raison", selon la déclaration de l'instituteur MOURET au district.
- 29 floréal an II (19 mai 1794) : certificat de civisme de l'ex-curé LECOEUR, avec 400 francs de pension en juillet 1794
- 20 messidor an II (8 juillet 1794) : mariage de l'ex-vicaire BARBIER, instituteur, avec Marie-Magdeleine BRIDOUX
- 23 thermidor an II (10 août 1794) : célébration à Saint-Léger du second anniversaire de la chute de la Monarchie
- brumaire an III : "Non observance des décadis. Lecture des loix décente" à Saint-Léger, selon l'agent national de Saint-Léger
- 4 frimaire an III (24 novembre 1794) : séjour de 18 cavaliers montés à Saint-Léger, pour la surveillance de la forêt de Laigue
- 1er pluviôse an III (20 janvier 1795) : mariage de l'ex-curé LECOEUR avec Marie-Thérèse DELORME
- 20 thermidor an III (7 août 1795) : déclaration de culte et de soumission aux lois à Saint-Léger d' A.M. CHARLOT
- 23 thermidor an III (10 août 1795) : noyade accidentelle dans l'Oise de Marguerite FLOBERT, veuve de J.B. MERCIER
- 23 brumaire an IV (14 novembre 1795) : mise en place de la municipalité cantonale de Rethondes, à laquelle appartenait Saint-Léger-La Chanvrière, représentée par un agent municipal et un adjoint
- 10 frimaire an IV (1er décembre 1795) : La municipalité cantonale proteste contre la surcharge de réquisitions de grains pour le marché de Compiègne, "attendu que la majeure partie des territoires dudit canton sont en chanvrières, préz, bois, rivières, larris, savarts et la forêt de Laigue qui en mange beaucoup".
- 15 nivôse an IV (5 janvier 1796) : mention d'un instituteur et de 60 écoliers à Saint-Léger
- 20 prairial an IV (8 juin 1796) : Thomas RICARD, nommé garde-champêtre de Saint-Léger
- 30 messidor an IV (18 juillet 1796) : gros dégâts de la grêle dans le canton, notamment à Saint-Léger
- 10 fructidor an IV (27 août 1796) : pétition de LECOEUR, contre le passage d'experts en la "maison nationale" qu'il occupe
- 28 brumaire an V (18 novembre 1796) : On dénonce des "rassemblements" de brigands en forêt de Laigue et parc d'Offémont.
- 20 frimaire an V (15 décembre 1796) : grande battue contre les loups en forêt de Laigue.
- 10 fructidor an V (28 août 1797) : l'ex-curé LECOEUR doit opter entre ses fonctions d'adjoint municipal et de percepteur.
- 30 fructidor an V (17 septembre 1797): Louis MOGNIOLLE nommé adjoint de Saint-Léger, après le 18 fructidor
- 15 germinal an VI (4 avril 1798) : Jean-Marie FERTE, nouvel agent municipal de Saint-Léger
- 15 fructidor an VI (2 sept. 1798) : LECOEUR, pensionné ecclésiastique, prête serment de "haine à la royauté et à l'anarchie"
- 15 brumaire an VII (6 novembre 1798) : même serment de BARBIER pensionné ecclésiastique, de retour à Saint-Léger.
- 5 frimaire an VIII (4 décembre 1798) : serment d'allégeance des fonctionnaires publics du canton au Consulat provisoire
- 5 pluviôse an VIII (26 janvier 1800) : serment à la Constitution de l'an VIII des pensionnés BARBIER et LECOEUR
- germinal an VIII (avril 1800) : Saint-Léger est rattaché au canton de Ribécourt, arrondissement de Compiègne.

 

 

Saint-Léger-aux-Bois dans la Première Guerre mondiale
la Grande Guerre, vue par Maurice Bonnart
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Saint-Léger-aux-Bois à travers ses monuments et ses rues
La Seconde Guerre mondiale et l'Occupation à Saint-Léger

 

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