ugène PERRUSSOT

nstituteur à Saint Emiland (novembre 1888 - janvier 1901)

par Michel Guironnet - novembre / décembre 2005

 

ispense d'âge pour passer le Certificat

"Paris, le 2 juillet 1889
Monsieur l'Inspecteur (d'Académie à Mâcon),
J'ai l'honneur de vous communiquer pour renseignements et avis, la demande de dispense d'âge formée par le Sieur Perrussot, instituteur adjoint à Saint Emiland, à l'effet de se présenter à l'examen du certificat d'aptitude pédagogique.
"

 

Saint Emiland se situe dans la cible bleue. http://www.viamichelin.com/

 

L'inspecteur d'académie de Mâcon communique le dossier le 6 juillet à l'inspecteur primaire d'Autun, le priant "de vouloir bien l'examiner et me le renvoyer dans le plus bref délai avec votre rapport terminé par des conclusions motivées."

Celui-ci rend un avis favorable le 11 juillet et le 14 août, l'inspection académique prend sa décision : Eugène Perrusot peut bénéficier d'une dispense pour se présenter à l'examen.

Rappelons qu'Eugène Perrussot est titulaire depuis le 21 juillet 1885 du Brevet de Capacité (simple), examen passé et réussi à Mâcon. Le Certificat d'Aptitude Pédagogique est, pour la suite de sa carrière d'instituteur, "un deuxième niveau" indispensable après le Brevet de Capacité... En juillet 1889, il n'a pas encore 21 ans. C'est pour cela qu'il demande une dispense d'âge.

 

Saint Emiland - La place

Route de Couches et Hôtel Picard

 

 

e certificat d'aptitude pédagogique

 

Dès 1816, date du premier règlement sur les brevets d'instituteur, on a compris qu'il ne suffisait pas de constater le degré d'instruction générale des candidats, mais qu'il fallait s'enquérir aussi de leur aptitude à l'enseignement…

Les examens du Brevet entre 1833 et 1850 ne se bornent plus à une interrogation sur les modes d'enseignement et sur les méthodes. Ils intègrent en outre une leçon orale sur une matière d'enseignement. Le règlement de 1836 sur les Brevets des institutrices contient une disposition plus importante encore : il exige l'exposition des principes d'éducation et des diverses méthodes.

Le législateur de 1850 (loi Falloux) considéra sans doute cette épreuve comme inutile, peut-être même dangereuse. Il la supprime. Aussi ne tardait-on pas à s'apercevoir combien les instituteurs et les institutrices étaient peu préparés à leurs fonctions.

Une circulaire ministérielle du 8 mai 1855 cherche à réagir et recommande aux examinateurs de rattacher à l'épreuve de lecture diverses questions sur les meilleurs procédés à suivre pour l'enseignement de cette matière.

Il faut arriver à l'arrêté de 1866 pour retrouver cette timide épreuve pédagogique. Le ministère recommande aux examinateurs de poser aux candidats des questions sur les procédés d'enseignement des diverses matières comprises dans le programme obligatoire.
Mais cette épreuve ne fut jamais en grand honneur auprès des commissions d'examen qui ne voyaient pas l'utilité qu'il y a pour l'instituteur d'avoir réfléchi et de s'être fait une opinion sur la meilleure manière d'organiser une école, de distribuer son temps, de diriger les enfants et d'enseigner les différentes matières du programme...

Le Certificat d'Aptitude Pédagogique est officiellement instauré en 1881 : il est institué, dit l'article 3 du décret du 4 janvier 1881, sous le nom de Certificat d'Aptitude Pédagogique, un titre complémentaire de l'un ou de l'autre brevet, destiné à constater plus particulièrement l'aptitude des instituteurs ou des institutrices à la direction des écoles publique à plusieurs classes. Et l'article 6 ajoute que les candidats à ce certificat devront avoir 21 ans révolus et justifier de 2 ans d'exercice au moins dans l'enseignement public ou libre. Le décret ne pouvait pas rendre ce nouveau diplôme légalement obligatoire pour tous. Aussi ne l'institua-t-il qu'à titre facultatif et comme but posé aux candidats à la direction des grandes écoles, en attendant qu'une loi l'impose à tous.

Voici les épreuves de cet examen à son début :

  • 1° Une composition française sur un sujet relatif à la tenue de l'école ou aux procédés d'enseignement
  • 2° Une correction orale de devoirs d'élèves faits devant le jury après une demi-heure de préparation
  • 3° Une leçon faite devant un jury, dont le sujet, tiré au sort, pourra être une leçon de choses, une leçon d'instruction morale et civique, de langue française, d'histoire, de géographie, d'arithmétique ou d'agriculture.

A partir de 1886, l'examen devint obligatoire pour tous. Il comporte trois épreuves : une épreuve écrite qui est éliminatoire, une épreuve pratique et une épreuve orale.
Les candidats peuvent être dispensés de la première s'ils justifient d'au moins 5 ans d'expérience professionnelle. Elle consiste en une composition française sur un sujet élémentaire d'éducation et d'enseignement.
Pour les candidats admissibles, l'épreuve pratique consiste en une classe de 3 heures faite par chaque candidat dans la classe ou l'école qu'il dirige. Cette épreuve se fait dans le cours de l'année scolaire devant une sous-commission nommée par l'inspecteur d'Académie.
L'épreuve orale se fait à la suite de l'épreuve pratique.
Elle consiste :

  • 1° Dans l'appréciation de cahiers de devoirs mensuels
  • 2° Dans des interrogations en rapport avec les autres épreuves déjà subies par le candidat et portant sur des sujets relatifs à la tenue et à la direction d'une école primaire élémentaire ou sur des questions de pédagogie pratique.

Chacune des épreuves est jugée d'après l'échelle de 0 à 20. Tout candidat qui n'a pas obtenu la note 10, tant pour l'épreuve écrite que pour l'épreuve pratique, est ajourné. Est ajourné également tout candidat qui n'a pas obtenu la moyenne 30 pour l'ensemble des épreuves. (1)

(1) Cet historique s'inspire pour l'essentiel de "Les examens du personnel de l'enseignement primaire" in Mémoires et documents scolaires publiés par le musée pédagogique ; chapitre sur le Certificat d'Aptitude Pédagogique (p. 64-88) Merci aux correspondants du "Guichet du Savoir" de la Bibliothèque municipale de Lyon pour m'avoir orienté dans ces recherches documentaires.

 

Comment Eugène Perrussot se prépare-t-il pour cet examen, tout en faisant sa classe aux enfants de Saint Emiland ?

Par un important travail personnel, en s'aidant d'ouvrages spécialisés tels que :

Il est vrai qu'en 1889, Eugène est encore célibataire, libre comme l'air et maître de son emploi du temps ! Eugène obtiendra son diplôme à la session de 1890-91.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

nspection de la classe de garçons à Saint Emiland

Rapport sur l'instituteur adjoint (du 1er janvier 1889) :

Au dos du document est le procès verbal de la visite fait par l'inspecteur primaire d'Autun le 26 mars 1889. La classe d'Eugène compte 44 élèves !

"Renseignements et remarques particulières…

Cette précédente inspection avait eu lieu en décembre 1887, Eugène Perrussot n'est pas l'instituteur en poste.

 

Saint Emiland - Rue du Centre

 

L'inspecteur donne sa "note générale sur la classe : assez bien - 14 (sur 20)".
En conclusion, il écrit : "Mr Perrussot promet de faire un sujet sérieux ; il n'a pas encore assez d'expérience, mais il a des aptitudes et du zèle."
"Mr Perrussot doit être maintenu à son poste, suivant le désir qu'il a exprimé."

 


 

ppel sous les drapeaux

Le 3 octobre 1890, Eugène écrit à l'inspecteur d'académie :
"… Faisant partie de la classe 1889, je dois être appelé en novembre prochain à faire une année de service militaire."

Eugène précise "ayant un frère sous les drapeaux, et étant moi-même aîné d'orphelins, je n'ai pas eu à contracter d'engagement décennal ; mais mon plus grand désir serait d'être replacé à mon retour de service en octobre 1891 dans mon poste actuel à Saint Emiland.
Je prie donc Monsieur l'Inspecteur d'Académie de ne désigner mon remplaçant à Saint Emiland que pour l'année que je resterai sous les drapeaux...
"

Quel est le frère sous les drapeaux ? Ce ne peut qu'être Claude, 18 ans en 1890. Henri n'a alors que 16 ans… un peu jeune pour être soldat !

 

fiche matricule d'Eugène - 1889

 

Pour connaître Claude (1871-1894), frère d'Eugène

 

 

 

e service militaire en quelques mots

 

Le marquis de Chasseloup-Laubat, rapporteur de la loi du 27 juillet 1872, présente le service militaire comme "une nécessité sociale qui s'imposerait à notre pays alors même que la défense de notre sol ne le commanderait pas impérativement."

Dans son article 1, cette loi stipule que "Tout Français doit le service militaire personnel." La durée du service militaire est fixée à 5 ans dans l'armée d'active. Puis les conscrits restent dans la réserve pendant 4 ans. Enfin, ils appartiennent à la territoriale pendant 11 ans. Ce qui en tout fait 20 ans d'obligations militaires pour tous… en théorie.

En fait, la loi maintient de nombreuses inégalités avec un système de dispenses très libéral concernant les ecclésiastiques, les enseignants, les soutiens de famille (c'est le cas d'Eugène, à double titre).
Les élèves des grandes écoles, eux, s'engagent à servir dans la fonction publique pendant au moins 10 ans. C'est l'engagement décennal dont parle Eugène.
De plus, comme il est impossible de financer l'incorporation de la totalité des contingents pendant 5 ans, un système de tirage au sort a été mis en place : ceux qui tirent les "bons numéros" ne doivent effectuer que 12 mois, voire moins.

La loi du 17 juillet 1889 fait progresser le principe d'universalité. Un service militaire de 3 ans est imposé à tous, religieux et laïcs. En revanche, les instituteurs laïques, seuls instituteurs publics, ne sont assujettis qu'à un an de service. Le tirage au sort subsiste : ceux ayant tiré un bon numéro continuent à n'effectuer qu'un an de service actif.

 

 

Etats de Services

Les "Etats de Services" d'Eugène Perrussot (2) indiquent : "Jeune soldat appelé dispensé (en vertu de l') article 21 de la classe 1889 de la subdivision d'Autun. N° 73 de tirage dans le canton de Couches les Mines. N° 2357 au Registre matricule du Recrutement"

Eugène Perrussot effectue donc son année de service militaire comme soldat de 2e classe au 10e Régiment d'Infanterie à partir du 11 novembre 1890.
Affecté comme Caporal au 29e Régiment d'Infanterie, à Autun, il est libéré de ses obligations militaires le 23 septembre 1891. Une note précise : "envoyé en congé le 23 7bre1891 en attendant son passage dans la réserve de l'armée active qui aura lieu le 1er 8bre 1893."

 

Autun - Caserne du 29e d'Infanterie - Ancien séminaire

 

Comme il le souhaitait, Eugène Perrussot retrouve son poste d'instituteur stagiaire à Saint Emiland le 1er octobre 1891.

(2) Infos tirées de son dossier de la Légion d'Honneur

 


 

emande de titularisation

Saint Emiland, le 20 février 1892 :
"… J'ai l'honneur de vous prier de vouloir bien m'accorder le titre de titulaire le plus tôt possible. Je suis instituteur-adjoint depuis le 24 avril 1886, ce qui me fait près de six années de service, dont 10 mois ½ passés au Régiment. En même temps, je suis l'aîné de trois orphelins…"

Eugène Perrussot reprend alors les mêmes arguments que dans ses précédents courriers : décès de ses parents suite au choléra, alors que son père était à "moins de 58 jours" de la retraite, pension inexistante…
"… Depuis huit ans, je n'ai cessé de venir en aide à mes frère et sœur, n'aspirant qu'au moment où je pourrai prendre le plus jeune avec moi, afin de l'élever et d'en décharger mon oncle, un vieillard de 70 ans, qui n'est plus dans l'âge de travailler et qui a besoin de repos." (1)
"Je vous prie donc, Monsieur l'Inspecteur d'Académie, en considération des longs services de mon père, ancien fonctionnaire de l'Etat mort d'une cruelle maladie, sur le point d'avoir sa retraite, en considération aussi de ma situation exceptionnelle, celle de soutien de famille, de vouloir bien faire droit à ma demande s'il est possible…"

(1) Le plus jeune frère d'Eugène s'appelle Henri-Joseph. Il est né à Toulon le 19 juillet 1874.
Jean Dutroncy, l'oncle en question, est né le 7 février 1824. Il épouse le 18 septembre 1849 Jeanne Perrussot, sœur aînée d'André Perrussot, le père d'Eugène. Toute la famille vit à Saint Jean de Trézy.

 

Pour cette période de la vie d'Eugène

 

 

élégramme d'Alger

Télégramme urgent pour l'Inspection académique :
"23 septembre 1893. Recteur à Inspecteur : prière faire savoir par télégramme si M. Perrussot accepte nomination à la section spéciale"

D'Auxonne, dès le lendemain, Eugène envoie sa réponse à l'inspecteur d'académie :
"J'ai l'honneur de vous informer que j'ai refusé ma nomination à l'Ecole Normale d'Alger, Cours Spécial.
Mon intention était d'y aller mais mes parents s'y opposent. Je n'ai pu vous faire connaître plus tôt ma détermination, attendu que je suis au Régiment et que mon admission ne m'est parvenue qu'aujourd'hui 24 7bre (septembre) courant. J'ai télégraphié à M. le Recteur d'Alger.
"

 

 

Cela mérite quelques explications : (1)

Le 4 mars 1865, un décret impérial de l'Empereur Napoléon III fonde la première École Normale d'Algérie. Le 16 janvier 1866, l'Ecole Normale d'Alger, située à Mustapha Supérieur, est inaugurée avec un effectif de 30 élèves.
Au programme de l'enseignement : instruction morale et religieuse, pédagogie, écriture, lecture, rédaction, langue française, arithmétique, calcul, système métrique, notions d'algèbre, géométrie, dessin, histoire, géographie, notions de mécanique et d'industrie, physique, chimie, histoire naturelle. Il faut ajouter agriculture et horticulture, administration et état civil, chant et orgue, gymnastique et hygiène. Très rapidement on y adjoint l'étude de l'arabe.

Dès 1877, suite à des mouvements de terrain, il faut envisager le transfert des bâtiments. Les locaux sont, de plus, insuffisants pour les 54 élèves. Début 1888, à cause d'une menace d'épidémie de typhoïde et de glissements de terrain, l'École est transférée dans les bâtiments inachevés et inutilisés de l'asile d'aliénés de Bouzarea. L'École se développe peu à peu : ateliers, laboratoires, dortoirs, bibliothèques, agrandissement des cuisines, création de jardins.

 

Nouveaux uniformes de l'Infanterie Française
Tenue Réséda - Sergent

 

De 1865 à 1885, le recrutement local pose des problèmes et il est nécessaire d'avoir recours à des candidats de la Métropole. Ces difficultés de recrutement des élèves indigènes amènent l'ouverture d'une section spéciale, destinée aux indigènes, et d'un niveau inférieur à l'enseignement européen.

Avec la création en 1891 de la "Section spéciale", l'effectif va passer à 90, puis 209 en 1892 et 248 l'année suivante. Le directeur pourra alors déclarer : "L'École Normale de Bouzarea est devenue la clef de voûte de l'édifice scolaire en Algérie". Elle devenait en cette année la plus importante des Écoles Normales Françaises.

C'est cette affectation qu'Eugène Perrussot décline, influencé "par ses parents". C'est du Régiment d'Auxonne, où il effectue une "période militaire", qu'il donne sa réponse. En effet, dans son "Etat des Services" (2), il est noté : "10e Régiment d'Infanterie (arrivée au corps comme) Caporal 12 juin 1893…(promu) Sergent (de Réserve) 1er octobre 1893".

 

la Caserne d'Auxonne

 

En 1893, Eugène "fréquentait-il" déjà Mlle Jacquard, qu'il épousera 2 ans plus tard ? Sylvie, alors, lui aurait parlé de son frère Ernest, instituteur en Algérie depuis 1890... C'est peut-être cela qui a donné l'idée à Eugène de postuler à l'Ecole Normale d'Alger... Ernest connaissait-il Eugène avant de partir Outre-Mer ? On ne le saura jamais.
S'il avait accepté de partir enseigner à Alger, on peut se poser la question : aurait-il épouser Sylvie Jacquard ?

(1) Ce passage est rédigé grâce à l'histoire de l'Ecole Normale d'Alger Bouzarea publiée sur le site de l'ENIB http://www.bouzarea.org/Histoire%20ENIB.htm

(2) Pièce du dossier de la Légion d'Honneur d'Eugène Perrussot
Bonaparte fut "lieutenant en deuxième" à la compagnie des bombardiers du régiment de La Fère (Artillerie), à la garnison d'Auxonne en 1788.

 


 

ugène Perrussot épouse Sylvie Jacquard, institutrice à Saint Emiland, d'une "dynastie" d'instituteurs

"L'an mil huit cent quatre vingt quinze, le vingt deux septembre, à dix heures du matin, devant nous Dessy Louis, Maire officier de l'Etat civil de la commune de Saint Emiland, canton de Couches les Mines, arrondissement d'Autun, département de Saône et Loire ; ont comparu publiquement à la mairie :
Mr Perrussot Eugène Henri Jean Baptiste, âgé de vingt-six ans, célibataire, Instituteur Adjoint, demeurant à Saint Emiland, né à Toulon (Var) le vingt quatre janvier mil huit cent soixante neuf, fils majeur et légitime de feu Perrussot André, décédé au dit Toulon le quinze juillet mil huit cent quatre vingt quatre, et de feue Rancurel Philomène Françoise, décédée à Saint Jean de Trézy le vingt mai mil huit cent quatre vingt cinq ; d'une part
et Mlle Jacquard Sylvie Marie Charlotte, âgée de vingt-sept ans, célibataire, Institutrice, demeurant à Saint Emiland, née à Gergy (Saône et Loire) le vingt mai mil huit cent soixante huit, fille majeure et légitime de Jacquard Jean, Instituteur honoraire et de Gaffiat Charlotte Félicité, sans profession, demeurant ensemble à Verdun sur le Doubs ; d'autre part.
Lesquels procédant, le futur de son propre consentement et la future de celui de ses père et mère ici présents, nous ont requis de procéder à la célébration de leur mariage…
(Les futurs époux déclarent qu'il n'y a pas eu de contrat de mariage)
(Nous, Maire) avons successivement demandé aux futurs époux s'ils veulent se prendre pour mari et pour femme, chacun d'eux ayant répondu séparément et affirmativement, déclarons publiquement, au nom de la loi, que Perrussot Eugène Henri Jean Baptiste et Jacquard Sylvie Marie Charlotte sont unis par le mariage.
De quoi nous avons dressé acte en présence de Jacquard Claude, âgé de cinquante sept ans, Instituteur demeurant à Virey, oncle de l'épouse ;
Jacquard Ernest, âgé de vingt neuf ans, Instituteur, demeurant à Oran (Algérie) frère de l'épouse ;
Baroin François, âgé de trente six ans, Instituteur, demeurant à Saint Emiland, et Jondeau Etienne, âgé de trente neuf ans, sabotier, demeurant à Saint Emiland ; ces deux derniers amis des époux ;
Et nous nous sommes soussigné avec les époux, les père et mère des époux et les quatre témoins après lecture faite.
"

 

 

 

 

 

 

 

 

 

la famille Jacquard en septembre 1895
mois où Sylvie se marie.

 

la famille Jacquard en septembre 1895 - de gauche à droite,
les hommes : ? / prêtre Jacquard, mort accidentellement dans son clocher / père Jacquard / oncle Ernest, derrière
les femmes : ? / mère Jacquard / Clémentine Jacquard, la plus jeune / Sylvie Jacquard, épouse d'Eugène Perrussot

 

 

La jeune épouse d'Eugène Perrussot, alors institutrice à Saint Léger sous la Bussière, écrira le 28 novembre 1908 à l'Inspecteur primaire à Mâcon :
"… J'appartiens à une famille de membres de l'Enseignement qui n'ont jamais failli à leurs devoirs. Mon père, mon oncle, mes frères, mes sœurs, mes cousins germains sont tous instituteurs ou professeurs. L'un d'entre eux est Inspecteur d'Académie. C'est vous dire que la famille Jacquard ne compte que des travailleurs et des serviteurs à l'Enseignement et à la République."

Son père, Jean Jacquard, nommé instituteur honoraire en novembre 1894, est en retraite depuis deux ans. Né à Diconne (canton de Saint Germain du Bois, en Saône et Loire) le 11 septembre 1833, il a 62 ans. Avec son épouse, il réside à Verdun sur le Doubs. (1)

Dans un courrier à l'Inspecteur d'Académie le 30 avril 1896 pour une demande de "bourse dans un collège ou un lycée en faveur de ma fille Marie Clémentine Olympe Jacquard ; admise au concours du 16 courant", il écrit :
"… Je suis entré à l'Ecole normale de Mâcon en 1851 et j'en suis sorti en 1853 avec le Brevet complet. J'ai exercé les fonctions d'instituteur pendant 39 ans, 5 mois et 10 jours ; du 1er octobre 1853 au 10 avril 1893 et je n'ai occupé que deux postes : Champforgeuil et Gergy.
De plus, je suis titulaire de la Médaille d'Argent depuis le 10 juillet 1889… J'ai obtenu une mention honorable de la Société de Tempérance et une autre de la Société pour l'Instruction élémentaire.
Je crois devoir ajouter que, dans ma longue carrière, j'ai préparé et fait entrer 7 élèves à l'Ecole normale ; et que j'en ai fait recevoir 2 autres au Brevet seulement.
Je suis marié et père de 6 enfants, et je ne possède presque pas de ressources en dehors de ma pension.
Je suis d'une famille d'instituteurs. J'ai 4 enfants dans l'enseignement, savoir :

Un de mes frères est décédé instituteur adjoint à Chalon sur Saône en 1865 et un autre est encore en fonctions à Virey, arrondissement de Chalon. J'ai eu aussi un cousin instituteur décédé en retraite en 1891…"

Jean Jacquard, instituteur à Gergy depuis janvier 1867, a rédigé une monographie sur son village en 1887 (2).
Celle-ci est sur le site de la ville de Gergy :
https://www.gergy.fr/monographie-de-m-jacquard

 

Sylvie Jacquard naît donc en 1868 en Saône et Loire, non loin de Verdun sur le Doubs :
"L'an mil huit cent soixante huit et le vingt mai à cinq heures du soir, par devant nous Etienne Raffort, Maire et officier de l'état civil de la commune de Gergy, a comparu Jean JACQUARD, instituteur communal âgé de trente quatre ans, domicilié à Gergy ; lequel nous a présenté un enfant du sexe féminin, né aujourd'hui à trois heures du soir, en son domicile, de lui comparant et de Charlotte Félicité GAFFIAT, son épouse âgée de vingt cinq ans, sans profession, auquel enfant il a donné les prénoms de Sylvie, Marie-Charlotte.
Témoins : 1/ François Perret, garde champêtre, âgé de quarante ans ; 2/ Joseph Bonjean, instituteur adjoint, âgé de vingt deux ans, domiciliés tous deux à Gergy, lesquels ont signé avec nous le présent acte, ainsi que le comparant, après lecture (suivent les signatures)
."

Après l'école primaire, saisie par le "virus familial de l'enseignement", Sylvie commence à étudier à l'Ecole normale de Mâcon. Elle obtient le Brevet élémentaire en 1884 et poursuit ses études pour obtenir le Brevet supérieur (3).

 

 

La future institutrice doit s'entraîner à faire la classe. Dans son rapport pour la semaine du 4 au 10 octobre 1886, Madame Guinand, Directrice de l'Ecole annexe, écrit :
"Mademoiselle Jacquard a de la bonne volonté, elle est assez active et elle s'est assez bien tirée d'affaire durant cette semaine exceptionnellement difficile à cause de l'organisation des cours.
Elle a un peu de difficulté à s'exprimer et ne sait pas toujours maintenir l'attention de ses élèves, mais ce sont là des défauts dont elle se corrigera facilement. Elle peut enseigner le chant.
"

Sylvie obtient le Brevet supérieur en 1887. Les "renseignements sur Mlle Jacquard", rédigés à l'Ecole normale de Mâcon le 28 juillet 1887, nous apprennent qu'elle a une "santé assez délicate ; une tenue et des manières simples et convenables ; le caractère très bon et un peu mou ; son instruction et son aptitude à l'enseignement sont suffisantes."
"Mlle Jacquard est un des élèves les plus faibles de sa promotion, mais elle a travaillé sérieusement." Pour son affectation, ses vœux sont Gergy (où exerce son père) ou Pierre en Bresse, non loin de Louhans.

Nommée le 8 octobre 1887 à l'école publique de filles de Pierre, "école enfantine", en tant qu'institutrice stagiaire, elle est installée le 11, en remplacement de Mlle Valet "appellée (sic) à une autre destination."

 

Pierre de Bresse se situe dans la cible bleue. http://www.viamichelin.com/

 

Le 5 janvier 1888, c'est sa première inspection. Elle a de bonnes appréciations de la Directrice Mme Bonin. L'inspecteur d'Académie note le 20 janvier : "Je ne connais pas encore Mlle Jacquard qui n'est à Pierre que depuis le 15 octobre dernier."

 

Pierre de Bresse - Place de la Halle et Grande Rue

 

En septembre 1888, Sylvie écrit à l'Inspecteur d'Académie à Mâcon :
"… Institutrice stagiaire… devant me présenter en 1889 aux examens pour l'obtention du Certificat d'aptitude pédagogique, je ne peux guère m'y préparer d'une manière efficace, attendu que cette classe n'est pas organisée et n'est en réalité qu'une simple garderie…"
Elle demande "un cours élémentaire ou un cours moyen dans une autre école non éloignée de Gergy" où son père exerce ses fonctions d'instituteur.

La réponse ne tarde pas : "Mlle Jacquard est une débutante ; elle est tout à fait à proximité de son village natal, près de ses parents. Elle ne peut rien désirer de mieux. La classe enfantine de Pierre souffrirait de changements trop fréquents. Avis défavorable. Louhans 19 septembre 1888"

 

Pierre de Bresse - Ecole des Filles - Bureau de Poste

 

Le 5 février 1889, après son inspection, l'Inspecteur écrit : "Mlle Jacquard tient bien sa petite classe, maîtresse capable et zélée." Toutefois, il signale son "caractère indépendant".

Cette appréciation n'empêche pas Sylvie Jacquard de récidiver. Le 8 août 1889, elle écrit de nouveau à l'Inspecteur :
"… J'ai 21 ans depuis le 20 mai 1889 et je dois me présenter aux examens du Certificat d'aptitude pédagogique. Mais je ne puis me préparer utilement à Pierre…"
Principale raison : sa classe enfantine qui l'occupe trop. Elle réclame un poste "à Chalon Saint Cosme ou simplement à Chalon (sur Saône) dans le cas où un poste d'institutrice adjointe serait vacant ; car je pourrais être utile à ma sœur qui suit les cours du Collège de Jeunes Filles pour se préparer aux examens d'admission à l'Ecole normale…"
Il doit s'agir de Léonie, sa sœur cadette.

 

Pierre de Bresse - le Château et la Tour de l'Horloge

 

Cette fois, l'Inspecteur répond :
"La réclamation de Mlle Jacquard est très juste. Elle ne peut que perdre de son acquis à Pierre. Elle est bien notée et mérite un meilleur poste."

Sylvie Jacquard est donc nommée en octobre 1889 institutrice stagiaire à Rully, en remplacement de Mlle Besson.

 

Rully se situe dans la cible bleue. http://www.viamichelin.com/

 

Elle passe avec succès le Certificat d'aptitude pédagogique à la session de 1890.
Elle reste deux ans à Rully, mais les documents nous font défaut pour cette période.

 

Rully - la Place de la Croix Blanche

 

 

Rully - la Place Sainte Marie

 

Sylvie, 23 ans et 6 mois, est nommée institutrice titulaire à l'école de filles de Saint Emiland. Elle s'y installe le 3 novembre 1891. Elle rencontre au village l'instituteur de l'école de garçons Eugène Perrussot. Il aura 23 ans en janvier prochain. Il exerce ici depuis 1888 et vient de rentrer de l'armée il y a un mois.
Quatre ans plus tard, ils seront mari et femme.

 

Saint Emiland - à gauche, l'école communale de filles, photographiée en 1934

 

 

la même, photographiée en 2007

 

Sylvie a un frère aîné, Ernest, né à Champforgeuil le 22 mai 1866.
Breveté à Lyon, il débute comme instituteur adjoint à Saint Gengoux le National le 19 octobre 1885. Adjoint de son père à l'école de Gergy depuis octobre 1886, il sollicite un poste en Algérie, alors colonie française. Il est nommé à Béni-Saf (province d'Oran) le 24 avril 1890. Présent au mariage de sa sœur Sylvie en 1895, il est instituteur adjoint "chargé de cours complémentaires" à l'école du quartier Karguentah à Oran même.
Il cesse ses fonctions le 13 avril 1896.

 

Oran - la Place Karguentah

 

 

Oran - le marché Karguentah

 

La sœur de Sylvie, Léonie Louise, naît le 27 juillet 1872 à Gergy "à six heures vingt minutes du matin, au domicile de son père." Celui-ci est accompagné pour la déclaration en mairie de "Claude Jacquard, instituteur à Virey, âgé de 34 ans, et de Louis Trullard, aussi instituteur à Saint Loup de la Salle, âgé de 23 ans."
C'est elle qui sera institutrice à Sevrey.

Un deuxième garçon, Claude-Emile, naît le 9 janvier 1876 à Gergy.
Les deux témoins en mairie sont de la famille Jacquard : Claude, instituteur à Virey, et un "Claude Emiland Jacquard, employé de chemin de fer, âgé de 31 ans, domicilié à Lyon, rue Delandine, numéro treize."
Vingt ans plus tard, le petit Emile sera instituteur stagiaire à Cuiseaux.

En 1884, le 28 juin, naissent au foyer de l'instituteur Jean Jacquard des jumeaux :

Les témoins sont "Nicolas Valot, rentier" âgé de 58 ans, domicilié à Chalon sur Saône ; Claude Jacquard, toujours instituteur à Virey.
C'est pour sa dernière fille, alors âgée de 12 ans, que Jean Jacquard sollicite une bourse.

L'instituteur de Virey s'appelle Claude Jacquard. Présent au mariage de sa nièce, il est né le 14 février 1838 à Diconne. Breveté à Lyon en mai 1858, il exerce à partir d'octobre 1859 à Mont les Seurre ; puis à Saint Didier en Bresse en 1862. D'octobre 1863 à sa retraite en avril 1899, il est instituteur à Virey. Il est marié et a trois enfants. Il meurt en janvier 1911.

(1) Coïncidence : mes ancêtres maternels ont pu, peut être, le rencontrer. D'abord installé à Santenay, où naît Anne sa première fille, Gaspard Chandioux est tailleur de pierres. Il est domicilié à Verdun sur le Doubs où naissent ses autres enfants, entre janvier 1874 et le 15 juillet 1888, naissance de ma grand mère maternelle Isaure. Son épouse, Rosine Lenoble, décède le 15 novembre 1890 à Verdun sur le Doubs. Gaspard Chandioux décède le 21 mars 1892 à Verdun sur le Doubs.

(2) Sur les monographies des instituteurs, on lira l'introduction sur le site Internet http://perso.wanadoo.fr/delbrayelle/monographies_des_instituteurs.htm

(3) Tous les documents cités sont tirés du dossier d'institutrice de Sylvie Jacquard 3 T 538 aux archives de Saône et Loire à Mâcon.

 

 

nspections et demandes pour "un poste double" d'instituteurs

Ce chapitre est construit essentiellement en croisant les données biographiques du dossier d'instituteur d'Eugène Perrussot (3 T 596) avec celui d'institutrice de Sylvie Jacquard (3 T 538) aux archives de Saône et Loire.

"Parfaite exactitude, moralité très bonne, caractère doux, franc et ferme, relations excellentes avec le Directeur, bonnes avec les familles."
Sur "sa manière d'être avec les enfants qui lui sont confiés", l'inspecteur note en juin 1894 : "Prend son rôle au sérieux et sait inspirer aux enfants le goût du travail."
Eugène Perrussot, toujours célibataire, est bien noté. Son traitement est de 1000 francs.

En décembre de la même année, l'inspecteur écrit : "Mlle Jacquard a parfaitement réussi à Saint Emiland où elle a acquis l'estime et les sympathies de tous par son attitude, sa conduite et la façon dont elle dirige son école. Celle-ci était sans élèves à l'arrivée de Mlle Jacquard (novembre 1891). Elle en compte aujourd'hui presque autant que l'école rivale."
Sylvie Jacquard enseigne à 42 filles. Précisons que "l'école rivale" est une école "congréganiste", c'est-à-dire dirigée par des religieux.

 

 

 

a "guerre scolaire"

 

Jules Ferry tire les premières salves dès mars 1879. L'article 7 de son projet de loi : "Nul n'est admis à diriger un établissement public ou privé de quelque ordre qu'il soit ni à y donner l'enseignement s'il appartient à une congrégation (religieuse) non autorisée" est principalement dirigé contre les Jésuites. Mais autant dire qu'il s'agit d'une interdiction d'enseigner à tous les congréganistes. En effet les congrégations avaient été en grande partie supprimées par la Révolution.
Suite au rejet de cet article par le Sénat, Ferry promulgue les 29 et 30 mars 1880 deux décrets : expulsion des Jésuites hors du territoire français dans les trois mois et obligation pour les autres congrégations de demander une autorisation pour régulariser leur situation sous peine d'être expulsées.
Les débats autour des lois Ferry (juin 1881 et mars 1882) sur l'école "gratuite, laïque et obligatoire" attisent encore les passions entre Républicains et Catholiques. La loi Goblet du 30 octobre 1886 décrète que le personnel des écoles publiques serait désormais laïc. Aucun religieux ne peut donc être instituteur public. Cela permet, par opposition, l'ouverture des "écoles congréganistes".

 

'armistice

Une période d'accalmie commence grâce à la politique dite du Ralliement de l'épiscopat français (toast d'Alger novembre 1890) et à la reconnaissance de la République par le Pape Léon XIII (février 1892). La lutte reprendra en 1899 entre partisans de l'école laïque et ceux de "l'école libre" suite aux projets de loi de Waldeck Rousseau.

 

Le 5 novembre 1895, Sylvie Jacquard "épouse Perrussot" (elle s'est mariée il y a à peine 2 mois !), lors de son inspection, est notée 13/20.
"Mme Perrussot a encore pas mal à apprendre au point de vue des méthodes d'enseignement. Elle y parviendra. Elle aime son métier et travaille volontiers. Elle a de plus un mérite sérieux : celui d'avoir repeuplé cette école que son prédécesseur avait laissé à peu près vide." Elle n'a plus que 34 filles en classe.

 

 

"prise peu avant mon mariage"
Sylvie se marie en septembre 1895.

 

 

 

Au début de l'année suivante, le 17 janvier 1896, le couple Perrussot fait une première demande "d'un poste double d'instituteur et d'institutrice chargés d'une école" :
"… Autant que possible, nous nommer dans une commune à proximité de Verdun sur le Doubs où habite notre famille…"

L'inspecteur primaire d'Autun donne un avis favorable le 26 janvier :
"Mr Perrussot est un maître zélé et capable. Quant à Mme Perussot, elle a su - malgré une sérieuse concurrence - peupler une école qu'elle avait trouvée à peu près vide d'élèves.
Les amis de l'enseignement laïque la verront partir de Saint Emiland avec regret.
"

Il écrit à son supérieur le 2 avril 1896 :
"… J'ai inspecté Mr et Mme Perrussot le 24 mars dernier… Mr et Mme Perrussot sont l'un et l'autre des maîtres sérieux.
Mme Perrussot est instruite, intelligente. Un peu molle, elle pourrait mieux faire. Toutefois, elle soutient avantageusement la concurrence contre l'école privée congréganiste.
"
"Mr Perrussot est laborieux, dévoué et doué d'une réelle aptitude pédagogique. Il obtient de bons résultats. Je donne à leur demande un avis favorable."

Pourtant, leur dossier n'avance pas. Les époux Perrussot renouvellent leur demande le 25 mai 1896 :
"… Voici nos états de services respectifs :

Emile (Léon Jean André), leur premier garçon, naît le 5 août 1896 "à quatre heures du soir."
Eugène Perrussot, "âgé de vingt sept ans, instituteur adjoint, sous-lieutenant de réserve au 134e de Ligne", déclare la naissance en Mairie de Saint Emiland le 7 août. Il est accompagné de ses amis témoins à son mariage : l'instituteur François Baroin, 37 ans, et le sabotier Etienne Jondeau, 40 ans, "tous deux domiciliés à Saint Emiland".

Un an après leur première demande, le 4 février 1897, Eugène et Sylvie écrivent chacun une lettre à l'inspecteur d'Académie à Mâcon :

"… J'ai l'honneur de vous prier de bien vouloir m'accorder mon changement de St Emiland et de me nommer instituteur adjoint dans une commune où ma femme serait, en même temps, directrice d'école. Je désirerais que cette commune soit à proximité d'une ligne de chemin de fer et autant que possible dans les environs de Verdun (sur le Doubs) où habite notre famille."
"A St Emiland, nous n'avons aucun avantage, les déplacements sont très coûteux et nous occasionnent beaucoup de dépenses.
Mes états de service, joints à ceux de ma femme, me permettent d'espérer un poste plus avantageux que St Emiland.
"
Eugène rappelle qu'il est Sous Lieutenant de réserve.

La lettre de Sylvie est rédigée en des termes presque identiques, employant les mêmes arguments. Son vœu est "un poste de directrice d'école avec adjointe, dans une commune où mon mari serait en même temps nommé instituteur adjoint."

Le 24 mars 1897, les deux écoles de Saint Emiland (827 habitants) sont inspectées.

Bonnes appréciations sur Monsieur Perrussot.
Les notes sur les matières enseignées s'échelonnent pour l'instituteur entre 10 et 14 sur 20 ; la plus basse est en dessin, la plus haute en géographie, les autres notes sont surtout des 13/20 (lecture, grammaire et orthographe, exercices de français, arithmétique et système métrique, chant, travaux manuels…12 en tenue des cahiers et écriture).
La "note professionnelle" attribuée est de 13/20.
"Mr Perrussot est chargé du Cours élémentaire et du Cours préparatoire (43 garçons en tout). C'est un maître expérimenté, actif, doué d'une aptitude pédagogique sérieuse…"
On apprend aussi que "M. Perrussot, marié à l'institutrice, est logé dans l'école de filles."

Le rapport d'inspection est plus sévère pour l'école de filles :
"Mme Perrussot m'a paru intelligente, instruite, mais molle et peu active. Les élèves récitent les leçons sans explications de la maîtresse qui, livre en main, les reprend si elles se trompent : rien de plus commode.
Pas de cours de morale suivi, des lectures sans résumé. Qu'en reste-t-il dans l'esprit des enfants ? Fort peu de chose sans doute.
Les cahiers sont assez bien tenus ; les devoirs assez bien choisis et corrigés.
Supprimer le cahier de dessin, les modèles sont trop difficiles à exécuter et l'élève les copie sans comprendre.
Résultats passables 11/20
"

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Eugène et Sylvie à St Emiland,
devant l'école de filles,
avec le petit Emile, né le 5 août 1896
La photo date de 1897 ou 1898.

 

 

 

 

 

 

En 1899, les époux Perrussot sont toujours à Saint Emiland !
Le 22 février, nouvelle demande pour obtenir "un poste double pour les prochaines vacances de Pâques".

Dans le ton employé, on sent une certaine lassitude et une pointe d'exaspération devant "les lenteurs de l'Administration".
Eugène rappelle que "sa femme, Mme Perrussot née Jacquard, a près de 14 ans de services. Elle est élève de l'Ecole Normale de Mâcon, elle est pourvue du Brevet Supérieur et du Certificat d'Aptitude pédagogique. Elle dirige l'école des filles de Saint Emiland depuis 1891 et a obtenu la mention honorable de la Société pour l'Instruction Elémentaire."
"De mon côté, je suis dans l'enseignement depuis le 3 mai 1886 ; je possède le Certificat d'Aptitude pédagogique depuis la session de 1890-91."
"J'ose espérer…que vous accueillerez favorablement notre demande."
Peine perdue ! Rien ne bouge.

 

 

Pour son inspection du 29 avril 1899, Eugène passe une épreuve de géométrie et une de récitation. Les résultats sont, dans l'ensemble, corrects "malgré quelques hésitations des enfants. Des améliorations sont souhaitables." Les appréciations de l'inspecteur sont bonnes … Eugène est noté 13/20.

Son épouse a la visite de l'inspecteur le 14 mai 1900 ; elle est notée 12/20 :

 

 

 

Enfin, début janvier 1901, les époux Perrussot obtiennent les nominations tant attendues : ils sont nommés à l'école primaire du hameau de La Chaume, à Marmagne.

 

 

 

nfance à Toulon et arrivée en Saône et Loire (1869-1885)
remières années dans la carrière d'instituteur (1885-1888)
nstituteur à Saint Emiland (1888-1901)
nstituteur à Marmagne (1901-1902)
nstituteur à Saint Léger avant la guerre de 14-18 (1902-1914)
oilu au front (1914-1919)
ernières années à Saint Léger puis à Saint Clément lès Mâcon, retraite et décès à Flacé
(1919-1930)

 

Michel Guironnet - novembre / décembre 2005

 

 

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